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24 NOV 2022

À l’invitation de mon ami Matthias Vincenot, j’introduisais, depuis le Théâtre Rouge du Jardin d’Acclimatation, la remise des prix de « Poésie en Liberté »

Discours de M. Marc-Antoine JAMET

Secrétaire Général du Groupe LVMH

Théâtre Rouge du Jardin d’Acclimatation

Remise des prix de « Poésie en Liberté »

Lundi 21 novembre 2022 à 19h00

 

Mesdames et Messieurs,

Le métier de secrétaire général de LVMH est assez peu poétique. On en conviendra sans peine et j’en administre par mon costume gris, ma chemise blanche et ma cravate éteinte, la triste preuve. Mon emploi, qui relève de la tragédie plus que de la comédie, consiste, en effet, à vendre des sacs à main, des rouges à lèvres et des bouteilles de champagne. J’en suis fier, mais cela m’éloigne du Parnasse. Je dois donc l’avouer : mon activité est un peu triviale. Il me permet cependant de vous accueillir dans cette salle du Théâtre Rouge du Jardin d’Acclimatation, concession de service public que la Ville de Paris a confié au leader mondial du luxe. A défaut de taquiner la muse, je nourrirai ce soir ses adorateurs.

Mais là aussi, je crains que nous commettions un terrible impair. Certes, ce parc est synonyme de littérature. Anatole France et Marcel Proust le fréquentèrent. Tant est si bien que, alors que nous célébrons cette année le centenaire de la mort de son auteur, après salué l’année dernière le cent-cinquantième anniversaire de sa naissance, il est cité à plusieurs reprises, privilège insigne, dans « La Recherche ». Davantage du côté des Guermantes que de celui de Swann, reconnaissons-le. Évidemment, ce parc est musical. Ravel et Debussy composèrent dans ses allées. Mais est-il poétique ? L’Histoire s’y oppose. Ses fondateurs, Napoléon III et l’Impératrice Eugénie, avec ou sans Prosper Mérimée, furent les adversaires du plus grand poète français, du proscrit de Jersey et Guernesey, de la légende de son siècle, de Victor Hugo.

Celui qui nous réunit, Matthias Vincenot, dans sa très grande mansuétude, a décidé néanmoins de passer outre. Au nom de l’amitié. Il dit me connaitre depuis 20 ans. Je le fréquente depuis 35. Les poètes savent rester jeunes. Stagiaire, récipiendaire, professeur à la Sorbonne et poète, je l’ai vu, au fil des décennies, n’avoir qu’un combat, ne défendre qu’une cause, en relever sans cesse le drapeau : celui de la poésie. Je l’en admire. Il est des engagements moins complexes et moins difficiles. Il y est pourtant fidèle. C’est un militant poétique.

Je suis donc très heureux qu’il m’ait invité à introduire cette soirée consacrée à la poésie. Je suis cependant inquiet de mon discours qui, sur un sujet trop élevé pour que je le maîtrise correctement, aura sur vous l’effet d’une dissertation de collège auprès de son correcteur, voire d’une camomille à la fin d’un repas dominical. Au premier rang de ce théâtre, je devine d’ailleurs des visages sévères, quelques rides et des cheveux blancs. Ce sont les membres du Jury. Ils sont impressionnants, même si j’y reconnais Jérôme Clément. Heureusement, derrière eux, j’aperçois la foule avenante des 15/25 ans que vous allez bientôt récompenser. Ils sont enthousiasmants.

Je souhaite évidemment que, galvanisé par leur exemple, leur mobilisation, notre rassemblement éveille un intérêt plus vif, plus large, plus grand, un intérêt quasi olympique pourrait-on dire à la veille des jeux de Paris, pour les poètes et pour leurs œuvres. Ce serait chose utile. Je n’imagine pas plus que vous un monde sans poésie et sans poètes. Si la preuve que le pudding existe, c’est qu’on le mange, la preuve que la poésie est vivante, qu’elle est actuelle, qu’elle est nécessaire, ce sont d’abord les poètes.

Nous en avons de bons et de grands, aimés bien au-delà de nos frontières. Je pense à Aragon. Que serions sans lui qu’un « cœur au bois dormant » ? Nous en aimons aussi venus d’ailleurs. Je songe à Nazim Hikmet dont ma mère avait affiché l’autobiographie dans sa chambre : « à trois ans, je fis profession de petit-fils de pacha ». De jeunes talents, ceux à qui vous allez remettre vos prix en témoignent et continuent d’apparaître. Ainsi va la relève, qui ne remplace personne, mais qui, à son tour, fait œuvre neuve. Vous êtes, chers mais, la garde montante.

J’ai dit que votre initiative était utile. Les poètes ne sont pas assez lus, quoique les tirages d’aujourd’hui eussent fait envie, de leur vivant, à Baudelaire et à Rimbaud. Il n’en demeure pas moins qu’il y a trop peu d’équipements, trop peu d’accompagnements pour les soutenir. Peu d’éditeurs, peu de structures pour les diffuser. J’ai la chance d’abriter dans la Ville dont je suis le Maire, en Normandie, à Val-de-Reuil, la plus jeune commune de France, une Maison de la Poésie. Elle est unique en Normandie. C’est une oasis dans un désert. C’est pourquoi, il faut aider non seulement la création, mais aussi l’édition et la diffusion des œuvres poétiques. C’est que nous faisons ensemble… Nous avons raison. Les auteurs et les autrices sont de plus en plus nombreux. On assiste dans la poésie au foisonnement des écritures et des idées. Il faut les faire connaître et reconnaître.

La poésie, toutefois, est un art mystérieux. Il faut l’apprivoiser. Elle évoque tous les sentiments et tous les stades de la vie. Elle dit l’amour et la mort, la vieillesse et l’enfance. Elle nous berce paradoxalement de la misère humaine. Elle vante la précarité universelle, celle de l’existence, de la sincérité, de la confiance. Elle est gravité et légèreté, joie et tristesse, nostalgie et folie. Elle fait parler les animaux et chanter les mots. Ce faisant, elle enchante. Même ceux qui ne la lisent pas. Elle est innovante et éternelle, improvisée et encadrée, spontanée et formelle. De René Char qui définit le poème comme « un bout d’existence incorruptible » à Aimé Césaire pour qui la poésie est «  le battement de la vague mentale contre le rocher du monde« , on en revient toujours à cette idée la poésie prépare « à un rêve partagé qui ne serait plus solitude« .

Il est vrai que la poésie, lorsqu’elle est juste, atteint à l’essentiel. Elle va droit au cœur de ce qui est. Elle dit tout ce qui pourrait être. Elle est le « modeste violon « de Verlaine. Elle évoque avec Ronsard « l’éphémère parfum des roses ». Elle est messagère d’espoir, de liberté, entendue dans les périodes et dans des temps ou des lieux où d’autres paroles sont muselées. Elle reste après que tout a disparu, après que ceux qui l’ont composée nous ont quittés. « Longtemps, longtemps après que les poètes ont disparu, leurs chansons courent encore dans les rues ».

On n’imagine pas pouvoir un jour s’en passer. On ne se résigne pas à ce que tous n’y aient pas accès. Elle est rétive aux approches superficielles, aux engouements éphémères, aux modes orchestrées. Elle exige du lecteur qu’il fasse lui-même un bout de chemin et, de préférence, obtienne le silence autour de lui, peut-être même en lui. De l’éthique du poète à la pratique du lecteur, des correspondances s’établissent.

Elle est un antidote au bruit et à la fureur. Elle plaide pour la paix et exclue le fracas de la guerre. Dans un monde de plus en plus virtuel, elle plonge au cœur du réel. Dans une société des écrans et de l’instant, elle ralentit charnellement le temps. Dans une époque qui consacre trop souvent la futilité et l’accessoire, elle touche à l’essentiel, au sens et au partage.

Il est rare de citer François Mitterrand dans un festival de Poésie et, pourtant, c’est avec lui que je voudrais conclure. Le chat de Château-Chinon disait voici 35 ans, des mots qui me vont puisque je suis devenu, voici une semaine, pour la première fois grand-père. : « J’en ai pris le goût jeune, en cet âge – l’adolescence – qui est le temps de l’éveil des curiosités, des interrogations. Et je voudrais, si le poète, comme on l’a dit, est le dernier habitant de son enfance, qu’il fût aussi, très tôt, le compagnon de nos enfants. »

24 NOV 2022

Au nom du Ministre de l’Éducation Nationale, comme Président du Centre National de l’Enseignement à distance (CNED), j’ai eu le plaisir de remettre à Céline Blugeon, sa Secrétaire Générale, les insignes de Chevalier dans l’Ordre des Palmes Académiques

Remise des insignes de Chevalier dans l’Ordre des Palmes Académiques

A Mme Céline Blugeon, Secrétaire Générale

du Centre National de l’Enseignement à distance (CNED)

par M. Marc-Antoine Jamet, Président du CNED

Chasseneuil-du-Poitou – Lundi 14 novembre 2022

 

 

 

Madame la Secrétaire Générale, chère Céline Blugeon,

Au cours des 25 années de « services » que vous avez données à la France et à son administration, vous avez probablement tout connu, grèves, virus, intempéries, déficits calamités, mais c’est à un tout autre danger que vous allez devoir faire face : celui de voir défiler les étapes de votre jeune carrière devant vos pairs avant de subir les approximations et les raccourcis, pour ne pas dire les erreurs, de mon éloge.

