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2 MAR 2020

Reports du Forum de l’Emploi et de la « Rolivaloise »

 

 

Reports du Forum de l’Emploi et de la « Rolivaloise »

Les conseils de défense et des ministres réunis autour du Président de la République, samedi dernier, ont défini plusieurs mesures, dont l’interdiction ou le report d’événements réunissant des publics importants, afin d’éviter la propagation des foyers d’infections au coronavirus (CoVir 19) qui sont apparus depuis deux semaines dans notre pays.

En application de ces prescriptions, bien qu’aucun risque particulier n’ait été décelé à Val-de-Reuil ou dans ses environs, le Forum de l’Emploi qui devait avoir lieu Jeudi 12 mars 2020 au stade couvert Jesse Owens et la course féminine « La Rolivaloise » qui devait se dérouler en ville le dimanche 8 mars, sont reportés à une date ultérieure. Ces décisions, évoquées, dès samedi, avec le M. Préfet de l’Eure, ne sont pas la conséquence d’un danger constaté ou d’un risque avéré, mais la simple application d’un principe de précaution à des manifestations qui n’ont aucun caractère et calendrier obligatoires.

Le premier de ces deux événements réunissait plus de 5.000 exposants, représentants 300 entreprises, et participants, dont de nombreux enfants et adolescents, venus de nombreuses communes du département, dans un espace confiné. Le second accueillait près de trois mille coureuses, dont quelques-unes âgées, de santé précaire ou handicapées, leurs accompagnants, les organisateurs et les spectateurs, venus de toute la Normandie, parfois, de plus loin, dans l’espace resserré du départ de l’épreuve et du village arrivée devant la Mairie.

Ces deux manifestations, bien qu’attendues, connaissaient cependant un nombre croissant d’annulations ou de désistements. Elles seront reprogrammées.

D’autres événements organisées à Val-de-Reuil, comme le Carnaval, samedi 28 mars, qui réunit traditionnellement un grand nombre d’enfants en bas âge venus des centres de loisirs, leurs parents et encadrants, ou les Puces Motos, qui doivent rassembler, dimanche 5 avril, plus de 40.000 visiteurs venus de différentes régions de France, feront, en liaison avec la préfecture de notre département, l’objet d’un examen attentif en fonction de l’évolution de la situation sanitaire nationale.

Toutes les autres réunions et manifestations ayant lieu dans les espaces et équipements publics de la commune sont maintenues. Les services publics sont ouverts aux horaires et dans les conditions que chacun connaît. Aucune restriction n’a été établie à quelque activité que ce soit dans les entreprises, les administrations ou les associations locales. Je n’ai personnellement rien changé à mes habitudes ou à mon agenda. Il en va de même des élus municipaux, comme de leurs opposants, je l’imagine, qui poursuivent, normalement, sereinement, les actions (réunions, porte-à-portes, tractages) liés à la campagne en vue des élections municipales du 15 mars 2020.

Communiqué de Marc-Antoine JAMET 

Maire de Val-de-Reuil,

Président de la commission des finances de la Région Normandie 

 

7 FEV 2020

Fermeture du Laboratoire « Pharma » de Jansen-Cilag (Groupe Johnson & Johnson) à Val-de-Reuil : une décision brutale, désinvolte et absurde.

 

Fermeture du Laboratoire « Pharma » de Jansen-Cilag (Groupe Johnson & Johnson) à Val-de-Reuil :

une décision brutale, désinvolte et absurde.

La direction de l’entreprise Janssen vient de communiquer au comité social et économique de l’entreprise la décision de fermer le laboratoire de recherche pharmaceutique implanté sur son site de Val-de-Reuil.

C’est une décision brutale, désinvolte et absurde.

Brutale, parce qu’elle a été prise unilatéralement, secrètement, sans préavis, ni dialogue, sans recherche d’une solution négociée, en privilégiant à la fois une délocalisation/relocalisation en Belgique et un plan social aux conséquences sévères (puisque toutes les personnes concernées ne se verront pas proposer une évolution dans l’entreprise) et l’exil des salariés et de leurs familles à 600 km de la Normandie, à Beerse. Belge par naissance, européen par capillarité, Janssen reste bien, dans ces méthodes d’un autre âge, la filiale d’un groupe américain, Johnson & Johnson, qui suit une logique d’amélioration de ses résultats financiers et de protection des intérêts américains compréhensible pour ses actionnaires, mais indifférente aux conséquences sociales qu’elle entraîne en France. Il faut songer au choc qu’ont éprouvé les femmes et les hommes directement concernés, l’inquiétude, et l’incertitude qu’ils ressentent pour leur avenir personnel, celui de leurs enfants, mais aussi les doutes que fait germer une telle décision dans l’esprit des prestataires et fournisseurs du laboratoire de recherche également impactés par cette mauvaise décision.

Désinvolte, puisque Jansen-Cilag pratique la politique du coup de force et du fait accompli en ne prévenant les organisations syndicales qu’avec un minimum de préavis et en informant le Maire de la commune victime de cette décision que par un mail et un coup de téléphone 24 heures seulement avant qu’elle soit rendue publique.

Absurde enfin parce qu’à l’heure des réseaux numériques, des vidéo-conférences et du télétravail, prétexter la nécessité de rapprocher des salariés – physiquement – sur un unique campus relève de la supercherie. C’est faire peu de cas de l’intelligence et de la compétence des chercheurs rolivalois qui ont été à la l’origine de découvertes majeures. 20 nouveaux traitements ont été mis au point depuis une décennie, dont 3 progrès essentiels sur le VIH, les tuberculoses multi-résistantes, le cancer de la vessie. Des récompenses internationales prestigieuses sont venus saluer leur réussite, dont la désignation du « chercheur européen de l’année » il y a dix ans et le Prix Galien 2016.

Outre la question des emplois et des vies, concernées par ce transfert que rien ne laissait prévoir, c’est une conception de l’avenir industriel, et stratégique de la France dont il s’agit, dans un domaine, l’industrie pharmaceutique, où, les investissements en la matière étant les plus élevés de l’industrie, la recherche est hautement stratégique.

C’est pourquoi j’ai décidé 1) d’apporter mon soutien plein et entier aux salariés de l’entreprise, 2) de demander la solidarité des élus du département et de la région, ainsi que des membres du Gouvernement originaires de notre territoire 3) de saisir sans attendre le nouveau préfet de l’Eure M. Jérôme Filippini, 4) de demander l’intervention immédiate de M. Bruno Le Maire, Ministre de l’Economie et des Finances, si régulièrement attaché dans ses propos à l’indépendance industrielle et à la souveraineté économique de notre pays, de Mme Agnès Pannier-Runacher, Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances, en qui j’ai confiance, et de Mme Agnès Buzyn, Ministre des Solidarités et de la Santé, tous dépositaires de l’intérêt national et que je sais attentifs à ces questions, 5) d’exiger d’être reçu par la direction générale de l’entreprise pour examiner les compensations qui doivent se diriger vers le site de Val-de-Reuil.

Val-de-Reuil reste un des territoires les plus dynamiques de Normandie, le premier producteur de richesses, d’emplois et de brevets de l’Eure, une Ville où Jansen-Cilag compte encore près de 500 salariés et un centre de recherche mondialement performant en cosmétique sur un site dont le nombre des salariés progresse.

Cependant, même s’il ne concerne que 5% des effectifs, le plan de sauvegarde de l’emploi, évoqué par la direction du groupe Johnson & Johnson , loin d’apaiser mes craintes, me remplit d’inquiétude et renforce ma détermination à défendre les salariés concernés, comme je l’ai toujours fait, mais aussi à me battre pour que reste sur le sol français une structure intellectuelle et industrielle indispensable dans un secteur primordial pour notre pays et ses habitants : la santé.

 Communiqué de Marc-Antoine JAMET

Maire de Val-de-Reuil,

Président de la commission des finances de la Région Normandie

12 NOV 2019

Retrouvez ici le discours que j’ai prononcé hier matin, à 11 heures, au Monument Mémoire et Paix, à Val-de-Reuil, à l’occasion du 101ème anniversaire de l’Armistice de 1918

Discours de M. Marc-Antoine JAMET, Maire de Val-de-Reuil

Commémoration de l’Armistice du 11 novembre 1918

Monument Mémoire et Paix/Lundi 11 novembre 2019 à 11h00

 

 

Cher(e)s concitoyen(ne)s, on ne cite plus beaucoup Jean Jaurès de nos jours et, dans l’Eure particulièrement, on lui préfère désormais ce grand philosophe, l’égal de Montaigne et de La Boétie, si ce n’est celui de Socrate et Platon, peut-être même leur maître. J’ai nommé le Ministre Sébastien Lecornu.

Plutôt que sur l’œuvre en gésine de l’ancien et toujours maire de Vernon, je me risquerai pourtant à revenir sur une des phrases les plus connues du député de Carmaux. « Un peu d’internationalisme éloigne de la patrie, beaucoup d’internationalisme y ramène. Un peu de patriotisme éloigne de l’internationale ; beaucoup de patriotisme y ramène ». En d’autres termes, si vous voulez vraiment la Paix, l’avenir et l’Europe, ne craignez pas d’avoir un État, un pays, une Nation, une patrie, car c’est un cadre de référence dont vous aurez besoin. Symétriquement, si vous êtes vraiment patriote, sûr de vous, de votre culture, de votre langue, de votre devise et votre drapeau, peut-être même de votre manière de vous vêtir et de vous coiffer, ne craignez pas les « autres », les « nouvellement arrivés », les « étrangers ». Ne soyons d’ailleurs pas dupes : quand le Front National fait mine de parler de « migrants », il montre en fait nos compatriotes de la première, de la deuxième, de la troisième génération issue de l’immigration. Quelle grossière imposture ! Ce sont nos compatriotes. Ils ne partiront jamais. Ils ne retourneront jamais vers ces pays que leurs parents, leurs grands-parents, parfois à leur corps défendant, ont quitté. Car c’est ici chez eux. La France est leur maison. Des murs ont disparu il y a trente ans à l’époque de la transition idéologique. Il est inutile d’en bâtir de nouveaux alors qu’il faut affronter ensemble la transition écologique. Le choix n’est pas et ne sera jamais entre déferlante religieuse et narcissisme identitaire, entre communautarisme et populisme.

Ne vous méprenez pas. Ce que je dis ici n’est que du bon sens. Ce n’est pas une déclaration électorale. Ce n’est même pas une première réponse au tract idiot rédigé par un imbécile (à moins que ce ne soit le contraire…), par ce candidat sans scrupules qui a confondu nos boîtes aux lettres avec une poubelle ou une fosse d’aisance en y déposant récemment un questionnaire d’une rare bêtise doublé d’une parfaite méconnaissance de notre Ville. Ce sont, bien plus simplement, des félicitations et des remerciements sincères que j’adresse au conseil municipal, aux corps constitués (dans le même temps que j’adresse un message de bienvenue à Alexandra Capogna notre commissaire), aux habitants, aux enseignants, aux élèves du collège Michel de Montaigne qui nous liront tantôt des textes de Woodrow Wilson, de Georges Clemenceau, d’Aristide Briand, pour leur assiduité de plus en plus grande à ces cérémonies républicaines qui, autour de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, sont un utile repère dans la vie d’une petite Ville comme la nôtre et un temps fort, comme l’est la soirée des vœux de la municipalité en janvier, dans l’information de sa population.

Parmi les trois grands rendez-vous qui nous rassemblent au monument « Mémoire et Paix », le 11 novembre est différent du 8 mai et du 14 juillet. Comme un signe supplémentaire de la barbarie, de l’atrocité du conflit mondial qui ravagea l’Europe pendant cinq ans, l’armistice du 11 novembre 1918 fût signé avec l’Allemagne alliée aux puissances centrales, Autriche, Hongrie, Turquie, dans la clairière de Rethondes alors que le froid et la pluie envahissaient de nouveau les tranchées et que, deux semaines auparavant, la France, saignée à blanc, avait, comme le voulaient ses traditions, célébré au lendemain de la Toussaint le jour des morts.

La concordance de ce double calendrier religieux et guerrier a donné ses couleurs de deuil à cette cérémonie avant qu’elle ne devienne, plus récemment, l’instant sacré d’une commémoration dédiée aux morts de toutes les guerres. Si tant est que les pensées des vivants permettent de redonner fugitivement un souffle à l’esprit des défunts, comme le croyait les anciens romains, c’est vers eux que notre mémoire et notre reconnaissance doivent se tourner aujourd’hui.

