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24 NOV 2016

Depuis la Polynésie et Tahiti, j’ouvrais ce mardi le 5ème Congrès « Cosmetopée » et les Premières rencontres internationales cosmétiques du Pacifique

Discours de M. Marc-Antoine JAMET,

 Président du Pôle de Compétitivité Cosmetic Valley

Ouverture du 5ème Congres « Cosmetopée »

et des Premières Rencontres Internationales Cosmétiques du Pacifique

Papeete/Polynésie Française – Mardi 22 novembre 2016

 

 

Monsieur le Président du Pays, cher Edouard Fritch,

Monsieur le Ministre de la Santé du Gouvernement de Polynésie,

Monsieur le Président de l’Université qui nous avez reçus avec tant d’amabilité,

Mesdames et Messieurs, chers collègues,

 

Probablement sans s’en apercevoir, ce Congrès vient de compter un premier acquis. Il est généralement difficile lorsque la Cosmetic Valley se réunit de départager Orléans, Chartres et Tours qui toutes veulent l’accueillir et déploient aussitôt leurs charmes – nombreux – pour attirer nos congrès, colloques et séminaires. L’extension de notre pôle de compétitivité à la Normandie et à l’Ile-de-France, son bassin de vie, de recherche, d’investissement et d’emploi n’a rien arrangé, chacune des ces régions, comme le Centre/Val-de-Loire, disposant de quelques atouts, de quelques arguments pour nous attirer. Je n’ose imaginer comment cornélien sera notre choix lorsque le pôle PASS, qui peut s’appuyer sur ces joyaux que sont Nice et Marseille, Avignon, Cannes ou Saint-Tropez, entre autres, nous aura rejoints.

Grâce à tous nos partenaires de Tahiti, nous venons donc de résoudre la question de la façon la plus élégante qui soit et je propose qu’à l’instar du siège tahitien de ce 5ème congrès « Cosmétopée », par ailleurs Premières Rencontres Cosmétiques Internationales du Pacifique, tous nos travaux n’aient plus désormais pour cadre itinérant que les archipels des Tuamotu, des Gambier, des Australes ou des Marquises.

Cet espoir, qu’avaient déjà caressé Brel ou Gauguin et que nous ne concrétiserons peut-être pas, a un fondement évident : celui de l’amitié. Nous avons été ici magnifiquement accueillis. Je voudrais en remercier très vivement, très chaleureusement, le Gouvernement de Polynésie Française et vous-même, Monsieur le Président, qui nous faites l’honneur d’introduire nos travaux. Je voudrais dire également ma reconnaissance à l’université de ce territoire et à son président, archéologue des civilisations polynésiennes qui nous en a décrit la naissance et les beautés, avec pédagogie, dans son merveilleux bureau qui, au-delà d’un Faré que ses pairs de métropole moins bien lotis doivent lui envier, domine la mer et, au loin, la merveilleuse île de Mooréa. J’aurai garde d’oublier de dire ma gratitude à nos partenaires et, au premier rang d’entre eux, le cluster Tahiti Fa’ohtu.

Il est des destinations, dont on dit monts et merveilles pour finalement être déçu quand on les découvre. La Polynésie n’a rien à craindre. Outre le caractère exceptionnel de ses paysages, ainsi que me l’affirmait avec force mon ami le Haut-Commissaire de la France René Bidal, elle a pour elle l’intelligence, la beauté, la jeunesse de son peuple. Son dynamisme et sa gentillesse ne peuvent que susciter l’admiration. Il est des colliers de fleurs réels que l’on reçoit quand, après 23 heures de vol, l’avion de Paris se pose sur l’aéroport de Fa’a, mais il en est aussi de virtuels, de scientifiques, d’intellectuels dont le parfum est largement aussi enivrant. Nous les avons respirés, depuis notre arrivée, avec les professeurs Phila Raharivelomanana et Chantal Pichon. Je voulais les citer pour leur rendre hommage.

Mais revenons à notre Congrès. Parce qu’il paraissait s’occuper de vieilles recettes, je n’ose dire de recettes de « bonnes femmes », il a pu d’abord faire sourire. Mais chacun a pu constater que s’il était aux antipodes géographiques, il se tenait également aux antipodes de la banalité, de la médiocrité, de l’anecdotique. Il est au contraire crédible, nécessaire et légitime.

Je constate, en effet, qu’il est d’abord universel puisque ses origines, ses causes et ses conséquences se trouvent aussi bien au Togo ou au Japon, qu’en Colombie ou au Niger, en Chine ou au Québec, en Corée et en Corse, au Japon et dans le Pacifique. Sur chacun de ces points du globe et sur beaucoup d’autres, à partir, d’ingrédients naturels, on a su protéger, préserver, développer un capital santé et un capital bien-être sans besoin de molécules artificielles.

Je constate, ensuite, qu’il est mobilisateur puisque vous êtes originaires de tous les continents, d’Asie, d’Europe, d’Afrique, d’Océanie, d’Amérique. Je salue notamment ma collègue canadienne qui, après avoir récemment incorporé sa société à l’écosystème Sephora, fleuron de LVMH, est venue de Toronto. Vous avez fait des milliers de kilomètres pour représenter tous les segments de la recherche qu’elle soit publique ou privée, académique ou industrielle, fondamentale ou appliquée. C’est un succès dont notre pôle est fier. Il est bien de se faire fédérateur de ce qui, ailleurs, est si souvent opposé, fragmenté, divisé ! Pour un peu, nous pourrions pousser un Haka de triomphe, comme l’ont fait ces jeunes marquisiens en ouverture de nos discussions, mais je crains que notre musculature soit moins épanouie et nos tatouages moins originaux que ceux de ces guerriers.