Vous avez été étonnée que je revendique l’honneur de prononcer ce discours. Vous ne vous attendiez pas à ma présence vespérale et poitevine. Pourtant, bien des choses nous rapprochent, au-delà de notre cantonnement géographique autour sur le petit côté de la table de la conseil d’administration, ses grands espaces étant réservés aux tutelles et aux organisations syndicales. Certes, ces points de convergence ne sautent peut-être pas aux yeux, tant je suis un vieux barbon et vous une éclatante jeune femme, mais il n’est pas si difficile d’en dresser la liste.

Je ne parlerai pas de notre goût partagé pour les plages atlantiques d’Oléron, le long desquelles vous marchez, ou pour les souks de Marrakech, dont la fréquentation, avec ou sans drone clandestinement introduit par un de vos fils au nez et à la barbe des pandores locaux, n’a pas d’équivalent pour mieux maîtriser les éléments fondamentaux des finances, de la comptabilité et du commerce. A se demander si cela ne fût pas un complément de formation pour atteindre l’excellence dans votre métier.

Je mentionne ces destinations chères à votre cœur et nécessaires à votre repos pour mémoire, car elles ont peu à voir avec la réunion amicale qui nous rassemble autour de vous ce soir. Non, il me faut parler de choses définitivement et totalement sérieuses, massives, rébarbatives, monolithiques, ce que Paul Claudel appelait les « travaux ennuyeux et faciles », qui sont en réalité passionnants et complexes.

D’abord, notre dévouement pour les finances publiques, leur exactitude, leur honnêteté, leur rigueur, tous les deux ayant agi en grande complémentarité, sans la savoir, vous dans les réseaux du Trésor Public, moi à la Cour des comptes.

Ensuite et évidemment le CNED, cette vieille dame que le digital et le besoin de formation doivent rajeunir, pour laquelle nous avons attachement et respect, à laquelle nous avons donné, vous énormément, moi beaucoup moins, tant de temps et d’énergie.

Notre titre professionnel, également, de Secrétaire Général qui n’est pas toujours d’une très grande transparence, ni d’une très grande homogénéité, vous dans le service public, moi dans l’entreprise privée, qui, certes, impressionne nos interlocuteurs, mais permet, hélas, à nos supérieurs de nous donner à faire tout et n’importe quoi.

L’ordre des Palmes académiques, enfin et surtout, puisque le fait que j’y appartienne depuis plus de trente ans, comme mon père et ma mère avant moi, et mon grand-père avant eux, me permet d’avoir le plaisir, l’honneur et l’avantage, non seulement de vous y faire entrer, après d’autres membres de votre famille m’avez-vous confié, mais de prononcer ces mots qui saluent votre engagement sans faille au sein de cette communauté éducative à laquelle ont la fierté d’appartenir une large majorité de ceux qui nous écoutent, et vous assurent de la reconnaissance de l’institution scolaire comme de la Nation tout entière.

C’est donc un bon moyen, un beau moyen de rappeler, devant vos amis et collègues ici réunis, quand bien même en seraient-ils déjà convaincus, que l’école, le savoir, la culture et la science, la mission d’éduquer, d’apprendre aux autres, de transmettre une instruction, un enseignement et une éducation, est fondamentale, qu’elle devrait, si on se hasarde à faire un peu de politique, être mieux valorisée, mieux appréciée et mieux récompensée dans notre société au sommet de laquelle trônent trop exclusivement start-ups, promoteurs, cabinets de conseil et, allusion à une actualité récente, animateurs de talk-shows.

Car, si vous n’êtes pas vous-même institutrice ou professeur, pas plus d’ailleurs que je ne le suis bien que j’ai beaucoup et longtemps professé, tout comme vous avez été formatrice à la DGFIP et avec collaboré au CNFPT, vous avez su mettre en place les conditions nécessaires afin que des milliers d’enseignants aillent, avec un environnement approprié, nominativement à distance, mais, en réalité, par écran ou enveloppe de papier kraft interposé, au-devant des dizaines de milliers d’élèves qui ont besoin d’eux.

En cela votre action a été décisive, votre travail utile, vos talents indispensables. Vous avez su aux côtés des directeurs généraux successifs de l’établissement, je pense notamment à Michel Reverchon-Billot sous l’empire duquel vous avez accompli l’essentiel de ce qui va devenir un bilan « globalement positif », avec l’aide et le soutien de l’ensemble vos collègues, assurer la « matérielle » et la vie quotidienne de ce segment si particulier de notre école publique, laïque, gratuite et obligatoire.

Il y a un peu plus de deux cents ans, un jeune officier savoyard, Xavier de Maistre, parce qu’il avait été mis aux arrêts pendant 44 jours pour avoir provoqué un camarade en duel, rédigea un petit livre, léger, spirituel, bien oublié aujourd’hui. Son « Voyage autour de ma chambre » fut à l’époque un succès. Il reflétait les limites physiques de la condition humaine d’un homme enfermé, malade ou prisonnier où le rêve, l’imagination et la mémoire demeuraient les seules possibilités d’évasion.

En dehors de effets de la récente pandémie que nous avons tous subie, vous n’avez encouru, Madame la Secrétaire Générale, chère Céline Blugeon, aucune condamnation qui vous ait contrainte à garder la chambre, ni même, alors que vous n’ayez jamais compté vos heures, à rester confinée dans votre bureau. En outre, ce n’est pas totalement négligeable, je m’empresse de le préciser, vous n’avez pas défié pour un duel ni l’agent comptable pour les recettes qu’il ne recouvre pas, ni le représentant de la DEGESCO pour les crédits qu’ils ne nous accorde pas .

Non, c’est de votre plein gré, en toute liberté, par un choix de l’esprit et du cœur, que vous êtes restée fidèle à votre terre natale, contrairement à votre frère parti fréquenter les hautes sphères de la rue de Grenelle, que vous n’avez jamais quitté votre Poitou, si discrètement et si profondément français, que vous avez gardé ce lien charnel de l’esprit et du cœur qui vous rattache, par-delà les siècles, à Descartes, à Richelieu, à Du Bellay, à Rabelais, autrement dit à la raison, à l’ordre, à l’élégance et à la gaîté, éléments constituants de notre identité hexagonale et de personnalité votre singulière. Vous reconnaitrez qu’il est de pires parrainages que quelques  noms célèbres que je viens de citer pour intégrer un ordre de chevalerie national créé en 1808 par l’Empereur Napoléon au seul profit de l’Université, et étendu par la suite, en 1955, de manière parfaitement républicaine, à l’ensemble du monde de l’éducation grâce au sémillant et zézéyant Edgar Faure,.

Car ce qui frappe, en effet, dans votre parcours, c’est que vous êtes une fidèle enfant de la Vienne, des plaines et des bocages de Vivonne plus exactement, localité dont les habitants veillent sur la prononciation peu prévisible du nom et qui reste davantage connue pour ses 92 mares et ses quatre rivières – le Clain, la Vonne, le Palais et la Clouère – que pour ses boîtes de nuit et ses centres de recherche, mais où la chronique dit que Ravaillac aurait reçu de Dieu l’ordre de tuer Henri IV.

C’est pourtant pacifiquement, sans assassiner François Mitterrand ou Jacques Chirac, que vous passerez un bac scientifique à Poitiers en 1993, un Deug de droit public encore à Poitiers en 1996, une licence d’administration publique à l’Institut de Préparation à l’Administration Générale, devenu centre international de management public, toujours à Poitiers en 1997. C’est bien simple pour un peu je vous confondrais volontiers avec Charles Martel, Saint Hilaire, Alain Clayes ou, pourquoi pas, Jean-Pierre Raffarin, autres figures tutélaires de la « Ville aux cent clochers ».

En 1998, vous affrontez un concours de la fonction publique, le passage de ces épreuves notées, difficiles, anonymes, qui font la grandeur de la méritocratie française et l’honneur des serviteurs des collectivités publiques. Vous réussissez brillamment celui d’inspecteur du Trésor Public. Une victoire pour Céline Blugeon certainement, une aubaine pour le corps que vous rejoignez assurément !

Mais un drame survient. Pendant les deux années qui vont suivre, votre formation d’inspecteur à l’école nationale du trésor vous entraîne à Noisiel en Seine-et-Marne. Terrible exil qui ne va heureusement pas durer. Dès votre sortie de l’école, vous vous rapprochez de votre terroir d’élection au prix d’une insertion résolue dans la ruralité profonde. Elle ne vous fait pas peur. Indiscutablement, vous l’abordez par son volet le plus « authentique ». De 2000 à 2005, vous allez ainsi occuper l’emploi de chef de poste de la trésorerie d’Ardentes, 3850 habitants, sur les rives de l’Indre, où vous suivez, dès votre nomination, avec une petite équipe de trois agents, pas moins de 46 budgets. Le travail ne rebute pas.

De 2005 à 2009, c’est le grand retour au pays natal. Vous êtes nommée adjointe au chef de poste de la recette/perception de Saint-Georges-de-Baillargeaux, 4233 habitants quand même, une sorte de métropole par rapport à votre poste précédent, dans ce département de la Vienne que vous ne quitterez désormais plus. Vous y gérez 70 budgets et en pilotez également la dette publique sous la férule de votre chef de poste.

Cet apprentissage va vous être favorable, car, dans cette nouvelle affectation, vous allez toucher à tout ce qui fera désormais l’ordinaire de votre métier : vie des collectivités locales, gestion du logement et encadrement éducation avec quoi vous allez avoir un premier contact qui ne vous en dégoûtera pas.