Le premier de ces disparus, auquel il nous est fait devoir de songer, est ce jeune brigadier engagé au 1er régiment de spahis de Valence. De ce régiment, nous avons entendu le chant de cohésion, le chant de tradition, « Loin de chez nous en Afrique » en pénétrant dans ce monument. C’était une manière de le saluer. Après le médecin capitaine Marc Laycuras tué en avril au Mali, après les membres des forces spéciales Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello, tués au Burkina-Faso en mai, Romain Pointeau est tombé au Mali voici neuf jours, le 2 novembre, pratiquement au même moment que 49 soldats maliens. Chaque cérémonie nous fait redire les mêmes mots. Il était jeune. Il était courageux. Il n’avait pas 25 ans. Il s’était engagé non sur un coup de tête, mais par conviction, par amour de la patrie, trois ans auparavant. Il défendait la France et ses valeurs. Ses parents et ses amis le pleurent aujourd’hui.

Comment ne pas s’associer également à la douleur des familles des quatre policiers de la préfecture de Paris poignardé par un collègue, dont il convient moins de souligner qu’il s’était converti, car là n’est pas la question, que de s’interroger sur le fait qu’il s’était radicalisé, car là est l’inquiétude et le combat qu’il faut mener pour la démocratie, les droits des femmes et la liberté de pensée. Cette municipalité, je le rappelle, ne reconnaît aucune religion, aucune communauté. Elle garantit la pratique de cultes et l’existence d’associations. Dussé-je en décevoir certaines ou certains, y compris parmi les gens qui m’aiment bien, la laïcité reste pour moi un horizon indépassable. Voilà tout ! En revanche, notre Mairie est l’alliée naturelle de la Police qu’elle soit nationale ou municipale

Les forces de l’ordre nous protègent et, en nous protégeant, elles prennent en premier les coups qui nous sont destinés, qui nous auraient touchés. On peut les critiquer et, comme toute institution, elles ne peuvent, agissant dans l’urgence et le danger, être parfaites, ne pas commettre d’erreurs (il m’arrive de le dire…), mais on ne peut supporter qu’elles soient abaissées et injuriées par des chants, des slogans, des discours, alors qu’il faudrait exiger, comme pour bien des agents publics, à l’hôpital, à l’école, des moyens et des budgets pour tous ceux qui veillent à notre sécurité. Le mouvement revendicatif des pompiers ne m’a pas échappé. Pour moi, la sécurité est une priorité. Donc les conditions de vie de ceux qui l’assurent le sont aussi. Cela explique sans doute que j’ai recruté deux nouveaux policiers municipaux, pas les moins dissuasifs, qui seront opérationnels en décembre et que nous soyons en train de mettre en place avec Mme le Procureur de la République et M. le directeur de la Sécurité Publique un plan particulier à la commune, caractérisé par sa sévérité et la rapidité des peines qui seront appliquées contre les délinquants et les auteurs d’incivilités. Je ne suis pas autoritaire, mais j’ai de l’autorité.

Je pense également aux deux gardiens de la centrale de Condé-sur-l’Escaut à qui on avait confié un fauve fanatique qui les a poignardés. Cet attentat est révélateur de ce qui se passe dans nombre de prisons et l’administration pénitentiaire, à tous les niveaux, a un dur métier que lui assigne la société en lui confiant ceux dont elle ne veut plus entendre parler, voire se débarrasser.

De même, je veux espérer que la convalescence des passants qui, à Lyon, ont été blessés par un colis piégé se poursuit, tout comme celle de l’imam de la mosquée et cet homme qui s’y rendait  à Brest, ainsi que ces deux hommes âgés, fidèles qui allaient prier, gravement atteints à Bayonne par la folie, la stupidité, la sénilité d’un ancien candidat du Front National.

J’étais en Chine au début de la semaine dernière. J’ai pu y rencontrer le Président de la République durant sa visite officielle. Il sait quel est mon idéal social-démocrate, ce que sont les valeurs auxquelles, au-delà des vicissitudes des partis, je reste fidèle et où est mon engagement. Je continue de croire en l’égalité des chances et à la justice sociale, à revendiquer la nécessité de la redistribution fiscale et du service public pour assurer entre tous les citoyens, sans la moindre discrimination d’origine, d’âge ou de sexe, la solidarité dans l’éducation, le logement et l’emploi, face à la vieillesse, à la pauvreté et la maladie, la priorité à la lutte contre le réchauffement climatique, à la préservation de la biodiversité, au respect de la planète. Ce sont des nécessités sans lesquelles ne peuvent exister ni vivre ensemble, ni pacte républicain. Cependant, au moment où nous nous quittions, le chef de l’État m’a dit avec une certaine gentillesse et plus fortement encore qu’il l’avait fait avant l’été à l’Élysée : « tu sais : je souhaite que tu gagnes ».

Alors, à mon tour, modestement, de saluer l’un des gestes du Chef de l’État. Tout comme nous nous retrouvons dans cette crypte dont les nuages sont le toit, sera inauguré à Paris, cet après-midi, un monument qui pourrait parfaitement s’appeler comme le nôtre « Mémoire et Paix ». Dans le square Eugénie Malika Manon Djendi, du nom d’une sous-lieutenant d’origine algérienne, parachutée pour contribuer à la libération de la France occupée, déportée et exterminée par les nazis à Buchenwald, six soldats de bronze, cinq hommes et une femme, représentant toutes les armées, portent un cercueil qu’on ne voit pas. C’est un hommage à tous ceux qui ont donné leur vie en OPEX, en opérations extérieures, pour la France depuis 1963, Ils sont 549 morts avant le temps. 34 plaques d’acier égrènent leur nom. 129 tués au Tchad. 141 au Liban, 85 en Afghanistan. 78 en ex-Yougoslavie. 28 au Mali.

Il y a là ceux qui sont tombés en 1995, reprenant, comme à Arcole, un pont aux Serbes, à Sarajevo, pour libérer leurs camarades casques bleus pris en otages, ceux, légionnaires, paras et marsouins ensevelis en 1983 sous l’immeuble Drakkar à Beyrouth, assassinés, comme notre ambassadeur l’avait été peu avant, par le père du boucher de Damas et ses complices libanais, ceux – ils étaient dix – qui, à court de munitions, ont été égorgés, après un effroyable corps à corps, en 2008, par les talibans dans les montagnes d’Uzbin, non loin de Kaboul, ou ceux, officier et sous-officiers confirmés, décimés en 2012 dans la cour de leur caserne en Kapissa par un soldat afghan qui avait gagné leur confiance et qui, alors qu’ils étaient en tenue de sport, désarmés, vida sur eux ses chargeurs, ceux qui résistent aux bandits brésiliens à la frontière de la Guyane, ceux qui ont été bombardés par des avions mercenaires à Bouaké en Côte d’Ivoire. Autour d’eux, il y a l’immense cohorte des blessés, des mutilés, des amputés. Avec eux, il y a nos 7000 compatriotes toujours mobilisés dans les dispositifs Chammal contre Daech en Irak et Syrie, Barkhane et Serval contre les terroristes au Niger et au Mali ou sous le fanion des Nations-Unies. Les oublierions-nous s’ils étaient nos enfants, nos fiancés, nos compagnons d’armes ? Non ! Alors considérons-les comme tels.

Je vais conclure. Cette cérémonie est la dernière de la mandature. Je ne sais si nous avons bien fait. Ce n’est l’heure ni du bilan (il faudra le tirer en 2025 après l’ANRU), ni celui du programme, car c’est depuis longtemps le même : être honnêtes, être travailleurs, être présents, être efficaces, être unis. Je n’ai qu’un seul Parti. C’est Val-de-Reuil. Je ne suis pas seul. J’ai une équipe dont je suis fier. Mais un certain nombre de nos collègues nous ont quittés au cours de ces six années qui étaient, pour certains, des amis en actions, des sœurs et des frères en idées. Je pense à Daniel Moreau qui, prenant sa retraite après une vie professionnelle bien remplie chez Matra devenu Cassidian, voulait nous rejoindre pour mettre ses compétences et ses convictions à la disposition des rolivalois. Je songe évidemment à Bernard Cancalon, ancien légionnaire, nouvel élu, venu de bien loin probablement, mais avec tellement de sincérité pour aider les autres, faire le bien, terrassé par une crise cardiaque dont on ne peut s’empêcher de penser qu’elle l’aurait peut-être épargné s’il s’était moins dépensé au service des autres. Nous vivons, enfin, avec le souvenir et le sourire de Noëlle Boudard emportée par une atroce maladie et qui, jusque dans ses derniers SMS dictés à sa fille, parlait « des moments parfois merveilleux, parfois difficiles », je la cite, passés à l’état-civil, au conseil ou dans ces campagnes électorales qu’elle adorait. A nos trois collègues, je veux associer le souvenir d’un autre conseiller municipal, d’abord embarqué dans l’équipe de Bernard Amsalem, puis dans la nôtre, et qui, lui aussi, veillait aux baptèmes et aux mariages qu’il aimait célébrer. Il s’agit de Maurice Dumontier qui vient de nous quitter. Ils ont rejoint, pour moi, Jeanne Doucet et Antonio Antonioli dont le souvenir ne me quitte jamais .

Enfin cette cérémonie a aussi pour but de rendre honneur, de rendre les honneurs à ceux qui, de notre Ville, ont bien mérité. Lorsque le protocole immuable de ce rassemblement sera arrivé à son terme, après la sonnerie aux morts, après le dépôt des gerbes, symboliquement déposés par ceux qui sont l’État, l’autorité et la sécurité, je reprendrai la parole pour faire, devant son épouse et sa famille, l’éloge de Claude Aubé qui s’en est allé voici quelques jours.

Un tout dernier mot enfin. Il est pour Patrice Caumont. Lui aussi a été un soldat de la Ville. Ce soldat avait une vie et cette vie était une femme. Ils ont lutté tous les deux, elle bien sûr, mais lui aussi, pour faire reculer la longue et douloureuse maladie, marquant des points, gagnant du temps, mais elle l’a finalement emporté. A Patrice, nous sommes nombreux à avoir pensé ces dernières semaines. Pour ces femmes, pour ces hommes, pour vous je voudrais simplement réaffirmer : Vive Val-de-Reuil. Vive la République. Vive la France.

12 NOV 2019

Claude Aubé n’avait pas ménagé ses efforts ni pour sa commune, ni pour son pays. Val-de-Reuil a perdu l’un de ses derniers anciens combattants, l’un de ses premiers habitants, l’un de ses plus fidèles défenseurs, l’un de ses bénévoles du quotidien. Il était normal et primordial que nous lui rendions hommage.

Hommage à Claude Aubé (1940 – 2019)

Intervention de Marc-Antoine JAMET, Maire de Val-de-Reuil

Monument Mémoire et Paix

Lundi 11 novembre 2019 à 11h00

Cher(e)s ami(e)s,

Claude Aubé aurait-il apprécié l’hommage que sa Ville lui rend aujourd’hui ? Ce n’est pas certain. Son visage qu’un collier de barbe avait depuis longtemps envahi dissimulait une grande modestie, une puissante aspiration à la tranquillité, une volonté affirmée de discrétion. Cet homme de devoir aimait à se réfugier dans l’ombre et le silence. Pourtant il nous revient à nous, aujourd’hui, ses amis, de le replacer en pleine lumière, de dire à haute et forte voix qu’il n’avait ménagé ses efforts ni pour sa commune, ni pour son pays, ni pour Val-de-Reuil, pour la France.

En ce 11 novembre 2019, il aurait dû prendre rang parmi ses camarades porte-drapeaux, ceux de Poses et ceux de Léry avec lesquels il aimait se mêler lors des grandes cérémonies de la République. C’est une mission qu’il n’avait jamais cessé de remplir au cours des trente dernières années. Qu’il pleuve, qu’il vente, il ne l’aurait manqué pour rien au monde. Seule la mort y aura mis un terme. C’est pourquoi Didier Piednoel, le maire de Poses, et Janick Léger, notre conseillère départementale, qui tous les deux l’ont bien connu, ont ressenti l’absolue nécessité de saluer son parcours par un geste particulier d’amitié et de respect. C’est le sens de cet hommage. Avec moi, ils ont souhaité que sa mémoire soit évoquée au cœur de notre monument. Au cœur de ce Monument, mais aussi, mais surtout face à une forêt dont il connaissait le moindre chemin, le moindre sentier. Ainsi pouvions-nous saluer, sans le trahir, de la manière la plus fidèle, la plus juste et la plus appropriée son engagement, ses valeurs et son attachement à un territoire qu’il aimait profondément. C’est sur notre terre que son histoire avait débuté.

Claude Aubé était né à Notre-Dame-du-Vaudreuil le 13 mars 1940 quelques mois avant que le hurlement strident des stukas n’annonce la douleur de l’exode, la honte de la défaite, l’ignominie de la collaboration. Claudius, comme ses amis aimaient à l’appeler, faisait partie d’une famille dont le nom, synonyme de blancheur, si fréquent entre Manche et Seine, se confond avec la Normandie, ses paysages de bocage et ses traditions. Sans doute lui fut-il moins facile qu’à d’autres gamins de connaître et de profiter, sous l’occupation, durant la guerre et dans les restrictions, de l’insouciance et du bonheur de l’enfance. Son adolescence eut pour cadre ce corps de bâtiments longtemps appelé « la Petite Ferme » qui abrite maintenant les tréteaux de France.

