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2 AVR 2013

Dernier hommage à Bernadette Roux, première secrétaire fédérale

Bernadette Roux nous a définitivement quittés. Depuis douze années, elle vivait dans l’Est de la France. Elle s’était retirée à Reims. Affaiblie, elle était restée assidue à ses cours d’histoire de l’art, sa dernière passion, son dernier engagement. Après s’être tant occupée des autres, dans ce temps donné à la culture, elle marquait encore son ouverture d’esprit et son attention pour la condition humaine.

A la veille de ce week-end de Pâques, la nouvelle de sa disparition s’est propagée dans notre département comme si le glas sonnait de section en section. Dans sa commune qui l’a tant aimée, chacun se rappelait un mot, un geste, une aide, une action. A la fédération, ceux qui l’avaient connue et suivie,  disaient comment elle avait animé la vie militante des socialistes de l’Eure. Dans les collectivités où elle avait siégé, comme à la Région, les souvenirs, des instants, des paroles, des décisions et des combats sont revenus, forts et intacts.

Sa taille, pour une femme peu commune voici quelques années, impressionnait. Elle était un personnage destiné à la hauteur : pas à l’arrogance, mais au discernement des luttes et des causes. Son mètre quatre-vingts était fait d’engagements, de sensibilité, d’entêtement. Elle plaçait toujours le collectif au-dessus de tout, même à son détriment et jusqu’à accepter de céder la place, au service de ses fidélités. Discrète sur sa vie personnelle, l’enfance rigoureuse, dans l’ombre de la caserne où vivait son père gendarme, a aussi forgé sa personnalité, non pas révoltée, mais émancipée, politiquement pour aboutir au choix de la Gauche et du mouvement dans une famille de tradition plus conservatrice. Sans illusion excessive, sans naïveté, mais par nécessité et sincérité, elle était libre, déterminée, porteuse d’espoir.

La Haute-Normandie, l’Eure, c’était pour elle d’abord l’Institut médico-éducatif de Beaumesnil, qu’elle dirigeait dans  la ferveur d’une profession choisie. Il se trouve que seuls cent mètres séparaient son travail de la mairie. En 1989, année propice à la chute des bastilles, dans un monde rude, masculin, rural, intransigeant, elle affiche la couleur, parvient à s’imposer, gagne la mairie et sera, deux mandats durant, sollicitée et réélue. Sa force impressionnait. Ses évidences déstabilisaient. Elle avait des règles simples et incontournables, reversant ses indemnités d’élus à des administrés en difficulté ou au budget municipal, selon les besoins, pour acheter, par exemple, des décorations de Noël ou éclairer les rues. Claudine Lehéricy, sa camarade de campagne lorsque rien n’était encore gagné, la voit ainsi : servant sans se servir.

En 1989, dans le sillage vainqueur d’Alfred Recours alors député, elle devient pour quatre ans Première secrétaire de la fédération de l’Eure du Parti socialiste, sans doute la première femme à occuper ces fonctions. Avec courage, elle avait relevé le gant, en 1992 aux régionales, en 1993 aux législatives, assurément deux années noires pour les socialistes. Son abnégation nous faisait penser à celle d’un grand socialiste normand qui quitta la vie un 1er mai au bord d’un canal.

Réaliste mais sans concession, ses colères, ses indignations, étaient profondes, mais justes. Parce qu’elle était une démocrate et une républicaine, elle désignait l’intolérable, elle nommait l’insupportable, incarné par le Front national, préférant quitter l’hémicycle régional que d’entendre à chaque séance, à chaque prise de parole, la haine et l’exclusion. C’était trop pour elle, trop lourd à écouter, trop lourd à imaginer.

Logiquement, lorsqu’elle donnait sa confiance, celle-ci était durable et absolue. Elle était fabiusienne, se « défonçant » sans relâche pour son champion comme en a témoigné avec émotion, avec tendresse, Michel Ranger. Que nous informions de son décès celui qu’elle appelait, dans un mélange de respect et d’amitié, Laurent, comme pour offrir à leur amie un ultime lien avec celui qui avait tenu à la décorer de la Légion d’Honneur, chez elle, dans sa mairie de Beaumesnil, est la seule demande formulée par ses proches.

Il n’y aura, parce qu’elle le souhaitait, ni fleur, ni couronne, mardi à Reims. Mais il y aura, pour elle et pour sa famille, vingt ans après qu’elle a nous a transmis les rênes de notre fédération, les pensées tristes et émues de tous les socialistes eurois. A Bernadette Roux, ils seront toujours reconnaissants de les avoir, par sa force et par sa foi en les valeurs de l’homme, menés sur les chemins de la Gauche.

© 2011 Marc-Antoine Jamet , Tous droits réservés / Wordpress