Vous assurerez, en effet, de 2006 à 2008, la fonction d’agent comptable du lycée agricole Grand-Pont de Chasseneuil-du-Poitou. Puis, de 2009 à 2011, vous devenez l’adjointe du chef de poste de Logiparc. Outre la gestion et le management d’une équipe de 14 personnes, vous mettez en place des outils de suivi et d’indicateurs de recouvrement. Déjà, vous participez au comité de direction de l’établissement et contribuez à l’action stratégique du développement de cet office public HLM de Poitiers. Comme élu local, maire d’une commune de 15.000 habitants, je sais l’aide que peuvent apporter aux municipalités les agents des recettes-perception et l’expérience humaine que ces postes ont dû vous permettre d’acquérir.

En 2011, vous êtes nommée responsable d’un de ces centres des finances publiques que, aujourd’hui, on ferme à tort un peu partout. Gencay, dans la Vienne, 1746 habitants, vous attend. Vous y aurez la responsabilité de suivre 90 budgets communaux, communautaires, syndicaux ainsi que celui d’un EHPAD. Vous apportez, là aussi, appui et conseil aux élus en matière fiscale, mais aussi réglementaire, notamment sur les marchés publics, et budgétaire avec des analyses financières prospectives. Combien de localités qui n’avaient pas la taille de Lille ou Marseille avez-vous empêché d’aller vers un désastre, séduites par un emprunt toxique en yens indexé sur un mélange exotique de francs suisses et de pesos mexicains. C’est bien simple, Jean sans Terre doit se retourner dans sa tombe, regrettant de ne pas avoir entraîné vos ancêtres vers la perfide Albion. Vous auriez pu utilement conseiller Liz Truss au 10, Downing Street, lui évitant de ne rester Premier ministre que 44 jours. Ce sont donc des maires, toujours âgés, parfois très âgés, souvent des hommes, généralement des agriculteurs que vous avez épaulés. De cet attelage, vous gardez, je crois, des souvenirs pittoresques, pour ne pas dire picaresques

En parallèle à ces tâches prenantes, certainement parce que vous n’êtes pas suffisamment occupée, vous assurez la mission d’agent comptable du lycée Kyoto de Poitiers, placé sous la double tutelle de l’Éducation nationale et, comme pour votre première expérience dans ce secteur, de l’agriculture. Vous y suivez la comptabilité M9, notre Bible, mettez en place la réforme de la comptabilisation des actifs et des passifs et participez à la fusion de ce lycée agricole avec un lycée hôtelier.

J’ajoute également qu’en 2013, succès de plus, vous réussissez l’examen professionnel d’inspecteur divisionnaire de classe normale, dans la filière encadrement des finances publiques.

Saint-Georges-de-Baillargeaux ou Gencay, je ne sais si c’est là que vous avez, comme le faisait chaque après-midi la Queen Mother, la reine Mary, défunte mère de la défunte reine Élisabeth, découvert les vertus du Gin Tonic, cette boisson qui, selon Churchill sauva plus d’âmes et de vies anglaises que l’ensemble des médecins de l’Empire britannique, et dont vous n’usez qu’avec modération m’a certifié votre collègue Jean-Michel Leclerq.

Pour autant, votre enracinement, j’y reviens, n’a jamais été un enfermement. De votre chambre viennoise, au sens où l’entend Pascal, depuis chacun de ces points marquant la présence d’un service public qui font naguère repère pour la population et sécurité pour la Nation, vous avez organisé, entretenu, maîtrisé un rapport quotidien avec le vaste monde des usagers et des administrés.

Miracle de la technique, ordinateur, réseaux, communication, qui n’abolit pas l’espace, mais qui le traverse, qui le transcende, qui n’en fait plus un obstacle à la libre communication du savoir, des idées et des cultures, mais la grande route de nos messages et de nos correspondances. Miracle surtout d’une fonctionnaire loyale ayant lu aussi bien les chapitres fixant de ses « devoirs » que les articles énonçant ses « droits » dans l’épais code général qui la régit.

En 2015, c’est votre jour, c’est notre jour de gloire : vous rejoignez, non pas le Futuroscope, mais à quelques centaines de mètres le CNED. Moins de manèges. Plus de problèmes. Je ne sais si c’est parce que vous avez appris que j’allais en présider le conseil d’administration. On me dit que cela n’aurait rien à voir. Hélas ! Inversement, j’espère que vous n’en partez pas parce que, pour ce faire, un nouveau mandat m’a été accordé par le bon Ministre. Pour vous retenir, je suis prêt à promettre de ne plus changer les dates de nos conseils moins de 48 heures avant qu’ils se tiennent, mais je sens bien qu’il est trop tard…

Vous serez notre directrice des affaires financières à un moment où nous ne roulons pas sur l’or et participerez à notre redressement. Vous allez y animer quatre pôles : élaboration et suivi du budget / suivi de la masse salariale / recettes / gestion des frais de mission. Après avoir défini la marge de manœuvre dans laquelle s’inscrit l’action, vous avez la charge de l’exécution de la stratégie budgétaire de l’établissement sous la houlette toujours exigeante, invariablement bienveillante, des directeurs généraux. Discipline et hiérarchie, qui en douterait, font la force de notre service public. Vous en approuvez les règles !

Attentive et bienveillante, vous aimez valoriser vos collaborateurs et vous nouez avec vos équipes des liens solides. Il est important dans vos fonctions d’être humain. Nos collègues ne sont pas assez payés et considérés pour qu’ils viennent au travail en traînant les pieds. Pour les motiver, vous n’hésitez pas à leur faire visiter, tous ensemble, les grottes de Poitiers en mode spéléologie. C’est dire si vous savez sacrifier à la fois au team building et à l’underground.

Cela met en exergue votre habileté à créer une véritable cohésion parmi vos troupes, mais c’est l’occasion aussi de rappeler que nous avons devant nous une mère de quatre enfants sportive, adepte de la randonnée, du ski, du vélo et me dit-on du kayak, monde très masculin dans lequel vous susciteriez un certain émoi, c’est une information que je n’ai pas vérifiée et que m’a donnée avec une certaine délectation le directeur de cabinet, quand vous vous débarrassez en un temps record de votre combinaison en néoprène.

Depuis septembre 2018, vous occupez donc le poste de secrétaire générale et participez à la mise en œuvre de la politique de l’établissement et notamment de sa gestion RH, financière, juridique, immobilière, des systèmes d‘information, de la performance et de la qualité.

Membre du comité de direction restreint, vous animez fonctionnellement les 8 unités opérationnelles du CNED et participez au dialogue social notamment lors des différentes instances que sont le CHSCT ou le CTE.

En lien avec les métiers et la tutelle, vous mettez en place et suivez plusieurs schémas directeurs tels que celui des systèmes d’information, qui nous est essentiel, ou de la stratégie immobilière qui est légèrement piégeux.

Le progrès a relativisé les notions si longtemps figées et supposées antithétiques du loin et du près, du présentiel et du distanciel, pour reprendre ces deux mots avec lesquels, d’un mal résultant un bien, la pandémie que l’on sait a familiarisé le plus vaste public, en lui faisant prendre pleinement conscience de l’existence, de l’omniprésence, de l’irremplaçabilité des instruments qu’une évolution récente met à notre disposition et que le CNED peut offrir à ses usagers.

Grâce aux services que vous avez dirigés, les « paroles gelées » qui sidérèrent Pantagruel et ses compagnons de voyage sont devenues une réalité que nous mettons au service de nos élèves et des générations nouvelles.

De cette évolution, vous avez été, chère Cécile Blugeon, à votre poste, à votre place, pendant toutes ces années, un observateur ou une observatrice privilégié(e) et un acteur (ou une actrice ?) actif, infatigable, essentiel.

J’ajoute que votre engagement déterminé pour notre établissement s’est accompagné d’une véritable expertise et d’une hauteur de vue des plus appréciables et dont avons bénéficié. Je l’affirme : femme de méthode et de discernement, sachant allier détermination et qualités humaines, vous avez apporté au comité de direction, un appui déterminant dans les nombreux dossiers traités.

Il me faut conclure et, à cet instant, pour frapper les esprits, résumer votre brillante carrière, en quelques chiffres et faits édifiants. Les voici : depuis votre formation initiale en droit et administration publics, vous avez occupé cinq postes de direction au sein du ministère de l’Économie et des Finances et avez participé à la mise en œuvre de multiples politiques publiques au profit de rien mois qu’une demi-douzaine de ministères qu’il s’agisse de l’égalité des territoires, du logement, des finances, de l’Agriculture, de l’Éducation nationale et de la Jeunesse.

Un codicille à ce discours, si vous me le permettez. Juste avant de vous « épingler », avant que le CNED et vous, dans les heures qui viennent, vous vous quittiez, je tiens personnellement à vous adresser mes remerciements. Vous avez bien mérité de ces élèves à qui nous avons la charge, le devoir et l’honneur de transmettre l’héritage éducatif que nous avons reçu de nos pères, qu’il leur revient de gérer, d’enrichir et qu’il leur faudra léguer à leur tour.

Vous allez nous quitter. Je sais que, là où vous irez, vous porterez haut les valeurs de service public qui ont toujours guidé votre parcours professionnel. Vos pas vous conduisent aujourd’hui vers un voisin : le Grand Poitiers. Je ne doute pas que certains d’entre nous pourrons vous croiser sur votre futur vélo de service, dans les rues du centre-ville !