Claude Aubé travailla très tôt en débutant aux côtés de son père. Celui-ci exerçait un des plus durs des métiers de cette France du siècle précédent puisqu’il était ouvrier agricole. Au cours de ses années d’apprentissage, le fils ne ménagera ni son énergie, ni sa peine. A ces exploitations qui faisaient la richesse de notre territoire alors rural, il donna sa force et ses bras. Il s’employa notamment au domaine agricole Louis Renault, à cheval sur les deux rives de la Seine, la demeure à Herqueville et la ferme à Porte-Joie, bourgade qui ne portait pas encore ce nom triste, absurde et banal de Portes-de-Seine. Arriva le temps de la rencontre avec celle qui allait partager toute sa vie. Cet univers appartient à Anita, son épouse, qui se trouve avec nous ce matin. Je ne m’y immiscerai pas. Mais leur rencontre va être soumise à dure épreuve.

Claude Aubé n’a que 20 ans, en effet, lorsque la conscription l’appelle. Il rejoint ces hommes qui vont effectuer leur service national, ces Français de métropole qui, à partir de la Toussaint rouge, en 1954, vont traverser la Méditerranée, naviguer de la Bonne Mère à Notre Dame d’Afrique ou à la Santa-Cruz, s’embarquer sur le Ville d’Oranou bien le Ville d’Alger, avant de rejoindre les Aurès, le Sahara, la Kasbah, les frontières avec le Maroc et la Tunisie. Ce qui devait être une simple opération de maintien de l’ordre, d’événement en événement, pour toute une génération, est devenu une guerre qui ne voulait pas dire son nom. Lorsque Claude Aubé arrive en Algérie, en 1960, il ne s’agit déjà plus de confier aux appelés des missions de police. Ils participent depuis des mois, activement, aux affrontements, aux ratissages, aux combats. Dans les deux camps, la violence va attiser la haine. D’un côté, c’est la torture parfois jusqu’à la mort pour arracher aux prisonniers fellaghas renseignements et réseaux. De l’autre, ce sont des atrocités commises par vengeance. Cela finira par l’indépendance, inéluctable, de l’Algérie. Le FLN décimé remporta la victoire politique et la France gagnant l’essentiel de la bataille militaire perdra celle des âmes et des cœurs.

Pendant près de 26 mois, Claude Aubé aura été affecté au poste radio de l’un des régiments d’infanterie de l’Oranais face au Royaume Chérifien, base arrière de ce qu’on appelle encore la rébellion. De ces deux années et demie passées loin des siens, il parlait peu. Les mémoires d’appelés sont souvent des mémoires blessées. Claude Aubé partagea le silence du million d’hommes qui s’en revinrent d’un conflit qui dura huit années, marqua profondément une époque et explique une partie des fractures de la société française, sa méfiance à l’égard des banlieues, le succès de mouvements populistes racistes et xénophobes.

Songeant à cette période passée loin de sa terre natale, Claude Aubé n’exprimait pas de rancœur, d’amertume ou d’animosité. Au contraire, il s’attacha à faire vivre le souvenir de ceux qui, morts pour la France, avaient été ses compagnons, de ceux qui, soldats des deux grandes guerres mondiales, avaient précédé son engagement, de ceux, militaires des opérations extérieures, qui lui avaient succédé sous les drapeaux, honorant leur mémoire, transmettant aux générations futures le sens de leur sacrifice et de leur dévouement.

Libéré de ses obligations militaires, la carrière professionnelle de Claude Aubé se poursuivit. Notre département accomplit dans les années soixante-dix sa mutation industrielle. Croissance, emploi, commerce, c’était encore les Trente Glorieuses. Claude Aubé rejoint alors l’entreprise Labelle, à Saint-Pierre-du-Vauvray, qui, faut-il qu’il nous en souvienne, créée en 1820, figurait parmi les plus importantes fabriques de chaussures en France. Fournissant des marques de prestige, elle ne comptait pas moins de 1200 salariés et voyait chaque matin arriver sur le quai d’une gare désormais moins fréquentée un train spécialement affrété pour acheminer ses ouvriers. A vrai dire, le climat social y était plus proche de Zola que de Google ou Microsoft. C’était avant que son dernier dirigeant, patron d’un autre âge, ne dépose le bilan en 2002 prenant prétexte des 35 heures, pour expliquer son échec.

En 1987, il rejoint Hervé Jimonet, son complice, son frère d’armes qu’il avait rencontré trente ans plus tôt au bal des conscrits de Pont de l’Arche. Il adhère alors à la section de l’Union Nationale des Combattants de Louviers puis, quelques années plus tard, participe avec son ami à la création de celle du Souvenir Français de Léry-Poses. Il ne cessera d’en être l’un des piliers et en était, encore jusqu’à ces dernières semaines, le vice-président. Mais venons-en à l’essentiel. À la fin des années 1980, Claude Aubé et Hervé Jimonet vont accomplir une mission symbolique et sacrée. Ils parcourent les communes environnantes pour vérifier l’état des monuments et des stèles dédiés aux soldats morts au champ d’honneur, aux militaires morts pour la France. À Poses, à Léry, à Connelles, Tournedos, à Andé, à Daubeuf et au Vaudreuil, pendant des semaines, en tout temps et en toute circonstance, ce sont plus d’une centaine de stèles qui seront relevés ou consolidés grâce à leurs efforts et à leur courage. Ils ont ainsi empêché que le nom de milliers d’hommes, originaires de nos villes et de nos villages, ne glissent dans l’oubli. Cette magnifique entreprise justifie que nous nous rassemblions ce matin.

Pour entretenir la mémoire du Pays, il n’est jamais de vaines attentions, ni de démarches inutiles. C’est par le récit collectif que se fait la transmission, l’intégration et la Nation. Je le dis en regardant les dizaines de jeunes présents à cette cérémonie.Claude Aubé, qui avait à cœur d’emmener son petit-fils à chacune des manifestations patriotiques auxquelles il participait, aurait été touché de voir ces collégiens, ces lycéens, ces volontaires du SNU, ces pensionnaires de l’EPIDE et ces jeunes Sapeurs-Pompiers réunis dans la froide humidité d’un matin de novembre.

Notre hommage n’est heureusement pas le premier. Ses plus de trente années de travail citoyen et de veille patriotique furent salués par le Souvenir Français et l’Union Nationale des Combattants. Médaillé du mérite de l’UNC, de la Croix du Djebel, de celle du Combattant, de celle commémorative d’Afrique du Nord et, en 2019, médaillé de Vermeil avec bélière laurée, plus haute distinction remise à un adhérent du Souvenir Français. Ces décorations disent la reconnaissance de ses pairs. Elles rappellent aussi les vertus d’un homme.

En bon normand, Claude Aubé, je l’ai dit, était un taiseux. En bon normand, c’était donc un faiseux, un homme dévoué et courageux. Au retour d’Algérie, Claude Aubé retrouve Anita à Saint Pierre du Vauvray. Ils fondent une famille de trois enfants et rejoignent Val-de-Reuil en août 1985 au 2, rue des Compagnons, adresse symbolique à laquelle ils ont toujours résidé. Il a est vrai qu’il a connu Val-de-Reuil avant Val-de-Reuil. Il était de la sorte plus Rolivalois, s’il se peut, que les pionniers de la Ville Nouvelle, imprégné qu’il avait été, depuis le plus jeune âge, avant que la cité contemporaine soit construite, de son terrain, de la courbe de ses collines, de ses sentiers et de ses rivières,

Vînt le temps des établissements LeTellier, entreprise de serrurerie et de clôture, au sein de laquelle il reste près de 25 ans y faisant la majorité de sa carrière professionnelle. Courageux, je disais, à l’aube ou au crépuscule, Claude Aubé faisait le trajet qui séparait son domicile de son travail à vélo sur une chaussée qui ne comportait ni contre-allées ni pistes cyclables protégées. Il fallait avoir les épaules solides et une belle santé. Il est vrai que Claude Aubé n’était pas le plus frêle des hommes, mais la largeur de ses épaules n’était pas superflue lorsqu’il s’agissait de porter à bout de bras des mètres de clôtures métalliques. La pénibilité de son travail ne lui retirait pourtant pas, m’a-t-on dit, son sourire. Pour ne donner qu’un exemple de ce que fût le quotidien de son labeur, on disait qu’il avait planté chacun des piquets de notre base de loisirs. Il en fut quelques années plus tard le garde-pêche, ne détestant pas ses moments où les chemins du travail rejoignaient ceux d’une nature dans laquelle il aimait vivre, chasser, pêcher. Il appréciait ses instants de liberté.

Claude Aubé, habitant Val-de-Reuil depuis 35 ans, aimait sa Ville. Fidèle du concours des balcons fleuris, il était aussi, au début des années 2000, une figure des Facéties qui, une semaine durant, voyaient la Place des Chalands métamorphosée en jardin suspendu digne d’une moderne Babylone. Après avoir participé aux expositions florales que l’association organisait, il fut pendant près de trois ans le Président des Jardins Familiaux, non parce qu’il convoitait cette responsabilité, mais parce qu’il fallait suppléer à la vacance laissée par celui qui lui avait précédé. Il avait accepté cette tâche sans sourciller. Jean-Pierre Perrault et Jean-Denis Harrou pourront le confirmer. Il aimait rendre service. Spontanément. Sans attendre de contrepartie ou de retour. C’est ainsi qu’il agissait également dans nos écoles et auprès des sapeurs-pompiers de Val-de-Reuil lorsqu’il revêtait les habits rouge et blanc du Père Noel. Il le faisait comme bénévole de chacun des triathlons. C’était une question de loyauté, de justice et de solidarité.

Claude Aubé ne cachait pas ses convictions. Il avait confié à Janick Léger sa fierté de voter pour une femme lorsqu’elle fut élue pour la première fois conseillère générale de Val-de-Reuil. Je n’oublie pas non plus qu’il fut l’un des premiers à me recevoir, à me conseiller et à me soutenir lors de la première de mes quatre élections municipales en 2001.

Dimanche 6 octobre 2019, Val-de-Reuil a donc perdu l’un de ses derniers anciens combattants, l’un de ses premiers habitants, l’un de ses plus fidèles défenseurs, l’un de ses bénévoles du quotidien. Aussi, revenant à mes premiers mots, il était normal et primordial, aux côtés de son épouse, de sa fille, de ses amis et de ses compagnons, que nous donnions son nom au chemin qui mène aux jardins familiaux. Claude Aubé vous nous avez aidés. Nous nous vous remercions et nous ne vous oublierons pas.

27 OCT 2019

Organisé par la Cosmetic Valley, le Salon Cosmetic360 2019 était placé sous le signe du développement durable. Une 5ème édition dédiée à une modernité responsable, faite de confiance, de vigilance et d’optimisme. En tant que Président du pôle de compétitivité, c’est la priorité que j’ai souhaité rappeler à travers cet éditorial qui introduisait le programme du rendez-vous international de l’innovation pour la filière parfumerie-cosmétique.

Nous sommes tous des collégiennes suédoises ?

par Marc-Antoine JAMET, Président de la Cosmetic Valley

 

Partout, à la tribune de l’ONU, à la table du G7, au rythme des cortèges de rue, sur les ronds-points ou dans les associations, en Corrèze, en Amazonie, les citoyens veulent transparence, proximité et responsabilité. Ils l’exigent des institutions politiques. Ils les demandent aux entreprises. Mieux vaudrait, pour le futur de la planète certes, pour l’avenir de tous également, qu’elles ne restent pas sourdes à cet appel. Au mépris, au mutisme, à l’indifférence, ne répondraient que l’intolérance et la boursouflure, les zadistes en dreadlockset autres black blocs, l’extrémisme des gilets ultrafluos et l’intolérance des bigots, l’exagération imbécile, le fanatisme assassin, bref le repli sur soi, la violence aveugle et « la bêtise au front de taureau ».

Une solution existe. Chez la plupart des êtres, le cerveau a horreur du vide. Il faut un sens à la vie, des causes qui vous emportent et vous transforment, un idéal, une idéologie. Après vingt siècles de l’ancien, un autre monde est en train de naître. Ce sont les idées, les valeurs, qui mènent l’humanité. Quand elles surgissent, autant prendre les bonnes. Manifestement certaines, pas les moins dérangeantes pour notre confort intellectuel, nos habitudes de vie et pensée, mais pas non plus les plus inintéressantes, ni les moins sensées, sont en train de se frayer un chemin. Après avoir été des Juifs allemands, il y a quarante ans, sommes-nous – tous – en train de devenir des collégiennes suédoises en rupture de ban ?

