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20 DEC 2011

A défaut de construire des écoles, M. Ciotti veut ouvrir une nouvelle prison à Val-de-Reuil

Jeudi 15 décembre la proposition de loi Ciotti prévoyant que trois EPIDE (établissement public de la deuxième chance)  en France, dont celui de Val-de-Reuil, puissent accueillir des mineurs délinquants, dès l’âge de 16 ans, a été adoptée définitivement par l’Assemblée nationale qui, jusqu’en juin prochain, a encore le dernier mot malgré la ferme opposition du Sénat de Gauche. Cette nouvelle appelle plusieurs remarques dont je ne veux pas faire, par regret, par tristesse, par colère, l’économie. C’est sans doute sur le silence qui prévaut pendant la trêve des confiseurs que comptaient les auteurs de ce texte aberrant.

1) Les dangers que, avec d’autres, nous dénoncions, il y a quelques semaines, au moment du dépôt de cette proposition de loi, sont désormais très réels. Dangers pour l’EPIDE dont la réussite indiscutable auprès des jeunes en difficulté sera mise à mal par un changement d’objet et de nature. D’un centre de la deuxième chance d’où plus de 50% des pensionnaires sortaient avec une formation ou un emploi, on va passer à une mini prison. D’une  démarche de volontariat des jeunes qui est à l’origine du succès de l’opération, on va passer à une incarcération. La sortie de l’établissement, qu’aucun incident n’a accompagnée depuis son ouverture, va être bien différente entre transferts judiciaires et fourgons pénitentiaires. Pour Val-de-Reuil aussi, c’est une stigmatisation supplémentaire, alors qu’il lui faut déjà gérer les conséquences en termes d’image, de la présence sur son territoire, depuis 1989, du plus grand centre de détention d’Europe.

2) La Ville et l’EPIDE, aussi attachés et confiants l’un et l’autre à l’idée de deuxième chance, sont victimes des ambitions personnelles d’un député qui, à coups de flashbuzz, se rêve Place Bauveau. Confondant populaire et populisme, pour lui sans aucun doute, un portefeuille vaut bien Val-de-Reuil. Mais pour Val-de-Reuil son espoir de maroquin ne vaut rien.

3) Que l’Assemblée nationale ait adopté cette mesure est une confirmation du fait que le Palais Bourbon est le dernier bastion, le dernier outil, de parlementaires qui durcissent le ton pour séduire les électeurs du Front National. En la matière, qui sème le vent récolte la tempête. Cette tentative ultime, désespérée et médiatique d’afficher une loi ne trompe personne. Depuis 2002 certains chiffres sont têtus. Les violences faites aux personnes ont augmenté de plus de 21% et plutôt que de construire des murs aux portes de nos cités il serait temps de remettre des uniformes en leur centre. Mais à l’heure où on ne remplace plus les fonctionnaires…

Le plus grave c’est que M. Ciotti et ses amis ne croient plus en la République. Ils ne croient plus en son socle, l’école, qu’ils détricotent année après année, budget après budget, rentrée après rentrée. Et ils ne croient plus à l’idée d’accorder une deuxième chance, y compris à la jeunesse. Eric Ciotti ne lui laisse plus le choix : la résignation ou la prison. Ce n’est pas de cette France-là dont les jeunes, ceux qui réussissent comme ceux qui sont en difficulté, ont besoin. Où est la confiance ? Où est l’assistance ? Où est la patience ? Cette loi ne peut pas être appliquée. Il y a, jusqu’à la publication des décrets, un espoir. Ils peuvent ne pas l’être d’ici à la prochaine élection présidentielle. C’est ce à quoi il faut s’efforcer aujourd’hui. Cela appelle dès à présent la protestation, la contestation, la mobilisation de chacun.

© 2011 Marc-Antoine Jamet , Tous droits réservés / Wordpress