C’est donc avec un grand plaisir que :

Céline Blugeon, Secrétaire Général du Centre National de l’Enseignement à Distance, au nom du ministre de l’Éducation nationale, nous vous faisons chevalier dans l’ordre des Palmes Académiques.

7 SEPT 2022

Adieu Champion, adieu l’artiste, adieu Hervé Lofidi

Discours de Marc-Antoine JAMET

Maire et Conseiller Départemental de Val-de-Reuil

Obsèques de Hervé LOFIDI, Champion de France des Lourds-Légers/Ceinture WBC Francophone

6 septembre 2022 à 15h00

Cimetière de Val-de-Reuil

 

Chers amis, réunis ici si nombreux, il est rare que, revêtu de l’écharpe tricolore, j’aille à un enterrement. Plus exceptionnel encore que, pour y assister, je me rende dans notre cimetière. Ces cérémonies sont celles de la tristesse et du chagrin. Elles appartiennent aux familles. La décence, la dignité, le deuil commandent de respecter l’intimité de ceux qui ont perdu un proche. Leur épreuve est celle de l’absence et de la douleur.

Mais il fallait que je sois là avec vous, aujourd’hui, avec les parents de Hervé Lofidi, avec ses proches et ses amis. Je prends la parole parce que ses frères, Yves et Éric, m’ont demandé de dire quelques mots. Ils n’enlèveront pas la peine. Ils ne feront pas reculer la douleur. Ils ne parviendront pas à vaincre la mort. Ils sont impuissants à faire tout cela. Ils sont vains. Ils sont faibles. Ils sont humains. Or, ce qui nous réunit devant ce cercueil est de l’ordre de l’irrémédiable et de l’indicible. Cet hommage, votre présence, ma voix, ne peuvent donc être davantage que le témoignage du respect et de l’amitié que nous avions, avec l’ensemble de mes collègues du conseil, beaucoup étant présents, pour Hervé et pour son parcours exceptionnel.

Disant cela, je ne suis toujours pas certain que mon discours soit nécessaire, soit utile pour construire la légende de Hervé Lofidi. Il n’est point besoin, me semble-t-il, que je parle pour que son visage nous apparaisse. Le sillon qu’il creusera sur notre Terre, il l’a tracé lui-même. De son vivant. Par les souvenirs qu’il nous a donnés, par la mémoire que nous avons de lui, de ses exploits sportifs, de son exemple. Un grand champion laisse derrière lui une empreinte exceptionnelle. Il était un très grand champion.

Néanmoins, une Ville jeune comme la nôtre, je vous vois très nombreux à avoir moins de trente ans, a besoin de héros. Hervé Lofidi était un de nos héros, un de nos premiers héros, un héros à notre image, un héros qui nous ressemble, un héros qui nous a permis de dessiner l’image de notre cité. C’est pourquoi Val-de-Reuil, à l’instant de sa disparition, doit remercier Hervé Lofidi, lui payer le tribut, comme disent les Anglais, qu’elle lui doit. C’est Homère qui raconta dans l’Illiade comment Achille éleva le tombeau de Patrocle, son ami, son presque frère. Autour de Hervé, nous sommes tous des petits Achille tristes et effrayés par son départ brutal.

Dans notre histoire collective, dans notre imaginaire, Hervé Lofidi était entré par la grande porte, par la force de ses victoires, par la grandeur de ses combats. Tous ici nous admirions le boxeur. Après le basket et le football dans nos clubs, il avait choisi les arts martiaux et la boxe-thaï qu’il avait pratiquée avec une autre figure de notre ville, une autre silhouette connue des Rolivalois, avec Neth. Qui se ressemble s’assemble. C’est à 25 ans que la boxe anglaise, le noble art celui de Georges Carpentier, de Marcel Cerdan, de Jean-Claude Bouttier, celui de Fabrice Benichou, des frères Tiozzo, de Brahim Asloum, celui des Gentlemen du Ring, celui des grands, l’avait séduit et envahi. Il allait désormais vivre et combattre selon les règles du Marquis de Queensberry.

Comme il était un homme exceptionnel, son parcours fût dans cette discipline exceptionnel. Par sa rapidité. Par sa clarté. Par sa qualité. Champion de Normandie après un an seulement, boxeur professionnel en 2016, Champion de France en 2018, classé dans les 15 premiers de la WBC immédiatement après et titulaire de la ceinture WBC francophone. Beaucoup d’entre vous, et je reconnais vos visages, l’ont suivi à Paris, à Amiens, à Levallois-Perret pour le soutenir et l’admirer. Moi aussi. A bon droit, il avait été surnommé « l’artiste ». C’est un titre qu’il méritait parce qu’il était digne et solide dans la défaite, car il en avait connu quelques-unes ce qui ne le rend que plus remarquable et plus humain, mais il était rayonnant, bien que modeste, mesuré et calme dans la victoire. Un grand, un très grand, un très très grand champion, vous dis-je…

Trois mots le caractérisaient : l’élégance, le courage, la solidarité. L’élégance parce que, au punch, il ajoutait du style. Peu de gens ont du punch ou style. C’est souvent alternatif. Lui avait et du punch et du style. Dans la vie comme sur le ring. Du courage, parce que la boxe est une dure école, une vie de sacrifices. Hervé Lofidi ne le niait pas et il citait son père : « c’est celui qui en veut le plus qui va le plus loin ». Dans le monde qui peut être âpre et cruel des sports de combat, tous ceux qui l’entouraient, entraîneurs, arbitres, certains qui l’ont encore visité il y a peu de temps à l’hôpital, partenaires, promoteurs et je songe à Malamine Koné, estimaient Hervé Lofidi. Il est rare d’être apprécié lorsqu’on est un champion. On est aimé, on est admiré, on est adulé… et jalousé. Mais être apprécié, c’est autre chose. Il faut être aussi être considéré et jugé comme un grand homme. Il l’était. La générosité parce que nous sommes beaucoup à nous souvenir de ce repas qu’il avait offert à tous les jeunes qui l’avaient accompagné, de round en round, de salle en salle, et qu’il avait rassemblé autour de lui au jardin des animaux fantastiques pour les remercier. C’était un grand seigneur.

Cependant Hervé Lofidi n’était pas seulement un sportif. Son corps d’athlète était exceptionnel, mais ses muscles étaient dirigés par une âme, par un esprit, par une pensée. Il avait, ce qui n’est pas toujours donné à une seule et même personne, une très grande beauté, je peux le dire sans ambiguïté, un physique qui rappelait celui des statues classiques, mais il avait également une très grande intelligence et une belle sensibilité. Il possédait à la fois le charisme qui faisait qu’on le suivait et le charme qui faisait qu’on demeurait avec lui. Je l’ai éprouvé : tous les deux, nous avions de l’amitié, de l’estime et de la compréhension l’un pour l’autre. Oui, vraiment, j’espère que nous avons partagé ces sentiments. Il était brillant. Il était solaire. Cette dimension explique qu’il était aimé ici, mais aussi à Louviers où il avait fait ses études, à Canteleu où il s’était entraîné, à Rouen où il avait vécu et à Paris. A vrai dire, Hervé Lofidi était aimé partout où il passait. Les éloges funèbres que nous avons lus dans la presse et jusque dans L’Équipe. les réactions qu’ont pu avoir de nombreuses personnalités, en portent la preuve.

Connu et reconnu un peu partout, cet athlète était d’abord et avant tout un enfant de la ville. Il y était arrivé à l’âge d’un an. Certains se souviennent qu’il était le plus petit de sa fratrie, si bien qu’il était encore appelé « Baby » par les siens longtemps après qu’il était déjà adulte. Il avait connu l’école Coluche où il commença sa scolarité. Il avait connu la dalle, la gare, nos gymnases, nos rues. Il était comme beaucoup de jeunes Rolivalois et c’est pour cela que vous avez tenu à lui dire adieu. Parce qu’il était comme nous, parce qu’il était comme vous, il avait gagné le droit, par son exemple et par sa destinée, d’être un modèle pour une génération.

Une part de lui, et c’est ainsi que je voudrais conclure, est moins connue. Elle n’en est pas moins remarquable. Permettez-moi d’en parler. Hervé Lofidi n’était pas un sportif comme on en voit de plus en plus sur les terrains de football professionnels, insensibles à ce qu’il se passe autour d’eux, tournés vers les médias, les réseaux sociaux ou le chèque que leur victoire va leur permettre d’obtenir. Si Hervé Lofidi était un sportif et un homme, je l’ai rappelé, il était aussi un citoyen, engagé pour le respect des droits de tous, quels que soient son parcours, son origine, ses opinions et sa race. Aux dernières élections municipales, c’est ainsi qu’il avait rejoint notre liste pour s’opposer aux tenants du Rassemblement National dont il mesurait la capacité de nuisance et les ravages y compris dans la jeunesse. Il s’était placé en dernière place avec une idée qu’il m’avait confiée : « si les jeunes de la ville veulent que je sois élu, il faudra qu’ils viennent en masse puisque que je suis le dernier. C’est pour cela que je choisis cette place ». Au nom des mêmes valeurs, il avait déploré et dénoncé les tensions imbéciles qui avaient pu agiter Val-de-Reuil à l’automne dernier. Sa voix pour en condamner les meneurs et les profiteurs à ce moment avait été forte. C’était la voix du bon sens, la voix de la modération, la voix d’un homme qui avait plus de sagesse que ce que son âge aurait dû lui donner. Cette voix avait retenti pour alerter chacun du mal qu’il faisait à notre communauté en se comportant n’importe comment. On se bat sur un ring. Pas dans la rue. Alors qu’il il aurait pu penser à lui-même, à sa réussite, Hervé Lofidi pensait à préserver sa Ville et à protéger ceux qui l’entouraient.