La Cosmetic Valley est un peu plus âgée que Greta. Elle fête ses 25 ans. C’est dire qu’elle jouit de toutes ses facultés. Plus d’adhérents, plus de projets, plus de résultats, comme l’équipe qui la fait vivre, elle a la silhouette et les privilèges de l’éclatante jeunesse. Sa mémoire est vive, mais sans a priori. Elle est engagée, contre le réchauffement climatique, l’épuisement des ressources, la montée des océans, la disparition des dernières forêts primaires, l’extinction de la biodiversité, la protection de la faune et de la flore (que nous appelons cosmétopée), mais pas militante. Le rouge faisait peur aux bêtes à cornes. Le vert convient à l’herbe des prairies. Nous devons être plus subtils.

Cela tombe bien : le propre d’un pôle de compétitivité est d’être à l’écoute du terrain, d’agir en proximité, d’entendre ce qui se dit. Notre écosystème – géants, PME, start-ups, laboratoires, universités et collectivités –  a pour objectif de travailler vite, efficacement, de manière appropriée, par l’industrie, au service de l’économie, pour une croissance juste et équilibrée. C’est ce que nous défendons. C’est ce nous apprenons de nos clients, de nos partenaires, de nos salariés. Ils espèrent un « substainable world », un monde durable qui prenne pleinement en compte les impacts environnementaux et sociaux des activités humaines. Ce n’est plus une option, une indulgence par laquelle on rachèterait sa conscience. C’est une nécessité. Devant cet impératif écologique nous pensons que l’innovation, richesse illimitée de la créativité des hommes et de leurs entreprises, nous permettra de relever le défi gigantesque qui nous fait face.

Il était donc normal, presque banal, que COSMETIC 360 dédie ce salon 2019 à une modernité responsable, faite de confiance, de vigilance et d’optimisme. Le pôle et ses adhérents peuvent agir sur toute sa chaîne de valeur, du sourcing éthique à l’éco-conception des produits, de la sauvegarde de l’agriculture à la prévention des pollutions, par la valorisation de l’économie circulaire, par la réduction de l’empreinte carbone, depuis la recherche de matières premières jusqu’à la distribution dans les magasins physiques, ou via les places digitales de marché.

Ce sont ces dimensions que nous explorons à travers la 5ème édition de notre rendez-vous parisien. Ainsi découvrirez-vous, étonnés, de nouvelles approches pour acquérir principes et ingrédients grâce aux filières mises en place avec les pays producteurs comme la Colombie, le Japon ou Madagascar. Le choix du « packaging plastic free » s’illustrera par la proposition – prosaïque et prosélyte – d’un retour au verre porté la Glass Valley. Parmi 80 innovations présentées, 18 seront lancées par nos conférences « Activist Beauty ». Enfin, pour son 3ème rassemblement, notre hackathon fera plancher de jeunes énergies, de bien savants étudiants, les business men and womende demain, sur ce thème de la RSE pour, au-delà, du discours et des intentions, faire souffler un vent nouveau, un air rafraichissant sur notre profession.

Voici notre feuille de route, voilà notre priorité. Ce n’est pas l’apologie de l’austérité. Loin s’en faut. Il s’agit, tenant compte des contraintes nouvelles, s’appuyant sur la science et le bon sens, de donner à notre filière le souffle et l’esprit qu’Arthur Rimbaud avait assignés à la poésie, qu’elle « ne rythme plus l’action », qu’elle « soit en avant ». Nous souhaitons, j’emprunte à Claude Martinez, président de Parfums Christian Dior, la formule, « passer d’une beauté durable à une durabilité belle ».

25 OCT 2019

POUR RÉTABLIR LA VÉRITÉ ! (IL ÉTAIT TEMPS…) – Ma contribution aux Mélanges en l’honneur de Bernard Stirn

POUR RÉTABLIR LA VÉRITÉ ! (IL ÉTAIT TEMPS…)

par Marc-Antoine Jamet, Maire de Val-de-Reuil1

La renommée est facétieuse et bien des réputations sont incertaines. Un exemple suffira à l’établir. Prenons la vaste escroquerie, à tout le moins intellectuelle, autour de laquelle s’est construit ce que certains — ses affidés, ses obligés — osent encore appeler le « parcours professionnel » du Sieur Stirn. Appelons un chat un chat et n’ayons pas peur de ces porte- flingue. Alors qu’une nouvelle étape se lève sur cette pseudo carrière, disons ce qu’elle fut véritablement. Levons le voile et affirmons que Bernard est nu ! Derrière une respectabilité de façade, son seul véritable talent tient en la longue suite de voies de fait, de tentatives d’intimidation, de chantages éhontés, d’extorsions de décisions à laquelle il se livra, souvent en bande organisée, autrement appelée « section » ou « assemblée », sans jamais être inquiété. Pendant des décennies, secrètement, il empêcha, de braves gens, des gouvernements pressés, des fonctionnaires zélés, de vénérables associations et des collectivités blanchies sous le harnois, d’aller de l’avant et de gagner du temps. Qu’importe, après tout, ces petites inégalités, ces brèves illégalités, pas si graves en somme, qui donnent du sel à la vie politique et font progresser en efficacité l’action publique. Caligula et Néron, empereurs adulés, ont-ils eu besoin d’un Bernard Stirn pour accomplir de grandes choses ? Non, ils n’en avaient pas et les Romains ne s’en portèrent que mieux. Idem pour Attila. Itou pour Gengis Khan ? Pourquoi faudrait-il s’en prendre à un décret un tant soit peu mal fagoté ou à un arrêté légèrement de guingois qui, au maximum maximorum, ne viendra léser qu’une poignée de citoyens, voire quelques étrangers qui ne nous sont rien, ne parlent pas notre langue et que nous ne connaissons pas? Pourquoi respecter des textes dont les auteurs, reconnaissons-le sereinement, sont morts pour la plupart d’entre eux, parfois il y a fort longtemps, et n’en peuvent mais? À l’heure des réseaux sociaux, bénits soient-ils pour tout ce qu’ils nous ont apporté de beau, de bien, de bon, faut-il encore s’embarrasser du formalisme désuet, de ces procédures sans fin, dont Bernard Stirn, acharné à nuire à notre pays, s’est fait une spécialité prétendant nous priver des progrès en matière de simplification administrative dont leurs leaders ont, récemment, fait bénéficier les latinos aux États-Unis, les opposants à la Sainte Russie, les dissidents de l’Empire du Milieu, le demi-frère et le vieil oncle du charmant garçon qui veille aux destinées de la sympathique Corée du Nord. Ajoutons qu’il n’a jamais été scientifique- ment établi que saint Bernard ait eu à souffrir personnellement des erreurs qu’il disait dénoncer et que cet altruisme à lui seul, maladie appelée sens de l’État ou goût du service public, peut être considéré comme suspect. Il s’agissait, en fait, pour lui, systématiquement, de se faire mousser pour obtenir le monopole de l’enseignement du droit public Rive Gauche en séduisant les étudiants par ses rodomontades inutiles, pour ne pas dire nuisibles à une démocratie moderne.

Il était temps que la province, la vraie, l’authentique, en l’occurrence la Normandie, celle qui monte chaque samedi à Paris pour en animer les rues de truculents monômes jaune vif, fasse tomber les écailles des yeux de la capitale. Bien sûr, nous aussi, dans les premiers temps, nous nous sommes fait avoir par son petit air innocent. On disait de Bernard Stirn qu’il était honorablement connu dans les milieux les plus autorisés. Il aurait — chuchotait-on —, son rond de serviette aux tables à la mode, son fauteuil dans les clubs chics, dont les membres sont triés sur le volet, sa place réservée au haut des colonnes des journaux dont les avis sont attendus. Bref, il avait pignon sur rue. Tout chez lui paraissait n’être que crédibilité et légitimité. Il n’en était rien. Bonne renommée ne tient pas à ceinture dorée. Qu’importe le prix que j’aurais à en payer, les permis de construire de ma résidence secondaire annulés, les concessions funéraires des aïeux refusées, les référés-liberté contre mes voisins de palier déboutés, les études de droit de mes enfants compromises, mon chien mis en fourrière, les amendes fiscales inventées et la

menace d’expulsion du territoire français vers Baghouz agitée ! La vérité doit éclater. Maintenant.

Depuis l’obtention de son bac, en 1969, un an après les événements dramatiques que vous savez et qui firent tant de mal à la France en général et au Général en particulier, il n’est pas difficile de démonter les mécanismes qui présidèrent à l’irrésistible ascension de l’étudiant en droit timide qu’était, à cette époque, Bernardo, alors fidèle serviteur de Zorro. La méthode fut des plus classiques. Elle demanda à l’intéressé à peine plus d’efforts que ceux requis pour plumer au bonneteau un touriste japonais un samedi matin à la sortie du métro Clignancourt. Ce fut un complot, un complot vous dis-je. Sous couvert de collégialité, un petit groupe de personnes, les « bernardins », possédant toutes les marques extérieures du pouvoir, rosette au revers, légère calvitie dégageant le crâne, pompe incon- testablement universitaire, petit bedon républicain, carrières ministérielles en sautoir, avaient pris l’habitude, depuis 1799, de se réunir sous les plafonds dorés d’une antique juridiction administrative. À la préfecture de Police, on craignait cette bande du Palais-Royal qui semait la terreur dans toute l’administration. Tout juste si d’autres délinquants du même acabit, ceux de la rue Cambon, ceux de la rue de Bercy, osaient leur tenir la dragée haute. Ce petit aréopage clandestin, cette camarilla d’ambitieux, décréta un jour que notre jeune homme serait juriste et même, à les entendre, le meilleur d’entre tous. Infiltrés de longue date jusqu’au sommet de l’État, tous maigres comme des loups affamés, le cheveu court et la veste de tweed fatiguée, un peu écrivains, un peu libertins, ne laissant à personne le premier rang de la terrasse du Nemours ou du Flore, dès les premiers beaux jours, qui pouvait imaginer leur résister. Ils rassemblèrent leurs forces occultes pour parvenir à leurs fins. Exégète de l’intérêt général, arbitre souverain de l’erreur manifeste d’appréciation, serviteur du droit, Bernard Stirn allait, pour nourrir leur cause, devenir pour le contentieux ce que Tom Cruise est à la scientologie, bref un drapeau, une vitrine, pour tout dire un symbole. Une manière de prendre le pouvoir..

Il fallait auparavant construire l’icône, faire ce qu’on appelle dans la politique ou durant la fashion week du « story telling ». Le scénario se mit en place. Mesuré, réservé, posé, pondéré, à son sujet des épithètes diverses, mais concordantes, furent habilement distillées dans la grande presse par le Centre de documentation de la juridiction fameuse (iurisdictio clarissimi) où il était entré comme auditeur en 1979. C’était une sorte de congrégation pour la propagation de la foi, dont Long, Weil et Braibant seraient les apôtres et, en même temps, ce qui n’est pas idiot, les prophètes. On n’est jamais aussi bien servi que par soi-même. Bernard Stirn fut lancé sur le marché (non public) du droit administratif comme Kate Moss ou Claudia Schiffer, ses contemporaines, sur celui de la mini-jupe. On mobi- lisa magazines people et tabloïds : France Dimanche, l’AJDA, Gala, la Revue française de droit public, Paris-Match et naturellement le très populaire European Journal for Legal Studies, toujours couru pour son horoscope et ses pronostics du tiercé, en vente dans tous les kiosques et les bonnes librairies, ainsi que sur abonnement avec envoi sous enveloppe anonymisée (copie de la carte d’identité demandée ou autorisation des parents pour les mineurs). Des campagnes de plusieurs millions d’une monnaie aujourd’hui disparue et autrefois appelée franc, furent secrètement mobilisées pour asseoir sa notoriété. « Stirn, il n’y en a pas deux », « Un Stirn, sinon rien », « Stirn, c’est écrit dessus », « On a toujours besoin d’un plus Stirn que soi », cent slogans s’épanouirent, cent publicités rivalisèrent. Stirn gravissant la roche de Solutré. Stirn allant à la messe à l’église de Brégançon. Stirn jouant de l’accordéon. Le contribuable n’en sut rien. Un célèbre publici- taire, un nommé Jacques S***, intervint sans attendre que Bernard Stirn eût cinquante ans et bien qu’il ne portât pas de Rolex, pour compléter ce profil artificiellement et minutieusement conçu. On convoqua des groupes « Quali » qui compilèrent la tribu de mots sans signification — requêtes, avis, conclusions — qui, de préférence, allaient devenir les siens. Il les apprit laborieusement. On finit par les lui écrire sur une liste qu’on fourra sous son oreiller en pilou. On les imposa également à ses collègues, pour la plupart d’entre eux moins austères, et qui leur auraient volontiers substitué des substantifs plus aimables comme choucroute, sieste, télévision, blonde et beaujolais. Ils se plièrent à l’exercice et multiplièrent, à leur tour, les Stirn extérieurs de richesse. Pour convaincre les masses qu’elles étaient bien confrontées à un génie du droit, on lui fit faire du « morphing » n’hésitant pas à le confier à Christine Cordula. Sa coupe de cheveux, sa silhouette, son sourire, son regard vous paraissent naturels ? Ils furent déterminés par ordinateur. La preuve ? Ni l’un ni l’autre n’allaient changer en quatre décennies. On fit à l’oreille radicale de Roger-Gérard Schwarzenberg une offre que celui-ci ne put refuser et il assura que le jeune maître des requêtes avait été son directeur de cabinet, alors que ce dernier passait son temps à voir des westerns au cinéma, notamment son préféré « Le VP sifflera trois fois » et à lire Strange Vedel ou Marvel Carbonnier, ses bandes dessinées préférées. A star was born…