Je constate enfin qu’il rejoint, par ses thèmes d’intervention, toutes les préoccupations de notre filière : innovation des produits, protection des consommateurs, valorisation de la recherche, respect de l’environnement. Plus que la taille de notre marché ou le volume de notre production, ce sont ces points d’excellence qui permettent au Made in France de faire la course en tête, d’être leader mondial et à la cosmétique française d’être productrice de croissance, d’emploi, d’excédent commercial.

Prenons un peu de hauteur, prenons un peu de champ. La France du Pacifique y invite naturellement. La cosmétopée se résume d’une formule. Elle est le bel avenir du passé. Elle est le futur de la tradition. Elle est un trait d’union qui, à la fois, nous fait payer un tribut mérité au savoir de nos ancêtres qui ont trouvé ces herbes patrimoniales, défini leurs bienfaits, imaginé leur assemblage et satisfaire un client, une consommatrice, moderne, actuelle qui exige, désormais, pour ses produits de beauté de l’authenticité, qui revendique de bénéficier d’un traitement individuel, qui veut allier à un achat cosmétique une expérience humaine, la connaissance d’une civilisation, l’initiation à une culture du bien-être. De ce point de vue, ce que nous apporte le Pacifique, ses rites et ses pratiques, est si vaste, si riche, si pertinent. Alors que chacun sait maintenant, grâce aux travaux des historiens, ce que devaient être la puanteur et le manque d’hygiène dont souffrait la Cour du Roi Louis XIV, nul n’ignore que, ici, se laver, entretenir sa peau et ses cheveux, avoir des dents blanches et une haleine fraiche, étaient les éléments normaux d’une routine quotidienne.

Mais, au-delà de leur utilité pour le consommateur, il est dans notre démarche autour des plantes ancestrales, une sincérité qui me plaît. Hier, un très jeune chercheur, rougissant, débutant et timide, notre directeur général, Jean-Luc Ansel, obtenait, devant son épouse que je salue, un doctorat mi-chimique, mi-botanique, sur « Les usages de la cosmétopée à travers les ligneux de Polynésie ». Au-delà des félicitations que le Jury lui a accordées pour son immense travail et, comme en toute chose dont il se saisit, sa passion communicative, en les assortissant de la mention très honorable, il a posé une pierre fondatrice qui dépasse le périmètre de la cosmétique. Il a construit, lui l’ingénieur, les premières marches d’un immense escalier. Il a donné un socle théorique et universitaire à un concept infini et généreux.

La cosmétopée, ce n’est pas un élément supplémentaire de la marchandisation du monde. Il ne s’agit pas d’extraire pour l’épuiser ce qui fait la richesse d’une île d’une contrée, d’un pays. Elle veut au contraire participer à la défense de la biodiversité, s’inscrire dans un développement local, durable, soutenable, fidèle au protocole de Nagoya. Elle est préservation et transmission des savoirs et des connaissances d’une génération à l’autre, passation que la simple oralité ne pouvait plus garantir. C’est une force d’invention et de réflexion, un minéral enfoui, un gisement inconnu qu’il ne s’agit pas d’appauvrir, mais de développer avec les populations qui en sont les détentrices légitimes. Par chance, ici, dans ce monde de volcans et de lagons, dans ces îles encore inaccessibles, la nature ressemble encore à ce qu’elle fût au premier matin du monde. C’est un patrimoine de l’humanité. Il est sacré.

Avec cette feuille de route, la cosmétopée ne peut plus rester le parent pauvre de la pharmacopée, tout comme la cosmétique a gagné ses lettres de noblesse par rapport à la pharmacie. Qu’on se rende compte de ses possibilités encore non recensées. Sur un simple échantillon de 28 personnes aux Iles Marquises, les plus éloignées des continents, une enquête d’ethno-botanique a permis de dresser une première liste de plus de 500 recettes couvrant aussi bien la protection de la peau, l’hygiène intime, le soin du cheveu, la fraicheur de l’haleine, le parfum, voire la cicatrisation par le Tamanu.

Cet inventaire, que Cook et Bougainville avaient déjà commencé, est indispensable. Il nous fait constituer ce grand herbier mondial. Nommer c’est connaître. Connaitre c’est respecter. Demain ne sera pas que digital, demain sera fondamental. Je ne veux pas m’éloigner de notre grand sujet et le politiser de manière inopportune, mais il y a, face aux populismes et aux obscurantismes qui agitent le monde, un besoin de repères et de valeurs. C’est peut-être un des effets inattendus de nos travaux que de participer à remettre notre société dans le sens de la marche, dans le sens du progrès. Savoir où l’on va parce que l’on sait d’où l’on vient, ce pourrait être l’intitulé de ce congrès. Vous avez des outils à imaginer, des étapes à fixer, des coopérations à établir, des résultats concrets à obtenir. Nous pouvons créer demain une Cosmetic Island, non pas filiale, mais petite sœur de la Cosmetic Valley. Nous avons de la belle ouvrage à abattre. Nous y parviendrons grâce à ces trois jours de débats et d’échanges. Bons travaux.

 

 

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