Je veux évoquer notre dernière rencontre. Ce n’était pas moi qui étais allé vers lui, mais lui qui était venu vers moi. Fatigué, affaibli, transformé. J’en ai presque honte. Nous nous étions rencontrés en mairie, mais il n’avait pas pu monter au premier étage, dans mon bureau. Ses forces le trahissaient. Il ne pouvait pas monter les escaliers Nous avions dû rester au rez-de-chaussée, à l’état-civil, là où on déclare les naissances et les décès. C’était hélas prémonitoire. Ce jour-là, comme d’habitude, il ne venait pas parler de lui. Il voulait parler des jeunes, des autres. Il souhaitait mener une action de civisme, de prévention, d’incitation au travail comme, m’a-t-il dit, son père le lui avait appris. En l’écoutant me dire qu’il fallait montrer le droit chemin à tous, je me demandais lequel d’entre nous, frappé par la même maladie, par la même souffrance, aurait eu cet altruisme, cette façon désintéressée et sincère de penser aux autres. A la place d’Hervé Lofidi, nous aurions probablement songé à nous-mêmes. Lui, il pensait à nous. Il pressentait sa fin et, pourtant, il regardait l’avenir. C’est une immense leçon.

Nous n’avons eu par la suite qu’un ou deux échanges téléphoniques. C’est Eric, son frère aimant, tout comme Yves, lui aussi son aîné, qui m’a tenu au courant de l’aggravation de l’état de santé de Hervé, jusqu’à cet appel, voici 8 jours, où il m’a appris qu’il était au plus mal, que la fin était proche, qu’il voulait être enterré et pleuré à Val-de-Reuil. Fidélité. Loyauté. Dignité.

Je vous l’ai dit : la mort est toujours cruelle. C’est la vérité. Elle nous prive de ceux que nous aimons. Elle nous laisse désemparés. Il faut penser d’abord au désespoir de la famille de celui qui nous a quittés, à la peine de ses amis. Je pense particulièrement à la petite fille venue avec lui un jour aux vœux de la municipalité. À 34 ans, la mort n’est pas simplement cruelle. Elle est injuste. C’est pourquoi, devant sa tombe, nous avons un devoir collectif, celui de faire que Hervé Lofidi soit immortel. Il ne peut l’être que dans nos yeux, que dans nos cœurs, que dans notre amitié. Alors conjuguons tous nos sentiments cet après-midi pour lui dire : « Adieu Champion, adieu l’artiste, adieu Hervé Lofidi. J’espère que là-haut, sur un grand ring blanc, tu as retrouvé Cassius Clay, Mohamed Ali, et que, ensemble, vous vous entraînez, vous vous entraidez. Adieu ! ».

22 AVR 2022

Dimanche, je voterai Emmanuel Macron pour faire barrage à Marine Le Pen. J’incite les Rolivalois, de toutes mes forces, à faire de même.

Madame, Monsieur, Chers concitoyens,

Je veux avant toute chose vous remercier pour les résultats obtenus à Val-de-Reuil au premier tour de cette élection présidentielle, ce scrutin si important pour notre démocratie, ce vote qui ne revient que tous les cinq ans et qui ne demande pour être exercé que cinq minutes à chaque citoyen.

Vous remercier, mais aussi, si vous le voulez bien, vous sensibiliser à trois des enjeux de ce deuxième tour, aux conséquences qu’ils auront pour notre vie quotidienne, pour l’avenir de nos enfants, pour le développement de notre commune. Vous les connaissez, vous en êtes informés, vous vous déterminerez évidemment seuls, en votre âme et conscience, mais, comme votre Maire, celui à qui vous faites confiance pour gérer et faire progresser Val-de-Reuil, je veux, par ce courrier, ainsi que l’a établi entre nous une tradition désormais ancienne, y insister. Je n’ai qu’un seul but : que nous soyons plus nombreux encore à nous rendre aux urnes, dans un des six bureaux de vote qui, dans les écoles rolivaloises, seront ouverts de 8 heures à 19 heures, dimanche 24 avril.

Vous remercier donc et d’abord de vous être déplacés pour aller voter en masse, en foule, au premier tour de l’élection présidentielle, comme vous l’aviez fait aux dernières municipales et, l’année dernière également, aux départementales, comblant ainsi une partie du déficit de participation, de citoyenneté, que nous subissions par rapport à nos voisins et, plus encore, par comparaison la moyenne nationale. Dans la matinée, c’est tout juste si nous avons pu faire face, par la mobilisation des assesseurs et la compétence des fonctionnaires municipaux à votre enthousiasme. C’est un changement essentiel dans nos habitudes collectives. Restons sur cette belle tendance. Grâce à vous, grâce aux quelques instants que nous avons consacrés dimanche 10 avril à notre devoir électoral, nous avons évité les commentaires désagréables qui faisaient de nous, en Normandie, les mauvais élèves de la classe, des gens indifférents à leur sort, la lanterne rouge de l’abstention. A mon poste, toute la journée, avec mes collègues élus, nous avons vu des familles venir, ensemble, déposer un bulletin dans l’urne, de nombreux « premiers votants », âgés de 18 ans, certains, plus âgés ou découragés, qui ne s’intéressaient plus à la politique, et qui, pourtant, ne pouvaient rester silencieux au moment de décider de qui nous gouvernera jusqu’en 2027. Suivons leur exemple. Déjà, je vous l’assure, les analyses des journaux se sont faites moins cruelles, les observateurs moins condescendants, les critiques à notre encontre moins virulentes. On nous écoute. On nous voit. On nous respecte. C’est une victoire collective. Encore un effort, nous n’avons fait que la moitié du chemin ! Je le répète : voter nous donne une force exceptionnelle pour attirer, négocier, obtenir, des subventions, des emplois, des investissements. De notre conduite individuelle dépend le bien-être commun. Notre sort est entre nos mains. Aidons-nous. Aidez-vous.

Vous remercier aussi d’avoir fait reculer l’extrême-droite par rapport à 2017, de ne pas vous être laissés entraîner par la vague brune qui a déferlé sur l’Eure et qui correspond si peu, non seulement à nos valeurs républicaines, celles qui font la France, mais aussi aux réalités de notre vie quotidienne. Nul ne peut dire que, entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, le programme sera le même, notre pays identique, les choix indifférents. C’est de vous que dépendra notre avenir. Votre décision comptera. Pour les droits et les libertés, celles qui garantissent toutes les opinions, celles qui font de tous les Français des femmes et des hommes libres et égaux quel que soit leur origine, leur sexe, leur religion. Pour notre économie, notre croissance et notre protection sociale que l’endettement, l’isolement européen et l’incompétence des héritiers de Jean-Marie Le Pen viendraient mettre à mal. Pour notre Ville plus particulièrement puisque le programme de la candidate d’extrême droite ne prévoit rien pour le renouvellement urbain, rien pour le pouvoir d’achat des salariés, rien pour le logement des propriétaires ou des locataires.

C’est un exercice de salubrité publique : en Normandie, le Rassemblement National a vu son leader et nombre de ses cadres rejoindre la petite bande ouvertement raciste qui entourait le candidat Éric Zemmour ; dans l’Eure, pas un des représentants de cette formation ne fait, depuis des années, entendre sa voix, ne fait la moindre proposition, en clair ne travaille et ils sont si transparents que nous serions bien en peine de mettre un nom ou un visage sur leurs idées ; dans notre commune, enfin, ce serait conforter de manière absurde l’élu ténébreux, misanthrope et solitaire qui, perdu dans des discours brumeux, les références à Vichy et la nostalgie du « bon vieux temps des colonies », incarne dans l’excès, parfois dans le ridicule, ce courant dépassé à Val-de-Reuil. Au nom de notre « vivre-ensemble », cette expérience utile pour la sécurité et la laïcité qui fait la singularité et l’exemplarité de Val-de-Reuil, cette orientation humaine et bienveillante à laquelle je crois, mais qui reste fragile, nous ne pouvons pas accepter qu’un seul bulletin ne se dirige, à Val-de-Reuil, vers Marine Le Pen. Il y en aura, mais ils seront l’erreur, comme ses joueurs qui marquent contre leur camp et font perdre leur équipe.

Vous remercier enfin d’avoir gardé notre Ville à Gauche, puisqu’il est manifeste que les voix écologistes et socialistes, qui forment une majorité solide dans notre Ville, se sont très largement dirigées vers Jean-Luc Mélenchon. Je suis lucide : il ne s’agissait pas d’un simple témoignage, mais de la volonté de qualifier ce candidat, les espoirs qu’il entraînait, les propositions qu’il faisait, au second tour de l’élection. Je le comprends. Il s’en est fallu de peu que cette stratégie réussisse. Pour autant, faut-il maintenant attendre les législatives, voter blanc ou rester chez soi. Non, car le retrait des électeurs de Gauche signifierait que, en République, tout se vaut, que Marine Le Pen serait en tête à Val-de-Reuil. Voulons-nous vivre dans une Ville que le Rassemblement National aurait gagnée ? Voulons-nous rejoindre Fréjus et Hénin-Beaumont dans l’outrance, la faillite et la honte ? Pensons-nous que la Guerre en Ukraine, à nos portes, est un « détail de l’Histoire » et que Vladimir Poutine est un sympathique dictateur ? Accepterions-nous que la futur présidente, si elle était élue, parade à Paris avec les Premiers Ministres polonais ou hongrois populistes, homophobes, opposés au droit à l’avortement comme à la contraception, qui musèlent les libertés, les oppositions, les libertés dans leur pays.