La légende pouvait s’emballer. Certains se mirent à prétendre qu’il avait obtenu un diplôme rue Saint-Guillaume, jurant sur l’annuaire du Conseil constitutionnel qu’il en aurait été lauréat. D’autres, sur le même mode, certifièrent sur la tête d’un commissaire du gouvernement, qui plus est de la section de l’intérieur, qu’il avait été, au milieu des années soixante-dix, élève de l’École nationale d’administration à une époque (on rit de cette grossière manipulation…) où, contrairement aux saucisses, elle n’aurait pas élu domicile à Strasbourg, en attendant de la supprimer par démagogie. Sous le manteau, des photos circulèrent le montrant déambulant, flegma- tique, entre Valois, Buren et Montpensier, sans qu’on sache s’il ne s’agis- sait pas de montages dignes de la défunte Union soviétique. Son allure était discrète, mais impeccable. Il était vêtu d’un complet veston, quand ce n’était pas d’un costume trois-pièces, d’un joli gris convenable, égayé d’une chemise à la fine rayure britannique et d’une cravate parfois en tricot, touches manifestement dues au travail d’un tailleur de Hong-Kong. Par souci de cohérence, Photoshop permit aux conjurés de doter ses portraits des lunettes indispensables à un savant sachant, lui faisant arborer tour à tour montures métalliques, pour renvoyer les éclairs des flashs d’une soirée de gala à l’Opéra, ou d’écaille pour faire face à l’ordinaire de la journée d’un fonctionnaire courageux. Ne souffrant d’aucune myopie, Bernard Stirn obtint dans un premier temps qu’on enlevât les verres de ses bésicles arti- ficielles, mais on les lui remit, car, dévoilant la supercherie, il passait pour s’amuser ses doigts au travers des montures vides. La planète fut submergée de ces images devenues mondialement célèbres. Bernard Stirn à la lutte contre M. M’Bala M’Bala avec une mâchoire d’âne. Bernard Stirn chassant l’assemblée du contentieux du Temple, Bernard Stirn séparant le règlement de la Loi devant les douze tribus de l’ordre administratif.

Mais la propagande ne suffisait pas. Il fallait qu’à chaque instant, tel le regretté Saddam Hussein ou le défunt Kadhafi, Bernard Stirn soit par- tout. Bernard Stirn is watching you. Avec la complicité du FSB, de la CIA et du Siècle, après avoir proposé le rôle à Jacques Tati, pour promener sa silhouette affairée place Colette et dans les allées du Palais-Royal, tout en lui permettant d’être au même instant rue Saint-Guillaume et, à Bastille, au conseil d’administration de l’Opéra, des sosies furent recrutés, les uns dans les pampas de Patagonie parmi les gauchos argentins, les autres dans une communauté d’anciens vikings au flanc d’un volcan islandais. On leur fit rencontrer chefs d’État et de Gouvernement qui n’y virent que du feu. D’Édith Cresson à Emmanuel Macron, ils s’émerveillèrent qu’il les serve avec cette belle neutralité qu’on croyait être la marque d’un grand commis de l’État, mais qui n’était due qu’à l’absence de convictions des différents mannequins engagés. Grâce à des microphones sophistiqués connectés à de puissantes bases de données, ses clones purent donner sous les voûtes de Sciences Po, à l’université d’Addis-Abeba, à la Harvard Business School des cours qui paraissaient aux étudiants plus pertinents que ceux de beau- coup dont on taira ici les noms car ils y sévissent toujours… Pour parfaire la supercherie, les conjurés produisirent, sous son timbre, tout un appareil scientifique : livres, articles, entretiens et commentaires. On se rappellera la somme publiée chez Thémis et consacrée à l’autorisation du port de la coiffe bigoudène sur le lieu de travail et dans les lieux d’enseignement. On citera pour mémoire cet ouvrage collectif prétendument rédigé sous sa direction, aux PUF, et qui glosait sur l’interdiction faite aux commerces de centre-ville d’ouvrir en dehors du dimanche. Qui ne se souvient, surtout, de la fameuse interview, à la une d’un grand quotidien désormais tchèque du soir, en 1992, où le récemment nommé conseiller d’État soutenait que le droit canon prohibait strictement le mariage des prêtres, mais lais- sait au sacré collège une marge d’appréciation quant à celui du souverain pontife. Que d’avancées pour notre société! Un petit pas pour la section du rapport et des études, un grand bond pour Dalloz. Nul ne s’étonnait de l’universalité du savoir et de la curiosité de notre homme. Le complot avait de telles ramifications au cœur de l’État que le grand public, celui qui compte, celui du cœur des 6e et 7e arrondissements de la capitale, ne s’of- fusqua pas lorsque le Journal officiel annonça, que le Président Stirn avait été élevé à la dignité de Grand-Croix des Palmes jurisprudentielles (avec brillants et feuilles d’ellébore), peu après avoir été fait Officier des Arts et des Arrêts par promotion surnuméraire du garde des Sceaux et de l’exception française. Ses mérites étaient si nombreux et si grands. En attendant le Quai Conti…

Pourtant il faut aujourd’hui rétablir l’authenticité des faits, rien que des faits. Elle est double et fera mal à un fan-club plus fourni que celui du regretté Johnny Hallyday. Premièrement Bernard Stirn n’a jamais mis les pieds au Conseil d’État, car il passe le plus clair de son temps en Normandie. Oui, le vrai Bernard Stirn vit reclus, prospère et heureux sur les bords de l’Eure. Deuxièmement Bernard Stirn n’a jamais ouvert un code administratif et il est en fait notre plus grand joueur de golf. Oui, Bernard Stirn est le Tiger Woods hexagonal (si l’on veut bien oublier les quelques défauts récurrents du champion américain…). Je vois déjà les sceptiques, abusés par des années de mise en scène, sourires incrédules en dodelinant de la tête. Comment le sait-il ? Par quelle jalousie malsaine nous prive-t-il de notre Bernard national? Et bien c’est tout simple, Mesdames et Messieurs, je suis le maire de la commune, Val-de-Reuil, la plus jeune de France, où saint Bernard vient acheter, non pas un tonnelet de rhum ou de vin, mais son pain quotidien. Alors reprenons depuis le début…

Bernard Stirn est normand. C’est évident, diront les blasés, puisqu’il est né dans le Calvados, que son père y fut grand préfet et que sa famille y fit souche. Il faut reconnaître que, même en deçà de Saint-Clair-sur-Epte, nul n’ignore ces informations indispensables auxquelles la famille de Bernard donna une certaine publicité. On pourrait, pour parer au plus pressé, ajouter que Bernard est par hypothèse normand parce qu’il fait partie de cette élite restreinte, de cette avant-garde précieuse qui sait qu’on ne com- pose pas un plateau de fromages sans camembert, livarot et pont-l’évêque, agrémenté d’un beurre d’Isigny. C’est un signe d’authenticité validé par les moines de l’abbaye du Bec-Hellouin. On notera que Bernard porte sur les joues la marque d’or, le signe sacré de ceux qui ont été élevés au jus de pomme, avant de sombrer, descendus du drakkar, dans le cidre et l’hydromel, puis le calva et le poiré, version cauchoise des délices de Capoue : en effet ses pommettes s’ornent en leur centre, hiver comme été, de deux cercles roses de bonne santé, d’amabilité et de générosité. C’est l’empreinte génétique des cœurs imperméables qui, sous les pluies venues du Cotentin, au rythme des ondées du bord de la Manche, vivent dans une région où la saison sèche ne s’attarde qu’entre midi et quatorze heures le 15 août. Des linguistes particulièrement avisés ont été jusqu’à rechercher dans le « n’est- ce-pas » proverbial qui ponctue les propos de Bernard, une évolution abâtardie du « p’têt ben qu’oui, p’têt ben qu’non » qui sont la signature vocale des « gars d’à Rouen », des héritiers de Flaubert, Lecanuet et Maupassant et, plus largement, des enfants du Duché aux deux léopards qu’incarne avec style, classe et subtilité Hervé Morin. Non, la normanditude de Bernard Stirn ne se cache pas. Elle éclate. Elle crie. Elle hurle. Tout notre Bernard…

Plus calmement, elle s’observe à son amour réel des paysages de l’An- delle et de l’Iton, à son goût pour les falaises crayeuses de la Seine entre Château-Gaillard et le promontoire des deux amants, à sa familiarité avec nos prairies d’herbe grasse, nos rivières sinueuses, nos haies bocagères. Ber- nard Stirn préfère Flers et Falaise au Zambèze! C’est dans l’Eure qu’il se retrouve. C’est en Normandie qu’il se ressource.

Il habite donc chez nous, non loin des lacs et des champs. Certes sa géographie reste chorégraphique. Interviewé par le jamais décevant Paris Normandie sur ses proches et ses voisins, il cite spontanément comme une bonne camarade de coinchée, à quelques kilomètres de sa maison, la danseuse étoile Émilie Cozette qui fréquenterait selon lui Alizay, foyer encore actif du Parti communiste, quand elle déserte celui du Palais Gar- nier. Ce n’est pas snob. C’est chic. Bernard Stirn n’exige pourtant ni tutu, ni chaussons des vaches avec lesquelles il partage son plancher. Et Dieu sait qu’il le partage, puisqu’il est avec nous plus qu’avec vous. Il réside, en effet, sous nos latitudes crémeuses et le week-end et les vacances. Comme un sage banlieusard, il prend son train à Saint-Lazare entre un rappeur de Mantes-la-Jolie et un docker du Havre. Il va jusqu’à donner l’impression (est-ce seulement une impression?), lui devant qui toutes les portes s’ouvrent, que nulle part il ne se sent mieux que dans la basse vallée de la Seine, dans cet obscur 27, qui, après les fringantes Yvelines et le péage de Buchelay, là où il faut renoncer à tout parisianisme, précède le 76 naguère inférieur, aujourd’hui maritime. Toi qui entres ici, abandonne toute espérance…

Ce fut d’abord, pendant longtemps, presque vingt ans selon les observateurs, à Louviers, la cité drapière, celle de Pierre Mendès France et d’un fameux cantonnier, qu’on le trouva, dans une demeure appelée — cela ne s’invente pas — « la Gentilhommière ». Il y avait ses habitudes : jour- naux, café, marché du samedi. Puis il migra de quelques kilomètres vers le Vaudreuil, petit village à colombages, commune cossue, havre de notaires, d’avocats et de docteurs, patrie des Bovary, terroir de paysans et d’éleveurs, halte de batellerie et paradis des golfeurs. Dans cette vallée rouge ou royale par l’étymologie, où, sans tambour ni trompette il a posé son sac débordant de clubs, il s’est installé. Durablement. Il y a été adopté. Avec intelligence, il a soigné son intégration. Il a su au bon moment partager des verres et des repas. Mais il a agi prudemment, préférant enchanter ses convives d’un récit, d’une anecdote ou d’un bon mot que d’assommer son auditoire des dernières nouvelles du Recueil Lebon. Larvatus prodeo.

Nous autres, ploucs et bouseux de l’ouest lointain, nous en avons été ébahis, abasourdis, éblouis. Sa culture nous a bluffés. Elle est, il est vrai, à la hauteur de la rigueur de ses principes, de ses valeurs, de son attitude : grande et infaillible. Il est incollable sur Guillaume le Conquérant, la reine Mathilde et Richard Cœur de Lion dont il narre l’histoire avec une précision. Chacun combat avec ses armes. Il a favorisé son adoption par son érudition. Il a suscité l’amitié par son amabilité. Il a entretenu la bonne humeur par son bel humour. L’écouter, c’est le comprendre. L’entendre est aussi plaisant que de le lire. Chaque mot est pesé, calibré, formant une pro- sodie parfaite, une mélodie intelligente et cultivée, accessible et enrichis- sante pour un auditoire charmé. L’oncle Paul des belles histoires de Tintin, vous dis-je. En plus campagnard. Et moins coincé.

