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29 NOV 2017

Loyauté, intégrité, crédibilité, telle est la devise de Colette Salamone à qui j’ai eu l’honneur de remettre les insignes de chevalier dans l’ordre national du mérite pour son action exemplaire en faveur de l’emploi à Val-de-Reuil et sur l’ensemble du territoire de l’Agglomération Seine-Eure

Discours de Marc-Antoine JAMET
 Remise de l’Ordre National du Mérite à Madame Colette Salamone
Ferme de la Salle – Val-de-Reuil
Vendredi 24 novembre 2017 – 18h00

Chers amis,

Nul ne s’étonnera que nous soyons réunis, ce soir, dans cette solide ferme de la Salle, longtemps refuge des Tréteaux de France, car on dit que, par les soirs de vent puissant, les grandes voix de l’éloquence dramatique s’y feraient encore entendre. Je vous préviens, Colette Salamone, il va vous falloir accepter que votre modestie naturelle supporte les mots de la reconnaissance et de l’hommage qui vous sont dus.

Nul ne s’interrogera sur votre présence à Val-de-Reuil, symbole du mariage entre tradition et modernité, entre passé et avenir, car cette union qui caractérise la plus jeune commune de France est la justification parfaite, Colette Salamone, de l’infidélité ponctuelle que vous faites à Grand Quevilly où vous vivez dans une rue qui porte – il n’y a pas de hasard – le nom du fondateur du New Deal qui fit oublier le jeudi noir et la crise de 1929 à l’Amérique. Aimable présage….

Nul ne sera surpris puisque nous nous trouvons autour de vous, Colette Salamone, figure qui rassure, figure qui rassemble, figure qui ravit pour ce rendez-vous implicite que vous nous avez donné en mai dernier quand, avec la complicité du délégué du Préfet dans la Ville Nouvelle, Jean-Salem Sakkriou, vous avez rejoint la promotion de l’Ordre National du Mérite.

Nul ne s’inquiètera de notre humeur, de votre état d’esprit, Colette Salamone, car cette cérémonie est celle de l’emploi durable et du service public, celle de l’amitié personnelle et du bien public, celle du mérite éclatant et de la République Une et indivisible, sociale et laïque. Nous y avons tous notre place au titre des liens d’estime que nous entretenons avec vous, mais aussi de la citoyenneté qui fait de nous des « enfants de la Patrie » sans discrimination de sexe, de race, d’origine et d’opinion.

Cet instant sacré où vous allez être épinglée n’a qu’un seul but en effet : fêter une femme que nous estimons et dont le nom évoque tout à la fois un poisson intelligent au point de savoir remonter les courants pour retrouver la source où il est né et ce roi biblique passé maître dans l’art du jugement. On a connu parrains plus embarrassants !

Nous pourrions dresser votre portrait très personnel, révéler que vous êtes, derrière une façade on ne peut plus respectable une épicurienne, passionnée par l’art et la culture, que vous avez fait du théâtre pendant plusieurs années et présidez toujours, aujourd’hui, me dit-on, aux destinées d’une association dont c’est précisément l’objet, que vous fréquentez avec une certaine assiduité les réseaux sociaux, armée d’un vrai courage dans vos « likes » comme dans vous « retweets ». Est-ce vraiment l’occasion de savoir que vous vous adonnez à d’ésotériques passe-temps comme la musculation-fitness ou la dégustation de Beaujolais à laquelle vous avez sacrifié récemment. Qu’on ne prétende pas le contraire, j’ai la preuve à travers quelques images de ces libations bacchanales.

Mais, respirez Colette, la présence de Jean-Pierre, votre conjoint, d’Agathe et d’Alice, vos deux filles, me ramène à la sagesse et à en rester au volet avouable de vos activités.

Nous allons mettre en exergue votre travail au service du travail des autres.