Pour éviter cela, il n’y a pas cinquante solutions. Dimanche, sans accepter son programme, sans plébisciter sa personne, je voterai Emmanuel Macron pour faire barrage à Marine Le Pen. Je vous incite, de toutes mes forces, à faire de même en vous assurant de mon dévouement sans faille pour notre commune.

Marc-Antoine JAMET.

10 AVR 2022

J’appelle toutes les forces de Gauche et de progrès du département de l’Eure à voter massivement Emmanuel Macron pour battre Marine Le Pen.

Communiqué de Marc-Antoine Jamet,

Maire et conseiller départemental de Val-de-Reuil

 J’appelle toutes les forces de Gauche et de progrès du département de l’Eure à voter massivement Emmanuel Macron pour battre Marine Le Pen.

Le grand gagnant de l’élection présidentielle à Val-de-Reuil reste l’abstention (38%), mais la Ville, comme lors des récentes consultations locales, confirme le redressement de sa participation relative et décroche moins, par rapport à 2017, que la moyenne nationale ou la moyenne départementale.

Sur près de 8000 inscrits, 4817 se sont déplacés vers les urnes contre 4918 il y a cinq ans. Les deux bureaux de vote (Léon Blum et Coluche) situés dans les quartiers qui abritent la proportion la plus importante de classes moyennes votent plus (70% environ) que les quartiers de centre-ville dont la population connaît une forte précarité, se rapprochant du taux de participation national.

Le scrutin marque le recul dans la commune des grands partis de Gouvernement à droite comme à gauche, prolongement du pari dangereux et à courte vue tenté par En Marche depuis cinq ans. Le score de Valérie Pécresse (1,65% et 78 votants…), très en retrait par rapport à celui de François Fillon (6,5%), vient confirmer, phénomène entamé il y a 20 ans, la quasi-disparition de la droite classique à Val-de-Reuil. Anne Hidalgo ne se classe que 4ème (3,50% et 165 votants), bien qu’elle enregistre dans la commune un score bien supérieur à son niveau national.

Le Président de la République, qui avait rassemblé 18,3% des suffrages en 2017, fait légèrement moins bien (18% et 849 votants), montrant une absence d’enracinement à la fois personnelle et partisane qui peut interroger ceux qui en sont les représentants locaux dans la circonscription comme à l’échelle du département et annonce les 12 et 19 juin des législatives plus incertaines qu’on ne le pensait.

En additionnant les voix qui se sont portées vers Marine Le Pen (24,6% soit 1160 voix), Éric Zemmour, qui, raciste et urbain n’a que peu séduit dans la Ville Nouvelle (3,2%) et Nicolas Dupont-Aignan (1,4%), on constate un très léger recul de l’extrême-droite (29% soit 1375 voix contre 30% soit 1438 électeurs il y a 5 ans), pourtant battue à plat de couture lors des récentes élections municipales où elle avait fait son plus mauvais score depuis 20 ans. L’extrême droite avait capté 30% des voix en 2017. On en peut en tirer un enseignement : plus on se rapproche du terrain où ses porte-paroles allient médiocrité et absentéisme, plus les résultats du Rassemblement National sont faibles ; plus il s’agit de consultations nationales, plus élevés sont ses scores.

La Gauche radicale qui réunit Fabien Roussel, Jean-Luc Mélenchon, Philippe Poutou et Nathalie Arthaud représente 43,64% avec 2057 voix contre 34% en 2017. L’essentiel de ce résultat est acquis par le leader de la France Insoumise (40,4%) qui réalise une percée importante reposant sur son équation personnelle et la priorité donnée par les électeurs de Gauche au vote utile plus que par son programme irréalisable et qui n’aurait trouvé aucune majorité.

Le courant écologiste réalise une réelle contre-performance puisque, malgré l’importance des dossiers environnementaux, notamment celui du contournement Est de Rouen, il ne parvient pas à mobiliser plus de 2,33% soit 100 voix.

Néanmoins, le bloc de Gauche, Gauche de Gouvernement et Gauche radicale, à Val-de-Reuil (50%), reste, en partie grâce à l’action de la municipalité, deux fois plus important que le bloc des droites (31%), droite républicaine et extrême droite. Cet équilibre n’est que très peu modifié si on ajoute les voix du Président sortant (18%) à celle de la droite.

Quoi qu’il en soit ces résultats ne peuvent appeler de ma part qu’une consigne de vote forte et claire, sans ambiguïté et sans contrepartie : battre l’extrême droite xénophobe, réactionnaire et incompétente, dont la cheffe de file s’est déclarée l’amie et l’alliée de Vladimir Poutine, en se mobilisant, plus nombreux qu’au premier tour, et en votant, massivement, pour éviter la ruine du pays et sa désagrégation, Emmanuel Macron. Il s’agit moins de sauver la démocratie qui résisterait peut-être à l’élection de Mme Le Pen, mais de préserver les valeurs de la République, liberté, égalité, fraternité, solidarité, laïcité qu’elle mettrait irrémédiablement à mal et la place de la France en Europe et dans le monde que, en ridiculisant notre pays et en l’isolant, elle compromettrait gravement et durablement.

Lucide sur ses qualités humaines et sur ses défauts politiques, je souhaite donc sincèrement la victoire du Président de la République sortant, en espérant qu’il comprendra enfin que c’est avec une autre majorité et une autre politique, plutôt qu’en s’appuyant sur la vieille droite, qu’il parviendra à regagner la confiance du camp du progrès et que ce n’est pas en détruisant, un à un, tous ses repères que la société française s’apaisera.

Le dimanche 24 avril 2022, je voterai pour Emmanuel Macron et j’appelle tous les socialistes du département et, au-delà, toutes les forces de Gauche à faire de même.Ce n’est pas en votant blanc ou en restant chez soi qu’on fait barrage à l’extrême droite. C’est en votant pour le Président de la République, pour le chef de l’État, pour Emmanuel Macron.

22 MAI 2021

Sollicité par l’Association « NON À L’AUTOROUTE A133-A134 », comme l’ont été tous les candidats aux prochaines élections départementales, j’ai tenu, en approuvant chacune des propositions formulées par ses adhérents, à rappeler mon hostilité de la première heure et mon opposition constante au projet de contournement Est de Rouen, dévastateur pour notre environnement et le cadre de vie des habitants du canton du Vaudreuil/Léry/Poses/Porte de Seine/Herqueville/Connelles/Amfreville sous les Monts/Val-de-Reuil. Contrairement à d’autres, dont l’avis varie à l’approche des élections, nous sommes les seuls à avoir déposé des recours devant la justice pour interdire sa construction.

 

Mesdames les candidates et Messieurs les candidats aux élections départementales, l’association « Non à l’autoroute » (siège social à Léry) aimerait connaître votre avis sur le projet autoroutier A133-134.

Nous vous remercions par avance de répondre à nos courtes questions.

Vous pouvez joindre un commentaire dans le cadre à la fin du courrier.

Vos réponses seront rendues publiques afin d’éclairer le choix des électrices et électeurs.

Je vous prie d’agréer, Mesdames, Messieurs, l’expression de ma considération distinguée.

Maxime Bunel

Président de Non à l’autoroute A133-A134

Voici le questionnaire et son introduction :


Cette autoroute supplémentaire qui viendrait raccorder, sur le territoire Seine Eure, l’A28 à l’A13 au niveau de la forêt de Bord, en serpentant entre Le Manoir, Alizay, Les Damps, Léry, Val de Reuil, est un non-sens à la fois économique et écologique.

Non-sens économique. Elle ne servira en rien l’activité économique sur le territoire, car elle concernera, pour l’essentiel, le trafic de transit international nord-sud de l’Europe. Le montant prévu des péages sera dissuasif pour le trafic de transit nord-sud et le trafic d’échange plus local. Rappelons le développement de l’autoroute ferroviaire qui peut par les voies actuelles se substituer à ce projet pour beaucoup moins cher.

Le territoire Seine Eure est déjà traversé par deux autoroutes (l’A13 et l’A154), une autoroute supplémentaire n’est pas une priorité. La pandémie de la Covid-19 va laisser des traces dans l’économie, l’argent public devra servir à endiguer les pertes économiques et financières, à aider les secteurs de l’économie et les citoyen.nes touché.es par cette pandémie et non gâcher près d’un milliard d’euros dans un projet qui n’est plus d’époque.


Non-sens écologique car elle détruira des espaces naturels riches, des terres agricoles, la lisière de la forêt de Bord, longera une zone Natura 2000, apportera de la pollution supplémentaire : émissions de gaz à effet de serre en plus et de particules fines, de produits toxiques dus à l’abrasion des pneus et freins). Cette balafre autoroutière va modifier négativement le cadre de vie de milliers d’habitant.es (bruit donc stress, éloignement de la forêt, pollution visuelle constante, accroissement des maladies dues à la pollution de l’air) va détruire définitivement ce paysage surplombé par la Côte des Deux Amants, qui est un site classé.