Il est délicat d’être indiscret avec un homme discret. Aussi n’ouvrira-t-on sa porte qu’en vertu de la certitude que les lecteurs de ses lignes n’ont pour lui que sympathie et bienveillance, respect et reconnaissance. Dans une maison belle et tranquille, dont vous n’obtiendrez pas l’adresse, il travaille tôt le matin, les fenêtres ouvertes de son bureau donnant, depuis un pre- mier étage, sur la nature et un beau jardin. Il y rédige les ouvrages les plus compliqués. Sans s’arrêter. Sans se lasser. Vers un droit public européen qui, pour ne pas prétendre au Goncourt ou au Renaudot, fut un best-seller, a été pensé et rédigé entre ces murs. Cette pièce, sa pièce dédiée à l’étude et à l’écriture, lui offre un cadre calme et propice à la réflexion. Chaque chose y est à sa place. Comme dans son cerveau. Studieux, il y a étudié des kyrielles de dossiers et esquissé des palanquées de jugements. Le justiciable, à notre humble avis, n’en a pas été lésé. Bien au contraire.

Un souvenir plus particulier ? Au pied de la butte du bois Bosselin, vers Saint-Amand-des-Hautes-Terres, se trouvait la résidence de Guy Braibant, dans la vallée de l’Oison. Ensemble, c’est là qu’ils ont travaillé, entre autres, à la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Faisaient-ils chacun la moitié du chemin ou bien alternaient-ils les endroits où ils se rencontraient : tantôt dans le Roumois, tantôt dans les boucles de la Seine ? C’est un secret qu’ils ont gardé et qui ne peut plus se révéler. Un tel rythme, cette belle ardeur à l’ouvrage, ne va pas sans quelques contraintes pour son entourage. Les préoccupations juridiques de Bernard Stirn, à ma connaissance, ne connaissent ni jour férié, ni repos. En rêve-t-il la nuit? Est-il un somnambule jurisprudentiel? Quoi qu’il en soit, pour voir Stirn le Normand, il faut viser l’après-midi. Pour autant, quand sonne l’heure de se divertir, au sens propre, des principes fondamentaux qui régissent l’état de droit et la démocratie, il devient autre. Docteur Bernard et Mister Stirn ? Peut-être. Mais pour le meilleur. Il reçoit. Il bavarde. Il s’enquiert. Prenant beaucoup d’application, beaucoup d’attention, à traiter au mieux, par courtoisie, par éducation, par inclination, invités ou amis, à qui il offre un visage avenant débarrassé par ses soins des traces d’un travail colossal fait ou… à faire. La nuit y pourvoira. À cette masure, entre Seine et Eure que domine, comme il sied, le panache de fumée qui sort d’une cheminée où la flambée a été jetée pour combattre les effets humides d’un climat par trop tempéré et assez atlantique, l’Alma Mater devrait dire sa gratitude. Une plaque pourrait lui être gravée entre Panthéon et Assas : « À la Normandie qui produit tant de jours de pluie où Bernard Stirn s’enferma pour étudier, les facultés reconnaissantes. » Le Quartier latin rendrait ainsi un hommage mérité à la campagne euroise rarement citée comme une contrée du Parnasse ou une terre de pléiade.

Mais n’allez pas croire que cette thébaïde soit celle d’un anachorète enfermé derrière des piles de grimoires et de manuscrits, interdite à la gaité. Dans tout le canton de Val-de-Reuil, l’hospitalité de Stirn est célébrée. Sans franchir les frontières de l’hyperbole, plus fréquente à Marseille qu’entre Rouen et Caen, sa table est vénérée. Parce qu’elle est amicale. Parce qu’elle est amusante. Parce qu’elle est accueillante. On y vante, qui l’eût cru, les barbecues du maître de maison et on se souvient y avoir mangé moult côtes-de-bœuf et bu, avec modération on le promet à la maréchaussée, force côte-rôtie. On peut y gouter la tarte aux pommes qu’il va chercher, pour ses amis ou ceux à qui il souhaite faire découvrir la gastronomie du cru, chez un pâtissier de ses pratiques, la veille des agapes. Lucullus dîne chez Lucullus. Le valdérolien (de fraîche date) aime tant recevoir qu’il a fait aménager un vieux bâtiment attenant pour ses invités. Comment s’étonner, dès lors, qu’on le décrive invariablement comme un homme rare, une personnalité exceptionnelle, un esprit supérieurement intelligent, évidemment, mais aussi, et c’est moins courant, comme un ami fidèle, ouvert, tolérant et curieux, singulier par son empathie, sa simplicité et son goût du partage. Au dernier 14 juillet, alors que je recevais les représentants — venus en nombre — de Danthiady, ce village sénégalais jumelé avec Val-de-Reuil, Bernard passa son après-midi républicaine à deviser avec les uns et avec les autres de la situation de l’Afrique de l’Ouest. Comment s’étonner que parmi ses interlocuteurs d’un jour sortirait l’actuel ministre de la justice de Dakar, Malick Sall. Stirn est une patte de lapin. Il porte chance. Il y a peu, il recevait un jeune sculpteur de ma ville, Romain Reveillac. L’artiste est talentueux. Il est aussi timide. On visite avec appréhension les vivants monuments de la République. Bernard Stirn le mit à l’aise. Il le félicita, l’encouragea, s’intéressa à son style, s’enquit de ses com- mandes et de ce qu’il avait pour vivre, avant de mettre immédiatement à sa disposition un carnet d’adresses comme il s’en compte peu en France, mère des armes, des arts et des lettres. Le successeur de Phidias revint de sa visite enchanté en chantant. Généreux, enthousiaste, curieux, vous dit-on ! C’est ainsi que Stirn est vraiment.

Quant au golf, bien davantage que le principe de subsidiarité ou celui de précaution, c’est sa passion. Elle est dévorante. Elle est envahissante. À l’instant même où Bernard Stirn retire ses habits de conseiller d’État, il les remplace par un uniforme de golfeur eurois (non, non, il ne met pas de chaussures bicolores). Il arpente ainsi sans répit tous les parcours de Normandie à la recherche de celui qui suscitera chez lui la plus forte émotion dominicale.

Cette quête du Graal fut l’enjeu d’affrontements intérieurs, d’inter- rogations cruelles, de tourments secrets qu’aucun tribunal des conflits ne viendra jamais trancher. Une tempête sous un crane. On l’ignore, mais il put en souffrir. Intérieurement. Qu’on juge de l’atrocité du débat : fallait-il jouer sur le parcours écossais, rough, entre plans d’eau et bosquets du Vau- dreuil ou bien sur celui plus récent, plus épuré, plus technique de Léry- Poses qui s’étend sur les terres de Val-de-Reuil ? Fallait-il préférer le 18 trous de la vieille seigneurie et sa convivialité d’après jeu, son club-house, ses voiturettes électriques, ou celui de la Ville Nouvelle, sa modernité, ses lignes pures, ses vues à couper le souffle ? Pour le convaincre de se déterminer pour l’un ou l’autre, les deux maires firent devant lui la danse du ventre n’oubliant aucun des sept voiles qui donnent du piment à cet exercice de séduction. Peine perdue. La Ryder Cup en serait presque devenue une épreuve de sous-préfecture tant les enjeux de cet arbitrage dépassaient les classements individuels, les performances de champions, la classe des compétiteurs. La question n’était pas avec qui jouer ou comment jouer, mais OÙ jouer.

L’équipe de l’ENA, conviée par le local de l’étape, fut ainsi trimbalée, année après année, de l’un à l’autre des sites, sommée de sortir de l’alter- native, chacune des réactions de ses membres auscultée en espérant qu’un choix évident s’en extrairait. On organisa des scrutins par assis et debout, à main levée, par entrée et sortie comme à Westminster, à bulletin secret. Rien n’y fit. On ne parvint à trancher le nœud golfien. Sur l’un et l’autre terrain, Bernard eut beau multiplier les compétitions et les parties en matchplay, en 4-2-0 ou 4 balles. Rien n’en sortit. Aucun signe ne lui apparais- sait tel Moïse puni d’avoir douté en entraînant les Hébreux hors d’Égypte. Il faut dire que, après des négociations feutrées, dignes des plus belles confrontations entre éminents juristes, Bernard Stirn continuait de multi- plier sur le terrain les coups rendus avec élégance et à se distinguer par son fair-play ne parvenant à considérer ses partenaires comme des adversaires. Dans cette atmosphère, comment se décider? Ce n’est pas dans l’enceinte des Nations unies qu’on déclare la guerre. Indifféremment à Val-de-Reuil et au Vaudreuil, des pars, rarement des eagles, alternant avec des bogeys, des doubles et même plus, ne parvenaient à bouleverser son jeu juste et égal. Mais son cœur était déchiré.

Et pour cause : en matière golfique, tout est soumis, comme pour les institutions, à un ensemble de checks-and-balances. Un équilibre multi- dimensionnel neutralisait les avantages respectifs des deux terrains. À l’un le bunker du trois et le fairway du douze. À l’autre le départ du sept et le putting du dix-huit. Arpentant les deux parcours à la recherche de celui qui déclencherait enfin une préférence, un élément nouveau troublait à chaque fois son jugement. Il remarquait le tracé inédit de l’un, la diver- sité de la flore de l’autre, trouvant à chacun des attraits changeants. Com- ment mettre fin à ce dilemme sans devoir en passer par un choix cornélien, solution après tout normale à quelques kilomètres de la ville aux cent clo- chers où naquit le tragédien? Bernard Stirn, cas unique dans sa carrière, n’a pas tranché. On a écrit des milliers de romans là-dessus. Choisir, c’était renoncer.

Notre ami continue donc de promener ses fers et ses bois d’un golf à l’autre, heureux de ne pas s’être condamné à abandonner l’un pour pri- vilégier l’autre, prenant enfin le plaisir coupable de l’hésitation, de l’indé- cision, de l’irrésolution. Si on le torture, il finit même par avouer cette double vie et excipe de sa poche de tweed un abonnement dans chacun des deux clubs. Jouer est pour lui une forme d’ascèse, une école de la vie qui passe par le respect des règles, du terrain, des autres joueurs. Malgré son expérience, il continue de prendre des cours, car en golf il assure qu’on n’a jamais fini d’apprendre et de progresser. Comme en Droit ? Il n’arrive pas à cacher son plaisir lorsqu’il vient de réaliser une bonne performance après une jolie partie. Il n’arrive pas non plus à cacher sa déception dans le cas contraire sans pour autant tomber dans des lamentations inutiles et futiles. Ce n’est qu’un loisir, mais, mais, mais… Parfois le juriste et le gol- feur se rejoignent et certains se souviennent de ce stagiaire de 3e qui ne savait pas que le golf était une régie de recettes de Léry-Poses et qui, téta- nisé et abasourdi, bouche bée, bénéficia, pendant trente minutes au moins, sur cette forme de gestion publique, d’un cours particulier du niveau d’un bon doctorat.

La République doit beaucoup à Bernard Stirn et moi aussi. Je ne vous dirai pas à propos de quoi, mais c’était important et, des centaines d’ex- perts que je consultais, il fut le seul qui me donna une solution concrète et atteignable. Bernard l’intellectuel. Oui, mais Bernard le pratique! La gratitude que lui témoignent ses anciens étudiants, ses collaborateurs et ses collègues est un éloquent baromètre de ce qu’il a apporté au droit français. On n’imagine mal voir se tarir la source des remerciements qui montent vers cette bible vivante, ce passeur de savoir, ce juge intègre, cet homme qui porte sur le monde, ses grandeurs et ses horreurs un regard lucide et sincère. En Normandie, où l’on préfère les faiseux aux diseux, chacun apprécie l’humilité qui lui fait volontairement cacher ou oublier qu’il est à Paris une figure, une pointure et une stature. C’est pour cela que nous l’aimons. Chut, ne lui dites pas. Il croit que nous l’apprécions pour son habileté à golfer.

  1. Paradis du golf.

 

12 OCT 2019

40 ans de l’Association Nelly Marcon, 30 ans du SIEM et du Conservatoire de Musique et de Danse de Val-de-Reuil/Léry/Poses. Retrouvez le discours que j’ai prononcé, samedi 12 octobre, à l’occasion de ce double anniversaire.

Discours de M. Marc-Antoine JAMET

Maire de Val-de-Reuil – Président de la Commission des Finances de la Région Normandie

Quarantième Anniversaire de l’Association Nelly Marcon, Trentième anniversaire du SIEM

et du Conservatoire de Musique et de Danse de Val-de-Reuil/Léry/Poses

Samedi 12 octobre 2019 – 18 heures

Au Conservatoire de Musique et de Danse de Val-de-Reuil

 

Chers amis,

Fêter les trente ans, c’est-à-dire le bel âge, celui de la maturité et de la plénitude, des débuts confirmés et de l’avenir encore possible, tout à la fois du SIEM, du conservatoire, de l’association Nelly Marcon, accompagne ce samedi d’une bien jolie musique.