Nous allons évoquer la cohérence de votre parcours dans les rangs d’un unique établissement parfois décrié (il m’est arrivé de le faire), toujours exposé (car la question qu’il traite, avant même celles du logement ou de l’école, est cardinale), parfois oublié (quand on élève des statues à des micro-organismes certes exemplaires, mais qui n’ont sorti du chômage qu’une poignée de bénéficiaires, tandis que Pôle Emploi gère le devenir de millions d’êtres humains). Je ne tairai d’ailleurs pas plus longtemps ce que d’aucun, le considérant comme le meilleur, aurait gardé pour la fin. Je vais spoiler : vous avez ramené ici 3474 chômeurs vers l’emploi, c’est à dire vers la vie.

Nous allons dire pourquoi il est parfaitement légitime que cette décoration vous soit octroyée.

Mais, pour décrire Colette Salamone, énergique et persévérante, créative et coopérative, sans doute faudrait-il commencer par dire les valeurs qui sont les siennes. Ses collègues (notamment l’une d’entre elles, qui a grandi à Louviers et s’envole bientôt pour la Tunisie, Marlène Peyruttie) et ses chefs (vous me pardonnerez d’avoir consulté votre patron, – même à Pôle Emploi, il y a un patron – mon ami Jean Bassères), tous sont unanimes pour chanter vos louanges, ce qui pourrait presque paraître suspect. Fait-on de bons discours avec de bons sentiments ? Et bien oui. Notre soupçon serait infondé car Collette Salamone, c’est un de ses paradoxes personnels qu’elle tient secret, a juré de mettre fin au CDI d’une femme un peu âgée, un peu classique, un peu collet serré, mais toujours séduisante, Marianne, en remplaçant le fameux triptyque associé à la célèbre phrygienne dépoitraillée, « liberté, égalité, fraternité », par la devise qu’elle a construite sur ses propres vertus : loyauté, intégrité, crédibilité.

J’aurais pu y ajouter la solidarité, car les valeurs que j’ai citées ne sont pas, chez elle, incarnées par du creux ou par du vide. Elles s’articulent autour d’un défi fondamental : aider les faibles, rassurer ceux qui doutent, accompagner les transitions professionnelles de ceux qui en ont le plus besoin. On me dit qu’enfant votre père avait décelé en vous les qualités d’une future avocate. Je crois, chère Colette Salamone, que ses vœux se sont exaucés car, en étant une militante de l’emploi, vous plaidez chaque jour pour plus de justice sociale dans notre pays.

Cette course d’obstacles, elle l’a expérimentée par elle-même. En 33 ans, date peu croyable à voir votre jeunesse souriante, depuis ce jour de 1984, un 1er décembre (nous en sommes proches), où elle a été embauchée au sein de ce qu’on appelait alors l’Agence Nationale Pour l’Emploi comme agent administratif au CRA de Haute Normandie, Colette Salamone aura progressé en passant par toutes les fonctions de terrain et de proximité. Vous aimez le réel. Vous aimez le concret. Vous avez été servie. Vous serez ainsi conseillère, à partir de 1989, dans plusieurs agences de Normandie, Maromme notamment, puis animatrice d’équipe à Elbeuf, avant de rejoindre Rouen/Saint-Sever à partir de 2002. Le 1er janvier 2004, dans le charmant jargon qu’aime à utiliser l’administration, vous devenez cadre opérationnel et le 1er mars 2005, vous êtes mutée à Val-de-Reuil/Louviers comme Directrice d’Agence titre plus compréhensible par le commun des mortels, pardon des usagers ou, comme on dit maintenant, des clients. Vous allez rester douze ans dans la circonscription de Pierre Mendès France. 1984, année où, revenant du service militaire, je m’inscris à l’ANPE. 2017, année où je prononce votre éloge alors que Emmanuel Macron promulgue les ordonnances réformant la loi Travail. Une boucle est bouclée entre vous et moi.