Au moment où le réchauffement climatique met en évidence la nécessité de changer les modèles de développement économique et en particulier les modes de transports des marchandises et des personnes, ce projet vieux de 50 ans, n’est pas adapté aux réalités actuelles. Notre territoire a la chance d’être traversé par la Seine et la voie ferrée Rouen-Paris. L’argent public récupéré, près de 500 millions €, si le projet A133-A134 est définitivement abandonné, pourra être investi dans une politique des transports adaptée aux urgences du moment, sociale, écologique, économique, et rendre service à la grande majorité de la population.


Notre association propose des alternatives : quel est votre avis ?

  • Favoriser la liaison entre la métropole de Rouen et l’agglo Seine Eure utile à des milliers de personnes qui transitent chaque jour dans les deux sens en développant les transports en commun (en amplitude, en cadencement) le co-voiturage, l’autopartage. D’accord / Pas d’accord

  • Faire de l’A13 la voie de circulation prioritaire entre les deux agglomérations en supprimant le péage d’Incarville qui rejette quotidiennement des milliers de véhicules sur le réseau secondaire. Y baisser la vitesse à 90km/h, comme sur les rocades péri-urbaines. D’accord / Pas d’accord

  • Développer le transport multi-modal. Favoriser le fret ferroviaire et le fret fluvial. La Seine, fleuve navigable par excellence, est sous utilisée. Le réseau ferré a jadis développé un important trafic de marchandises, il peut toujours répondre aux besoins de transports du fret actuel. D’accord / Pas d’accord

  • Développer l’utilisation du vélo en construisant des pistes cyclables, en favorisant la combinaison vélo-transport en commun. Le vélo a été un moyen de transport populaire et partagé par un grand nombre de personnes, il peut le redevenir. D’accord / Pas d’accord

  • Conforter les démarches actuelles de mise en service d’une liaison ferroviaire entre Rouen et Evreux qui passerait par Louviers, étudier la meilleure solution (tram-train ? Train léger ?) D’accord / Pas d’accord

  • Désenclavement de la Vallée de l’Andelle : utiliser au mieux la ligne Etrépagny/Alizay qui allait jadis à Gisors pour le fret et l’ouvrir au trafic voyageur; maintenir l’interdiction de la circulation des poids lourds de plus de 19 tonnes sur la D 321 d’Alizay à Fleury sur Andelle, les dévier sur les grands axes routiers et autoroutiers existants. D’accord/Pas d’accord

Vos commentaires éventuels ou votre proposition alternative :

« Je crois que je n’ai pas besoin de vous dire combien je suis hostile à l’autoroute de contournement Est de Rouen, puisque Val-de-Reuil, à mon initiative, dépose recours contre recours – depuis le premier jour, on peut vérifier – pour qu’elle ne se fasse pas, consacre des fonds importants à ce combat, sert discrètement de point d’appui à nombre de démarches juridiques s’opposant également à ce projet démentiel, coûteux et qui ne répondra pas aux objectifs quoi lui sont fixés. En mairie notre juriste y consacre une part non négligeable de son temps de travail depuis plusieurs années. Nous avons subi les foudres et les représailles du DDE à plusieurs reprises, sans que, d’ailleurs, j’ai pu noter, au-delà de Léry et Poses, communes amies, qu’une solidarité particulière s’organise pour en atténuer les effets. 
 
Je réponds, non moins évidemment, par une approbation totale à l’ensemble des propositions que vous faites en alternative réalisable, souhaitable, favorable qu’il s’agisse de multi-modalité (la Gare de Val-de-Reuil, dont la commune – chose exceptionnelle en Normandie – a payé une partie. Bien qu’elle bénéficie à toute notre agglomération, en témoigne à sa façon), d’énergies propres (une station de recharge hydrogène au rond-point des pommiers, une station de recharge électrique rapide d’une vingtaine de postes, au rond-point des clouets, sont en cours d’aménagement ), de liaison ferroviaire avec Evreux/Caen (à la condition que cela ne conduise pas à la création de deux gares voisines de quelques kilomètres sur notre territoire, de tracés absurdes et redondants, de ruptures de change et de liaison routière entre les deux lignes passant devant les fenêtres des malheureux habitants de Louviers ou de Pinterville, si l’embranchement se faisait, non au niveau de la gare actuelle, mais à celui de Vironvay/Heudebouville, sans parler du coût redoublé que nécessiterait ces redondances), d’utilisation renforcés du vélo (contrairement à ce qui peut exister dans d’autres parties de l’agglomération et que je n’approuve pas, Val-de-Reuil a décidé que ses voies cyclables seraient en site propre, sécurisées et signalées par un revêtement d’une couleur spécifique).
 
Puis- je cependant compléter votre courrier de plusieurs remarques ? 
 
Il est clair que les questions principales, en tout cas les plus immédiates, sont celles des paysages et de l’environnement (l’éventrement de la forêt de Bord à la hauteur de Léry n’est pas plus imaginable qu’un viaduc coupant la Seine et l’Eure à 50 mètres d’altitude en parfaite visibilité de tous les points qui font la beauté de notre cadre de vie – je songe à la côte des deux amants – et en défigurant Pitres, Le Manoir, Pont-de-l’Arche, bien d’autres communes encore) mais aussi celle du renforcement de la pollution (dans une aire qui en était à peu près préservée). Toutefois, il y a d’autres points qu’il faut ajouter à ce premier bilan désastreux.  
 
1) Une question sociale : est-il normal qu’un véhicule qui s’arrête à Val-de-Reuil après s’être déjà acquitté d’un droit au péage de Heudebouville/Vironvay en acquitte un second au péage d’Incarville lorsqu’il repart vers Rouen ? Est-il normal que tous les usagers venus de notre canton le payent également pour emprunter un tronçon théoriquement gratuit, subventionnant le tronçon payant situé avant le péage de Heudebouville-Vironvay ? 
2) Une question de sécurité routière : le contournement de Rouen n’aboutirait pas seulement à une échangeur entre l’A13, l’A154 et l’A28, mais aussi à un diffuseur depuis ces autoroutes vers le réseau secondaire. Croit-on vraiment que les rond-points des Clouets, de Saint-Pierre, du fantôme, du monument, des pompiers, des pommiers sont en capacité, alors qu’ils sont déjà saturés soir et matin, parfois également dans la journée, d’accueillir de nouveaux véhicules ? 
3) Une question politique : comment certains candidats – je pense notamment à ceux de la droite et de l’extrême droite –  peuvent-ils prétendre qu’ils sont contre cette autoroute alors que leurs « amis » qui se présentent sous les mêmes étiquettes à la région – il est vrai que la liste LR/LREM de l’Eure ne sait si elle doit soutenir M. Bonnaterre ou M. Morin –  sont pour ? Avec mes camarades et alliés de la métropole, Nicolas Mayer-Rossignol, et de la région, Mélanie Boulanger et Laetitia Sanchez, nous sommes, comme tous ceux qui savent ce qu’est vraiment le progrès, sur la même ligne : « non à l’autoroute ». 
4) Une question industrielle qui est une question de bon sens que je me tue à enseigner à Bernard Leroy, parfois bien léger ou bien suranné : si une voie nouvelle connectée au nord de l’Europe peut éventuellement apporter emplois et richesses, elle peut aussi – on vient de le voir avec la recherche Janssen qui nous déserte pour les Flandres – en emporter loin de notre territoire ou plus facilement encore vers d’autres parties soit plus littorales, soit plus centrales de notre pays. On a connu autant de voies structurantes qui asséchait un éco-système par l’évasion de son dynamisme que le contraire. C’est un jeu aventureux auquel on risque l’avenir de notre département pads toujours attractif.
5) Une question économique qui est aussi une question d’égalité : on a bien compris que ce contournement s’il se faisait (et il ne se fera pas) serait réservé à ceux qui pourront en payer le prix extravagant – une sorte de dîme, de gabelle ou de champart trois siècles après l’abandon des privilèges – et interdit à ceux, la majorité d’entre nous, salariés, retraités, artisans, jeunes qui n’auront pas les moyens de faire face à une dépense qu’on annonce pour un aller-retour en dizaine d’euros. 
6) Une question budgétaire enfin et c’est le magistrat à la Cour des comptes qui parle, celui qui a fait entre 2000 et 2015 de la Normandie, dont j’étais le responsable des finances, la région la mieux gérée de France, celui qui a désendettement sa ville : il ne s’agit pas de savoir ce que l’on pourrait faire avec les sommes astronomiques (on va vers le milliard et plus) qui seront aspirées par cette folie, car ce n’est pas du tout ainsi que le problème se pose techniquement, pratiquement, mais bien plus de s’interroger sur ce qu’on ne fera pas pour payer cette ponction démesurée et où ?  On ne se privera pas de quelque chose de supplémentaire. On fera une croix sur quelque chose d’indispensable. Je n’imagine pas les habitants de Bernay ou de Pacy-sur Eure être mis à la diète, pas même ceux d’Évreux. Ce sont nos collectivités de proximité. Clairement ce davantage de bitume, ce sera moins d’éducation, moins de santé, moins de solidarité d’une part, moins d’investissements pour les transitions écologiques, technologiques, économiques et numériques d’autre part. 
 