D’abord, parce qu’il n’est pas courant d’avoir cheminé trois décennies au côté d’une Ville qui n’en aligne pas six. La moitié de notre vie communale, les bons et les mauvais jours, a été rythmée par vos partitions et vos portées. Ensuite, parce que cette célébration permet de retrouver l’atmosphère si particulière qu’avaient su diffuser les pionniers de la Cité Contemporaine, les poseurs de première pierre, les bâtisseurs d’utopie, écologistes avant l’heure, militants engagés, souvent progressistes, qui ont longtemps été la colonne vertébrale, le public et les bénévoles de vos classes et de vos concerts. Ils sont nombreux encore à poursuivre le beau rêve initié avec le Vaudreuil/Ville Nouvelle parmi vous. Ils en font vivre les valeurs, le souffle et le souvenir. Enfin, à titre personnel, je n’oublie pas que le SIEM a été mon premier acte de foi à l’égard de Val-de-Reuil et que, pour m’enraciner dans sa réalité, j’y ai, sur la suggestion de Nathalie Covacho-Bove, siégé au Conseil d’Administration, moi qui ne saurais même pas massacrer un accord, dès 2000, au même moment que, succédant à un truculent chauffeur de taxi portugais, je décidais de louer une maison au 27, voie de Bas.

S’il faut dresser un constat, je crois avoir été plus que fidèle à ceux qui m’ont accueilli :

  • En leur donnant les moyens de leur fonctionnement et, alors même que la Ville s’enrichissait d’autres institutions culturelles, maison de la poésie ou théâtre de l’Arsenal, en augmentant régulièrement la subvention annuelle du SIEM, puis du conservatoire, qui s’élève aujourd’hui à 500.000 euros, évolution rendue possible par le retour à une situation budgétaire toujours tendue, mais plus normale dans sa gestion à partir de 2001. C’est cette politique qui a permis votre existence et votre essor. C’est un soutien qu’un euphémisme qualifierait de non négligeable, que certains nous reprochent, qui n’est pas proportionnel aux contributions plus limitées de nos voisins lérysiens et posiens, que j’assume, dont je suis fier et que, je l’espère, chacun apprécie à sa juste valeur.
  • En abritant l’école de musique dans un vrai lieu, l’ancien Collège Alphonse Allais, conquis de haute lutte et par la ruse, sur le département, domiciliation généreuse en espaces et en fonctionnalités qui mit fin à une cohabitation peu opportune avec l’école Coluche dont les petits locataires ne savaient plus s’ils étaient écoliers dans la journée ou musiciens dans la soirée et dont la direction exigeait, sur l’air des lampions, le retour des mètres carrés imprudemment cédés. Nous devrions d’ailleurs donner un nom à ce bâtiment que nous mettons, avec ses fluides et son entretien, à votre disposition.
  • En allant chercher auprès de la région, avec les dents, il n’y a pas d’autres mots, les crédits nécessaires à la construction des studios de musique actuelle.
  • En vous aidant, auprès du Ministère de la Culture, qu’il s’agisse de la DRAC ou de la rue de Valois, à obtenir le statut qui est aujourd’hui le vôtre, celui prestigieux de Conservatoire, et que ne possèdent pas, par exemple, vos concurrents et amis de Louviers ou de Pont-de-L’arche.

Ces efforts, il faut avoir l’honnêteté de les appeler ainsi, ont porté leurs fruits. Alliés à votre talent, à votre énergie, à vos idées, ils vous ont fait gagner, paisiblement, sans aucune volonté d’hégémonie, respectabilité, renommée, durabilité, attractivité, diversité, stabilité et succès. Cette vérité doit être rappelée. Il serait presque étrange que je ne me plie pas à cette obligation. C’est une histoire belle et exemplaire. Nul n’a intérêt à s’en affranchir.

Je m’y réfère de manière d’autant plus spontanée que, en retour, vous avez beaucoup apporté à la commune et à la municipalité.

Vous avez amplifié, par votre localisation, au cœur de la dalle et face à Alphonse Allais, l’un de nos deux collèges avec Michel de Montaigne, par votre recrutement et par votre activité, le mouvement de mixité géographique et de paix sociale que nous avions impulsé. Des adultes faisant du violoncelle, des enfants qui dansent, des orchestres, des solos, des master class, tout ceci a fait reculer, combiné avec les effets favorables de l’ANRU, les voitures qui brûlent et les dealers qui empoisonnent.

  • En montrant les bienfaits de l’intelligence et de la culture, de l’apprentissage et du partage, de l’éducation collective et de l’épanouissement individuel, du plaisir et de la note juste, vous avez contribué à faire reculer les grands dangers que nous devrons affronter, ensemble je le souhaite, en mars prochain, le communautarisme, le fanatisme, l’égoïsme et l’extrémisme.
  • En participant à l’animation de la cité, en transformant sa réputation, et je songe aux représentations de votre orchestre symphonique, au programme éclectique de vos spectacles qui remplissent les églises de Poses et de Léry, à des formes plus inattendues et plaisantes, pour le sexagénaire que je suis, comme le récital donné, le printemps dernier, à la Maison des Jeunes et des Associations, en hommage aux Doors, vous contribuez à faire de notre commune un endroit gai et vivant, un territoire où il se passe quelque chose après 20 heures et le week-end, le contraire d’une cité dortoir, mais plutôt une petite capitale culturelle, qui, en Normandie, s’amuse à courir devant Vernon et Évreux, mordillant les mollets de Caen, du Havre et de Rouen, géants éberlués de voir l’audace de ce petit poucet.
  • En offrant un complément d’éducation à nos enfants, en diffusant la culture de l’harmonie, des instruments, du solfège et du chant, dans nos sept groupes scolaires, ce dont les petits devenus grands se souviendront éternellement.

Je pourrais poursuivre longtemps l’énumération de vos mérites et chanter les louanges de notre union. Le bilan n’est cependant pas uniquement positif. C’est presque rassurant. Notre partenariat prouve que la perfection n’est pas de ce monde. Il y a des progrès à faire que je ne voudrais pas voir accomplis – je suis exigeant – par lassitude ou simple bonne volonté. Le moteur de notre alliance laïque est différent. Vous avez, à mes yeux, des devoirs qu’impliquent la reconnaissance individuelle et la responsabilité collective vis-à-vis de la commune, une éthique du service public et une pratique de la République. C’est le rôle d’un maire de les rappeler.

Premièrement, pour être efficaces et économes, il nous faut mieux et davantage échanger lorsque se construisent les budgets. Si la Ville se serre la ceinture pour répondre à l’austérité des temps, le conservatoire ne peut déboutonner sa chemise pour se mettre à l’aise. Fort heureusement, vous avez à votre Conseil d’Administration le meilleur des hommes, notre adjoint aux finances, Jean-Jacques Coquelet, qui s’efforce de faire converger les divergences. Malgré sa vigilance et son dévouement, il en demeure qui me choque de temps en temps. Inversement, c’est ensemble que nous devrions plus souvent sortir de la tranchée rolivaloise pour aller chercher mécénat et argent.

Deuxièmement je ne peux faire l’impasse sur certaines inégalités territoriales. Il faut prendre conscience des réalités. Dans notre voisinage immédiat, il est des collectivités riches et opulentes qui sont ravies de profiter des possibilités du sport, du social, de la sécurité, de l’emploi, de l’industrie, des transports, de la culture qu’on trouve à Val-de-Reuil, mais se refusent quand on parle d’associations, de personnes dépendantes, de club de football, de commissariat, d’épicerie sociale ou de conservatoire à payer leur écot. On ne peut fermer les yeux à l’heure des arbitrages sur cette situation scandaleuse. Val-de-Reuil est la 14èmeville la plus pauvre de France. Les plus misérables ne peuvent payer pour les plus favorisés. C’est contraire à la morale, à la logique et aux convictions de ceux à qui le suffrage universel a confié le mandat de servir les intérêts des Rolivalois. Je pratique, moi-même, trop souvent, le pardon des offenses. Mais de là à tendre la joue droite, quand on m’a frappé la gauche…

Troisièmement, il faut à la musique s’impliquer davantage dans le quotidien municipal. C’est la juste contrepartie de notre bienveillance réciproque. Elle doit s’élever, parfois, pour devenir coopération. On ne peut ignorer notre amertume à chaque fois que nous allons à Workington, en Angleterre, à Sztum, en Pologne, à Ritterhude en Allemagne, lorsque nous voyons des formations musicales comparables aux vôtres, participer aux festivités, aux cérémonies, aux compétitions, donner un écho local aux grands moments de la vie de la Nation. Il ne s’agit pas de vous métamorphoser en majorettes. Il s’agit de s’entraider. Même si certains indices laissent penser que les choses s’améliorent et je vous en suis redevable, nous n’avons pas, ici, ce réflexe et je le regrette… Entre conservatoire et mairie grande autonomie oui, totale indépendance non.

Le temps passe et beaucoup ont parlé. Il me faut conclure.

Je citerai pour mémoire la difficulté que représente le mille-feuilles juridique et administratif que, avec beaucoup d’originalité, chacune de nos institutions culturelles a su bâtir : associations, établissements publics, compagnies privés se superposent. Un peu de simplicité et de transparence ne feraient pas de mal à tout cela.

Enfin, et ce sera le dernier voeu que j’adresserai au génie de la lampe, c’est avec vos pairs que je souhaiterais voir la situation évoluer. J’avais appelé, voici six mois, à la réunion d’états généraux de la culture à Val-de-Reuil. Ils ne voient pas le jour. Reconnaissons-le : personne ne s’est précipité. J’avais parlé de mutualisation d’agents, de matériels, de salles. On en est loin. Chacun change toujours une lampe avec son échelle dans son coin. J’avais espéré dialogue et synergie dans la constitution des programmations. J’en ai été pour mes frais. Othello de Shakespeare au théâtre ne verra pas Otello de Verdi cité au conservatoire ou Othello d’Orson Welles repris au cinéma, pas plus que la maison de la poésie ne listera les vers consacrés au Maure de Venise. Je le déplore. Le Festival du Caméléon en a, d’une certaine façon, payé les pots cassés. Il aurait dû être le volet musical de l’Arsenal. Je reconnais que vous en avez surtout été les victimes et que vous n’en êtes pas entièrement coupables.

Maintenant et quoi qu’il en soit, je sais ce que je vous dois, de même que les rolivalois. Ces vœux, même s’ils sont francs, n’enlèvent rien à l’admiration que je vous porte. Combien d’heures agréables et d’actions menées à bien, d’émerveillements et d’enchantements ! Je veux remercier Vincent Grandserre et, vous tous, sa valeureuse équipe de porter ce conservatoire sur leurs épaules, 365 jours par an, de diffuser l’œuvre de Mozart, Bach et, puisque j’étais à Londres ce matin, les Beatles, de donner une maison et une vocation à des centaines d’élèves qui ne deviendront pas tous des virtuoses, mais seront grâce à vous et à l’art de meilleurs humains, de déplacer des chaises, des praticables et des projecteurs, des violes de gambe, des pianos à queue et des guitares électriques. Je salue Chantal Mégange, présente il y a quatre semaines à la fête de la Ville, qui, à Val-de-Reuil, est toujours un peu directrice de tout et qui, aujourd’hui, dirige nos goûts et nos loisirs vers le beau. Longue vie à l’association Nelly Marcon. Longue vie au SIEM. Longue vie au Conservatoire de musique et de danse de Val-de-Reuil.

4 SEPT 2019

La rentrée des classes 2019 à Val-de-Reuil, c’est + d’élèves, de classes, d’enseignants, + de moyens, de numérique, d’activités. Demain, ce sera encore « plus d’école » parce que l’école c’est l’apprentissage de la vie, du travail et de la République !

4 SEPT 2019

On ne peut plus continuer comme cela ou pourquoi j’ai pris un arrêté anti pesticides illégal.

On ne peut plus continuer comme cela ou pourquoi j’ai pris un arrêté anti pesticides illégal.

La taille des catastrophes naturelles ou humaines qui frappent notre Terre n’a cessé d’augmenter, leurs conséquences pour l’avenir de s’aggraver, le calendrier pour y répondre de se raccourcir. A l’annonce, désormais « classique », que les derniers mois d’été ont été les plus chauds depuis que la température en est mesurée, se sont ajoutées, récemment, d’autres nouvelles encore plus préoccupantes : la disparition ou presque de la banquise arctique, le dégel progressif du permafrost en Sibérie dégageant d’énormes quantités de CO2, les incendies de la forêt amazonienne, château d’eau du reste de l’Amérique du Sud vers laquelle elle envoie pluies et nuages, mais aussi l’embrasement des futaies de l’Europe du Sud, de la Russie, de l’Afrique, l’élévation de la chaleur des  océans, singulièrement de celui qui entoure le Groenland passé en juillet de 4 à 21°. La liste serait longue si elle devait être complète. Nous allons dans le mur.