Mais reprenons la route de Louviers. C’est une tâche importante qui vous y attend. L’agence compte environ 60 personnes, dont 4 managers et 1 RRA. Ce ne sont pas de petits effectifs. Il va falloir, qui plus est, à la fois les déménager, ce qui n’est jamais une mince affaire, dans les locaux joyeusement staliniens de la CASE et les fusionner en rapprochant la vieille ANPE des respectables ASSEDIC pour créer le pimpant et chatoyant Pôle Emploi. Cible atteinte car, quand on regarde leur propre parcours, on s’aperçoit que vos collaborateurs ont souvent été promus ou ont progressés, parfois jusqu’à devenir responsables d’agence. Mais ces tâches de gestion, aussi importantes soient-elles, ne sont rien à côté des challenges qui vous ont mobilisés.

Il va vous falloir, dès votre nomination, prendre à bras le corps un territoire certes industriel et producteur de richesses, le plus dynamique du département de l’Eure, mais aussi une population fragile, immigrée, qui a connu de redoutables catastrophes entrepreneuriales, citons rapidement et pudiquement De Carbon ou Cinram, une population qui souffre du fracassage social qu’entraine la différence entre son niveau de formation et les niveaux de qualifications exigés des usines, des laboratoires, des data centers qui les entourent. C’est d’ailleurs en peu de mots le résumé de la tragédie que vit Val-de-Reuil, commune au Maire de laquelle vous avez fait l’honneur de demander de prononcer ce discours ce qui n’était sans doute pas sans une intention cachée. Un jour, un demandeur d’emploi entrera dans vos bureaux, bidon d’essence à la main, et menacera de s’immoler ! Terrible épreuve pour lui évidemment, pour vous également. Sa détresse est à certains égards devenue la vôtre. Pourtant vous ne renoncez pas.

Vous allez, Sisyphe au féminin, vous atteler à cette tâche exaltante et épuisante en ayant toujours au cœur une éthique : respecter des hommes et des femmes dans l’ennui, dans la peine, dans l’angoisse en leur prodiguant des solutions pleines d’humanité et de bienveillance. Vous avez fixé comme horizon à votre équipe de ne pas renoncer à un accompagnement de « qualité », de veiller à être moderne en étant digitaux et numérique, de ne pas être indifférents à l’agonie des vieilles manufactures sans négliger la Nation de Start-ups que le Président de la République appelle de ses vœux.

Place Thorel, chaque jour suffira « à peine à sa peine ». Vous allez contribuer activement à la mise en œuvre de la convention nationale « Accompagnement Global », au Plan Apprentissage, à la mesure Action 89, mettre en place des initiatives locales spécifiques, en lien avec les deux cités ennemies et jumelles, la drapière et la contemporaine. Je veux m’attarder notamment sur l’action « Kit emploi » qui visait à un cofinancement d’actions permettant le retour à l’emploi durable ou à une formation qualifiante pour les demandeurs d’emploi de longue durée, qu’ils soient jeunes ou séniors. Je pourrais parler des Etats Généraux de l’Emploi que vous avez contribué à monter au Stade Jesse Owens et qui accueille tant de lycéens en quête d’une orientation, d’une vocation, d’une solution. Je me souviens du projet « matelot » monté avec le CNAM qui envoya bourlinguer avec un vrai métier des fils d’agriculteurs et d’ouvriers. Je ne veux pas non plus passer sous silence l’installation d’un site du célèbre sellier de la rue du Faubourg Saint-Honoré, Hermès, à Val-de-Reuil. Celui-ci va vous associer au recrutement de 300 personnes sur 3 ans en liaison avec les CCAS concernés et avec le soutien du Lycée Augustin Boismard de Brionne. C’est une preuve remarquable de votre compétence et de votre sérieux, car pour bien connaître la marque aux emballages orange, elle ne se confie que difficilement y compris aux les gens les plus recommandables de la terre. Votre manière d’innover, de piloter le changement, de faire face à la complexité, c’est de faire appel au bon sens. Par exemple en vous efforçant de placer les demandeurs d’emploi du territoire si possible dans les entreprises de ce même territoire.

Vos supérieurs ne sont pas insensibles à votre efficacité. Vous allez piloter des actions sur la Vallée de l’Andelle, devenir référente « fret fluvial et tourisme », puis responsable de la filière biologie, chimie, santé, ce qui vous permettra, honneur insigne, de rencontrer le président de la Cosmetic Valley.

