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14 JUIL 2011

Hommage à Micheline Fromentin – Cérémonie du 14 juillet, Monument Mémoire et Paix

Ce matin, notre fête nationale ne peut pas être gaie. Ce matin, des êtres, des voix, des regards, que nous avions l’habitude de croiser ou d’entendre entre ces murs, devant ce drapeau, sur ces marches, nous manquent. Ce matin, davantage encore, la droiture d’Antonio Antonioli nous manque. La vigilance rassurante, la force tranquille, de Jeanne et Michel Doucet nous manquent. Nos amis Michaud ou Mugnier nous manquent. Comme nous manque, quelques jours après sa disparition à la suite d’une longue maladie, la générosité de Micheline Fromentin.

Conseillère municipale, très engagée dans de nombreuses associations, attentive à chaque personne, heureuse de pouvoir aider, rendre service, débloquer une situation, Micheline Fromentin ne reculait devant aucun combat. Pour elle, il n’y avait pas de grandes ou de petites choses. Il n’y avait que du meilleur à réparer, des victimes à soutenir, des injustices à effacer. En mairie

elle ne venait jamais seule, mais avec celle ou celui qui avait besoin d’aide. Sous le bras, elle avait toujours un dossier. Elle défendait toujours une cause. Et quand la cause avait triomphé, elle en trouvait toujours une nouvelle à défendre. Pas de potion magique, pas de don d’ubiquité, simplement la main sur le cœur et la détestation des inégalités, de l’humiliation ou de la misère. Elle avait fait le choix de ne pas se plaindre, y compris dans les derniers instants, mais de se battre. Et d’agir. Notre société redécouvre actuellement avec Stéphane Hessel l’indignation. Mais Jean-Claude, son mari, me le rappelait : « Elle disait toujours que si quelque chose la choquait, elle n’attendait pas pour la dénoncer que les personnes responsables de la situation aient le dos tourné ». De l’Italie qu’elle aimait tant, qui était chaque été son jardin secret, où elle se ressourçait entre amis et en famille, elle n’avait pas conservé seulement le goût de Frédéric François. Elle en avait aussi le tempérament, incontestablement volcanique et, ne le cachons pas, parfois, souvent, colérique. L’orage tonnait, mais son sourire, comme un soleil, ne tardait pas à revenir.

Micheline était une militante. Pas une militante d’appareil, bien qu’elle ne détestait pas les partis, rejoignant successivement les rangs du Parti communiste puis du Parti socialiste. Mais une militante, avant tout, des valeurs, du concret, du quotidien. Une militante dans sa rue, dans son quartier, dans sa ville. Boîtage, tractage, réunions où elle entrainait d’autres, elle était toujours volontaire et, par sa force de conviction, multipliait les adhésions. Derrière l’indignation, cependant, Micheline Fromentin veillait toujours à définir des solutions. « Elle aurait dû être assistante sociale, confiait volontiers son fils Hervé, ajoutant aussitôt que cela aurait peut-être coûté cher à l’Etat, mais celui-ci aurait pu être certain que l’argent dépensé par sa mère était juste et utile ». Il est vrai qu’elle était née à une époque dure, en 1944, dans une ville ouvrière, Saint-Étienne-du-Rouvray. Cela a contribué, sans nul doute, à forger son sens de la solidarité.

Ce que je sais en tout cas, c’est que Micheline Fromentin, pour les autres, se donnait sans compter. Elle se donnait pour sa famille, dont elle a dû en partie s’occuper très jeune, tout comme sa grand-mère l’avait elle-même élevée. Elle se donnait pour les patients, que son métier d’infirmière lui donnait à soigner. Elle aidait ceux qui étaient perdus dans la dépendance au centre au centre hospitalier de Petit Quevilly. Elle se donnait pour les enfants, au collègue Alphonse Allais notamment. Elle avait, avec vigueur, donné son sentiment sur ce que devait être l’épicerie sociale. Et puis, elle consacrait beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps, à aider les détenus du Centre des Vignettes, dont elle préparait la réinsertion. Certains d’entre eux sont devenus des proches : elle ne les a jamais oubliés, ils ne l’ont jamais oubliée.

Son cœur qui battait pour les autres, battait pour sa famille, son époux, ses fils, Hervé, Jean-Claude, Olivier, ses petits-enfants, dont elle avait d’ailleurs fait le choix de se rapprocher en venant à Val-de-Reuil. Pour nous, au Conseil municipal, la voir arriver dans la ville avait été une chance tant elle consacrait de temps et d’énergie à notre ville. Je dirai même, sachant que Micheline était une femme croyante, très attachée au pèlerinage de Lourdes, qu’elle fut pour Val-de-Reuil, comme un personnage miraculeux. Elle ne comptait pas effectivement parmi les premières habitantes de la ville, mais mieux, elle formait à elle seule comme une escouade de pionniers. Aucun chantier ne l’effrayait. Aucune construction n’était impossible. Aucun obstacle ne l’arrêtait. Son franc-parler et sa ténacité lui permettaient de ne jamais reculer.

Lui rendre un hommage ce jour de fête nationale est légitime. Pas seulement par tradition républicaine. Pas seulement par geste d’amitié. Mais parce qu’elle était une femme très attachée à la liberté, à l’égalité, à la fraternité. Patriote et solidaire, elle était une femme de liberté, agissant pour l’égalité, au moyen de la fraternité.

Il n’y pas certes pas de Panthéon rolivalois. Ce monument Mémoire et Paix est dédié à l’histoire qui continue de se bâtir, à l’avenir, au lendemain. Mais ici, pour nous, Micheline Fromentin est évidemment vivante. Nous voyons sa silhouette élégante, apprêtée, imperméable, foulard, boucles d’oreilles, coiffée avec attention, les yeux malicieux derrière ses lunettes, comme sur le portrait posé devant nous. Et ici, en ce 14 juillet, rassemblés, les Rolivalois, par la voix de leur Maire, voix qui n’est pas la mienne mais celle de toute une ville, expriment le fond de leur pensée, et disent, à l’unisson, du fond de leur cœur, combien, à Micheline Fromentin, leur amie, leur élue, leur collègue, ils sont tous reconnaissants. Nous lui sommes tous reconnaissants et je vous propose d’observer à sa mémoire une minute de silence.

© 2011 Marc-Antoine Jamet , Tous droits réservés / Wordpress