Devant cette situation dramatique, dans le prolongement de la COP21 et de l’accord de Paris que les États-Unis de Donald Trump ont refusé d’appliquer, le G7 de Biarritz, sous l’impulsion du Chef de l’État a, enfin, été le lieu et le moment pour les dirigeants des pays les plus riches de la planète de prendre conscience que des phénomènes irréversibles étaient en train de se produire, qu’ils avaient, aujourd’hui, la solution, si ce n’est pour y remédier (en est-il encore temps ?), du moins pour atténuer les effets de désastres qui, si rien ne change, se produiront immanquablement dans dix, vingt, trente ans… Qui voudrait porter la responsabilité de léguer à nos enfants, à nos petits-enfants, un monde condamné à subir pendant dix, vingt, trente journées, des canicules de plus de 50° ?

S’il est bon que le sort du Brésil et le réchauffement climatique mobilisent les bonnes volontés, car ce qui s’y passe a des prolongements économiques ou sanitaires bien au-delà de Brasilia, Sao-Paolo ou Rio, il serait illogique de détourner les yeux de notre Normandie. Moins d’insectes, moins d’abeilles, moins d’oiseaux. Pollinisation, diversité, équilibres, tout ce à quoi ces espèces étaient utiles, remis en cause. Des campagnes devenues silencieuses. Il y a un responsable à cette situation : le recours illimité aux pesticides. Ceux qui ont, un jour, traversé l’épais nuage qui accompagne chaque épandage se souviennent de la quinte de toux qui, pendant quelques minutes, les a secoués. Des prélèvements, qui viennent d’être rendus publics, effectués sur une centaine de femmes et d’hommes habitant dans une région proche, sur un territoire qu’on pensait jusqu’alors préservé, Belle-Île, laissent apparaître des concentrations de poison plus de dix fois supérieures à ce qui est admis dans l’eau des rivières.

C’est pourquoi, le jour où le Tribunal administratif de Rennes annulait l’arrêté de mon collègue de Langouët, j’ai décidé de prendre exactement le même. Le Préfet de l’Eure vient de m’annoncer – courtoisement – que je devais le retirer. J’ai évidemment refusé. Il sera donc déféré devant la juridiction compétente. Il est des circonstances, comme le refus du contournement Est de Rouen, le respect de l’identité municipale, la préservation de la laïcité, où il est honorable de passer devant un juge quand bien même votre cause serait-elle perdue d’avance. J’entends, moi-même magistrat, que chacun ne peut faire sa Loi. Mais il appartient aux citoyens de résister. On a – parfois – raison de se révolter. Chacune de nos décisions municipales devrait avoir maintenant une dimension écologique ou environnementale. C’est une obligation. C’est une nécessité. C’est un impératif.

En rejoignant les autres élus qui avaient pris la même décision que moi, je n’ai pas voulu montrer du doigt les agriculteurs. Ils se donnent énormément de mal dans des conditions financières et réglementaires difficiles. Ils font un métier admirable. J’éprouve du respect pour le monde paysan. Il nous nourrit. Il travaille dur. Il entretient nos paysages et évite leur désertification. Il fait vivre nos départements et nos villages. Il est indispensable. Toutefois, il paraît céder à la facilité quand il achète sur les étagères de Monsanto ces produits toxiques dont ses représentants peuvent être les premières victimes. D’autres méthodes existent, plus longues, plus coûteuses, plus délicates, certes, mais qui sont l’avenir. Outre la préservation, voire l’amélioration, de l’état de santé d’eux-mêmes, de leur famille et de ceux qui habitent à proximité de leurs exploitations, en adoptant ces alternatives que l’INRA, par exemple, étudie avec succès, nos agriculteurs se créeraient, demain, un nouvel avantage comparatif par rapport à leurs concurrents mondiaux favorables aux cultures extensives, une plus-value biologique qui favoriseraient les circuits courts et augmenteraient leurs marges, une renommée et une qualité qui les mettraient en position de force pour être entendu face à Bruxelles, rembourser leurs emprunts aux banques, négocier avec la grande distribution, relancer leurs exportations. Mon propos ne comporte absolument aucune agressivité, aucun ressentiment à l’égard de cette civilisation rurale sur laquelle s’appuie l’histoire de France. Au contraire.

En revanche, ma démarche se veut un électrochoc, une alarme et une alerte. Information et sensibilisation sont mes objectifs. Je ne suis pas un khmer vert, un compagnon des premiers jours de José Bové, un tenant de l’écologie punitive, mais notre manière de vivre atteint ses limites. La terre dont nous aspirons, non plus les richesses, mais les réserves, s’épuise. Ma conversion est tardive. Je le reconnais. Je pourrais prétendre que cette évolution est celle de la maturité. C’est – surtout – celle d’un constat : celui de la réalité. Je suis né sur une planète qui hébergeait deux milliards d’êtres humains. Dans deux décennies, elle en comptera onze. Il faut changer nos comportements. Immédiatement. Être insouciant ou indifférent, sauf à se complaire dans le cynisme ou l‘égoïsme, n’est plus possible. Dès 2006, plus de 10 ans avant qu’une loi n’interdise aux collectivités – sur l’ensemble du territoire national – l’utilisation de produits phytosanitaires sur le domaine public, Val-de-Reuil, la plus jeune commune de France, s’était engagée dans une démarche exemplaire et innovante en renonçant à utiliser ces produits chimiques sur tus les espaces publics. L’arrêté que j’ai pris, interdisant l’usage des pesticides, va dans le même sens. Le bon sens. J’espère qu’il suscitera un effet d’entraînement qui tourne à l’effet de masse. On me dit que nous serions une soixantaine de maires à avoir eu un geste semblable. Il en reste 36000 à convaincre de nous suivre.

2 AOUT 2019

Grand passage des gens du voyage à Val-de-Reuil, ça suffit : la Ville exige de l’État une réaction rapide et de l’Agglomération Seine-Eure l’aménagement sans délai d’une aire d’accueil adaptée

Grand passage des gens du voyage à Val-de-Reuil, ça suffit :

la Ville exige de l’État une réaction rapide et de l’Agglomération Seine-Eure l’aménagement sans délai d’une aire d’accueil adaptée

 

Mardi 30 juillet, à la mi-journée, pour la quatrième fois en deux mois, plus de 300 caravanes appartenant à des « gens du voyage » ont forcé, en plusieurs points, grâce à des engins de chantiers loués, le dispositif de sécurité mis en place par la Ville, à la limite du Vaudreuil, autour du Parc Sud. Ce sont ainsi 800 personnes qui se sont introduites, sans droit ni titre, sur un terrain appartenant à la commune. Cette situation devenue insupportable pour les riverains et les usagers de cette aire de promenade particulièrement fréquentée a amené la municipalité, qui partage l’exaspération et comprend la colère des habitants face à la multiplication de ces nuisances, à réagir avec rapidité et fermeté. Une fois de plus, une fois de trop, l’Agglomération, indifférente aux obligations liées à ses compétences, se mure dans le silence, ne respecte pas ses engagements et se réfugie dans l’inaction. Seine-Eure est en vacances ou bien aux abonnés absents. La Ville condamne cette attitude irresponsable.

Dès mardi midi, la Ville a donc demandé au Préfet de l’Eure et au Procureur de la République de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux et, dans un délai de 24 heures si cette procédure n’était pas suivie d’effets, de recourir à la force publique. Ce jeudi, le Maire, Marc-Antoine Jamet, accompagné de Dominique Lego, Adjoint en charge de la sécurité, s’est rendu sur place pour rencontrer les responsables du campement et exiger son démantèlement immédiat. Il leur a été indiqué que la commune ne pouvait faire face à une augmentation brutale de 5% de sa population, laisser des feux allumés à même le sol pour la cuisson dégénérer en incendies, des latrines improvisées le long de l’Eure, des branchements électriques sauvages et dangereux, des stades dévastés par la circulation des véhicules. Quelle commune de France pourrait supporter cela ?

Après une heure de négociations, et devant le refus d’obtempérer des intéressés, le Maire de Val-de-Reuil a interpellé le Préfet, par l’intermédiaire du Secrétaire Général de la Préfecture de l’Eure, Jean-Marc Magda, pour lui demander d’intervenir dans les meilleurs délais. Dès la nuit suivante, les agents de la Police Nationale ont effectué des rondes aux abords du site pour contrôler identités et véhicules. À 10h30 ce matin, le Secrétaire Général de la Préfecture et le Directeur Départemental de la Sécurité Publique, Bernard Le Hir, se sont rendus à Val-de-Reuil pour ordonner l’expulsion des caravanes. Les négociations se poursuivent actuellement.

Si la Ville tient à saluer la réactivité avec laquelle la Préfecture et les forces de l’ordre ont répondu aux sollicitations de son Maire, elle en attend les résultats concrets. Elle s’inquiète, une fois encore, du manque d’effectifs de Police affectés à Val-de-Reuil pour remplir cette mission. Aucun rapport de force crédible, sérieux et efficace ne pourra être engagé avec les occupants tant que 50% des effectifs d’un commissariat qui comptait 110 fonctionnaires à l’origine resteront manquants.

Par ailleurs, depuis deux ans, devant la répétition de ces intrusions, la municipalité n’a cessé d’interpeller l’Agglomération pour qu’elle respecte les engagements pris devant l’État de mettre à la disposition des gens du voyage, pour leurs « grands passages », un terrain d’accueil capable d’absorber, dans la dignité, le nombre croissant de personnes en itinérance sur son territoire. Un terrain, situé dans le parc de Saint-Pierre, a bien été identifié. Mais l’agglomération a oublié d’y effectuer les aménagements permettant son alimentation en eau et en électricité et se refuse à les faire. L’Agglomération, au prétexte sophistique que cette nouvelle aire n’empêcherait pas les gens du voyage de continuer à occuper illégalement le Parc Sud ou qu’elle créerait une augmentation de la fréquence des grands passages sur le territoire intercommunal, préfère l’attentisme au pragmatisme. D’un point de vue juridique, politique et pratique, cette position absurde est révélatrice soit d’une absence de vision, soit d’un manque de volonté soit d’un défaut de capacité de l’Agglomération.

Juridiquement, il revient à la charge de l’intercommunalité, dans le cadre d’un schéma départemental d’accueil des gens du voyage, de mettre à leur disposition, notamment en vue des périodes de grand passage, des terrains aménagés. C’est leur droit le plus strict. Lorsque l’on prétend respecter les gens du voyage, leur mode de vie, leurs traditions, il est du devoir des élus à qui incombe la responsabilité de cet accueil de mettre en œuvre les moyens les plus adaptés. Tant que l’Agglomération continuera à ne pas assumer réellement cette compétence, elle donnera aux occupants l’argument de droit qu’ils attendent pour continuer à s’installer dans des espaces publics sur lesquels il leur est interdit de stationner. Sans doute faudrait-il que le parking de sa pharaonique place Thorel, morne plaine minérale, dispendieuse et dispensable, subisse les mêmes assauts, les mêmes dégradations pour que se réveillent enfin sens du devoir et bon sens chez le Président d’Agglomération, sur d’autres sujets moins pusillanime, mais qui, ici, ne dit mot et fait le soliveau.

Politiquement, il revient à l’Agglomération la responsabilité d’engager les actions qui structurent l’ensemble de son territoire. Pourtant, sur un dossier qui concerne aussi bien les habitants de Pont de l’Arche, des Damps et de Val-de-Reuil, aucun soutien ne s’est manifesté, aucune disposition n’a été prise, aucune mesure d’ordre public n’a été décidée pour que cessent des troubles qui nuisent directement à la population, perturbent le voisinage, nécessitent des réparations dont la charge est entièrement assumée par les communes. Combien de terrains hors d’usage, d’eau et d’électricité dérobés, d’espaces verts détériorés faudra-t-il compter pour que l’Agglomération daigne débloquer les 70.000 euros nécessaires à l’aire d’accueil de grands passages à l’intérieur d’un budget qui s’élève chaque année à plus de 140 millions d’euros. C’est ce que l’on appelle parfois la bonne gestion. L’Agglomération s’en éloigne chaque jour un peu plus par ses indécisions.

La Ville invite donc les dirigeants de Seine-Eure à sortir de leur torpeur et réclame, sans délai, que les aménagements du terrain identifié pour accueillir les gens du voyage lors des grands passages soient réalisés. Au cœur du mois d’août, il existe des sujets de préoccupation plus décisifs que de préparer l’inauguration d’une patinoire. Nos administrés attendent des collectivités sécurité, proximité et efficacité. L’Agglomération doit enfin l’entendre et accompagner, lorsqu’elle en a la compétence, les communes à assurer ces missions essentielles. Au cas présent, après le désintérêt pour la fermeture du Guichet SNCF de la gare intercommunale de Val-de-Reuil, après l’inertie devant les difficultés du commissariat de la circonscription, assez c’est assez. L’indifférence aux nuisances et aux incivilités que subissent notamment les habitants de Val-de-Reuil et du Vaudreuil n’a que trop duré.

 

 

 

 

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