J’ai dit que l’humain était au cœur de vos préoccupations et insisté sur votre souhait de construire une offre adaptée, une offre sur mesure, pour chaque demandeur d’emploi sans oublier les impératifs de l’entreprise. Adepte des solutions Win/Win, vous avez su, dans un sens, écouter les problématiques et comprendre les enjeux du territoire, de l’autre expliquer les priorités de Pôle Emploi, mais parfois aussi ses limites. Ainsi, on me dit que vous avez su dire non à des demandes qui n’étaient pas dans les objectifs et la feuille de route qui vous avait été confiés.

Depuis mars 2017, vous voguez vers d’autres horizons. Colette Salamone, vous êtes est en mission de mobilité à la direction générale en tant que cheffe du projet national « Favoriser la collaboration au sein de l’agence », ce que d’aucuns appelleraient plus cursivement les synergies, dans le cadre du programme PERSE, ce que tous ceux qui connaissent la novlangue de la bureaucratie traduiront bien sûrr en « personnalisation de la relation de service », lequel s’insère si on aime les poupées russes dans la mise en œuvre du plan stratégique Pôle emploi 2020.

Le choix de ce projet, transverse par nature et dirigé vers le soutien aux agences, correspond bien à votre manière de travailler en équipe, en transparence, et à l’attention que vous portez aux relations entre acteurs d’un travail qui ne disparaîtra pas. Votre objectif est limpide : améliorer la satisfaction des demandeurs d’emploi et des entreprises tout en améliorant l’image de Pôle emploi au travers d’actions à forte valeur ajoutée.

Le choix d’aller sur un projet national après 12 ans passés comme directrice d’agence sur un territoire démontre aussi votre volonté de ne pas vous endormir, de ne pas ronronner, de relever des nouveaux challenges et de continuer, à un moment de la vie où certains décrochent, à vous investir, à vous renouveler, à vous relancer. J’avais d’ailleurs une proposition à vous faire. Quand je lis que vous savez identifier les points de conflit, les désaccords et les non-dits pour les résoudre, que vous anticipez les conflits et supervisez le changement, que vous faites face à l’imprévu et à la complexité, que vous partagez votre réussite et favorisez les climats de confiance, je me dis que vous devriez être Maire de Val-de-Reuil à ma place et vous auto-remettre ce ruban bleu créé par le Général de Gaulle…

Cette mission se termine en juillet 2018. Libre à la direction de pôle Emploi de la faire se conclure par la réalisation d’un rêve caché. Vous espérez, en effet, pouvoir revoir votre Normandie et revenir sur un poste dans le bassin d’emploi de Rouen ou sur le département de l’Eure. Il est certain pour ce dernier que lorsqu’on ferme un collège on crée des besoins en formation. Vous ne risquez pas de manquer de boulot. Pour l’instant, vous préparez votre projet de fin de mission et continuez de marrainer, pour occuper vos loisirs, un jeune chercheur d’emploi issu des Quartiers de la Politique de la Ville.

Il faut une chute à ce panégyrique : elle arrive.

Colette Salamone, vous êtes capable de la plus grande transparence et d’une ouverture réelle pour agir en complémentarité et en sincérité avec tous les acteurs de l’emploi dans un but commun : mettre fin au chômage de masse qui nous fait souffrir depuis trop longtemps.

Colette Salamone, au travers des actions menées sur notre territoire vous avez renforcé l’image de Pôle emploi et accru la plus-value de ce grand service public indispensable et de son expertise dans l’accompagnement des transitions professionnelles.

Colette Salamone, vous avez su prendre des risques quand il le fallait, faire confiance, accepter « le droit à l’erreur » pour que chacun puisse mieux rebondir dans notre société en crise depuis quarante ans.

Pour notre société qui juge ses citoyens au travail qu’ils effectuent, je vous assure Colette Salamone que vous avez bien mérité l’honneur de la patrie.

C’est pourquoi, au nom du Président de la République et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, Colette Salamone, nous vous faisons chevalier dans l’Ordre National du Mérite.

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