Dès lors, l’Eure continuera de ronronner, invisible, oubliée, dépassée. C’est cela que nous voulons éviter, conjurer et changer. Parce que nous voulons l’Eure du réveil et pas l’Eure de l’immobilisme comme aujourd’hui.
Marc-Antoine Jamet
22 MAI 2021

Les trois morts de François Mitterrand

Les trois morts de François Mitterrand

par Marc-Antoine JAMET

Une date est importante lorsque, jour, mois, année, elle ne forme plus qu’un tout indissociable. De Gaulle fût élu en 1965, Pompidou en 1969 et Giscard en 1974, mais François Mitterrand devînt Président de la République le 10 mai 1981. Il y a 40 ans. Une date se hisse dans l’Histoire lorsqu’on n’oublie pas ce qu’on faisait ce jour-là. Je revois la moue désabusée du maire (de droite…) de ma petite commune de banlieue apercevant mon blouson, ma mobylette et mes cheveux longs : « celui-là, c’est pas pour nous ! ». Une date, enfin, entre dans la légende quand une génération entière s’imagine l’avoir intimement vécue. L’accession au pouvoir du premier président socialiste de la Vème République relève de cette catégorie. Comme le Stade de France pour les supporters des bleus en 1998, la Place de la Bastille aurait été bien trop petite pour accueillir tous ceux qui pensent et racontent – avec sincérité ! – avoir, jusqu’au fameux orage, dansé de joie au pied de la colonne et de son génie ailé. Ils sont des dizaines, des centaines, des milliers à s’en rappeler. Quand bien même serait-ce par procuration, il est agréable le goût de la victoire.

Directeur de cabinet du Président de l’Assemblée Nationale, puis du Premier secrétaire du parti socialiste, enfin du Président du Groupe socialiste, entre 1992 et 1997, avant d’occuper par la suite d’autres postes du même acabit, je n’ai connu de l’intérieur que le second septennat. Comme beaucoup dans ce petit milieu, il m’est alors arrivé de rencontrer celui que, dans son dos, ses ministres appelaient le « vieux », mais qui, en sa présence, lui donnaient du « Président » à s’en décrocher la mâchoire. Il impressionnait. Deux fois, sentant le sol se dérober sous mes pas, j’en ai fait les frais. Henri Emmanuelli, pressentant la défaite que suivrait le suicide de Pierre Bérégovoy, désirait me nommer à la Haute Autorité de l’Audiovisuel. A l’Élysée, j’attendais dans l’antichambre confirmation de ce projet quand la voix si reconnaissable à dessein s’éleva : « j’ai déjà nommé le père, je ne vais quand même pas recaser toute la famille ». Et pour punir mon audace, sympathique cruauté, on me donna à instruire le dossier de la jeune femme désignée à « ma » place. Dans les jours sombres qui suivirent la publication du bouquin de Pierre Péan sur la jeunesse contrastée du Président, j’allais au « château » voir le Secrétaire Général de la Présidence, comme il était normal à l’époque que je le fasse. Dans le bureau des secrétaires, Hubert Védrine s’affairait triant des montagnes de papiers. Je lui demandais ce qu’il pouvait bien archiver à cette heure quand le timbre chuintant, qu’avaient popularisé imitateurs et humoristes, à peine affaibli par la maladie, retentit, exaspéré, derrière moi : « puisque vous êtes là, au moins rendez vous utile ». C’est ainsi que, tard dans la nuit, j’agrafais les argumentaires qu’une presse, qui les questionnait, recevrait le lendemain sur les faits d’armes et l’impeccable résistance du Chef de l’État. Peine perdue.

Est-ce parce que cela l’atteignait, par nature ou parce qu’il sentait la vie qui s’enfuyait, il pouvait être d’une extrême dureté. Vers la fin, on me chargea d’organiser un repas secret où le Président convierait les anciens premiers ministres de ses gouvernements et les anciens premiers secrétaires de son parti, ainsi que quelques barons du nord et du Pas-de-Calais qu’il avait souhaité qu’on ajouta. Sa tasse d’hibiscus devant lui (« la boisson d’immortalité des pharaons »), enfoncé dans un amoncellement de coussins, l’inquiétant docteur Jean-Pierre Tarrot à ses côtés, le déjeuner tourna au règlement de comptes interne à la défunte SFIO. Mitterrand, soudain ragaillardi, revivait le congrès d’Épinay, taxant, vingt ans après, de « molettistes » ceux qui s’étaient opposés à sa synthèse (« à cette table, j’aurais étéminoritaire »), rappelant méchamment à Pierre Mauroy qu’il avait convaincu le maire de Lille, Augustin Laurent, de s’en retourner à la faveur d’un enterrement providentiel vers son beffroi plutôt que de rejoindre ses opposants (« c’était aux pissotières, Pierre, oui, aux pissotières ») et révélant enfin à Jean-Pierre Cot, Pierre Joxe et Lionel Jospin que leur coupe de cheveux « afro » leur valait le surnom d’« Angela Davis » dans les couloirs de Solferino. Dans mon souvenir, Jospin répliqua courageusement « et vous Dracula, Président, à cause de vos dents », ce qui jeta un froid. Mitterrand, teint de cire, visage creusé et lèvres blanches, ne reprit l’avantage que par une méditation sur la mort, le ciel gris, les nuages et le temps, exercice dans lequel, de cimetière parcouru en église visitée, il excellait depuis soixante bonnes années.

Il pouvait faire aussi preuve d’une étrange humanité. Décorant mon père, il en fit un portrait si juste, si bienveillant, expliquant – seul à pouvoir le faire – les raisons morales et politiques, lointaines et familiales, qui avaient amené un journaliste de droite, connu et admiré pour cela dans Paris, passé par Le Figaro, L’Auroreet Le Quotidien de Paris, à soutenir un homme de Gauche que tous ces journaux conspuaient allègrement. A la fin d’un discours inhabituellement long, alors qu’il pouvait expédier ces cérémonies, je vis quelques larmes rouler, bien qu’il n’ait jamais cessé de le nier, sur les joues du récipiendaire, tandis que François Mitterrand, le dos rompu par les métastases qui l’envahissaient, retournait s’allonger dans une alcôve dressée pour un impossible repos, non loin du bureau où trônait la maquette de la Très Grande Bibliothèque…

Mais c’est par ses trois morts que je n’oublierai pas François Mitterrand. La première eut lieu le 20 novembre 1994. 13 ans après Créteil et sa désignation comme candidat à la magistrature suprême, le Président socialiste retrouvait à Liévin un congrès de son parti. Il arriva par le train. Épuisé. Hagard. Son discours devant la stèle des 42 mineurs tués dans la catastrophe de 1974 fût un calvaire. Un maigre gargouillis sortait de sa bouche. Il chancelait. A peine le dernier mot chuchoté, on l’évacua vers la Mairie où il s’effondra inconscient. Alors que la foule le demandait, il était allongé à même le sol, entouré de gardes du corps et de médecins. On le piqua. On le soigna. On lui donna des dizaines de cachets, de comprimés et de médicaments. Au bout d’un moment de ce traitement intensif, la vie reprit le dessus. Il se releva, ressuscita, reparla, recevant debout, triomphant et souriant, un tonnerre d’applaudissements. Comme si de rien n’était. Une seconde fois, il passa devant moi de vie à trépas. Après avoir salué Jacques Chirac qui lui succédait, le 17 mai 1995, il était revenu au siège du Parti Socialiste, avant de rejoindre la rue de Bièvre, refaisant à l’envers le chemin du 10 mai 1981. Il fût étincelant. Parlant de chic, comme s’il n’avait jamais quitté cet hôtel particulier mal foutu et familier aux militants. Sa conclusion, « vous reviendrez au pouvoir plus vite que vous le croyez », était prémonitoire. Il voulut revoir le bureau historique des premiers secrétaires. La journée avait été longue et compliquée. Il avait présumé de ses forces. Soudain, chaque marche lui sembla infranchissable. Il s’essoufflait, vacillait, étouffait littéralement. Dans son ancien bureau, il tourna de l’œil et tomba. Le sang avait quitté son visage. Il était un cadavre. On le porta sur un canapé. Autour de lui, le ballet recommença. Seringues. Potions. Réanimation. Le protocole dura plus longtemps. Il se releva plus difficilement. Les hiérarques s’inquiétaient de son absence. On entendait les voix de Martine Aubry, Ségolène Royal et Élisabeth Guigou tambourinant sur la porte : « rendez-nous le Président ». Il reprenait ses esprits. Après avoir refusé de se montrer au balcon (« vous me prenez pour Mussolini ! »), il redescendit parmi ses camarades, posa presque guilleret devant le poing et la rose et repartit en voiture sous les vivas. La troisième de ses morts fut différente. Plus rapide. Plus brutale. A 6 heures du matin, le 8 janvier 1996, Pierre Joxe, sur un ton policier, me téléphona   : « Jamet, je veux voir Fabius à son bureau au Palais-Bourbon ». C’était celui qu’avait occupé François Mitterrand pendant 20 ans d’opposition. Laurent Fabius y arriva. « Le président est mort cette nuit ». Voilà ce que l’ancien ministre de l’intérieur avait à dire. J’étais ému. Les deux hommes l’étaient aussi, calmes et orphelins, atteints sans être anéantis, comprenant simplement que plus rien pour eux ne serait comme avant. Ils l’avaient tant aimé, aidé, admiré et imité.

MAJ

29 JAN 2021

Pour Val-de-Reuil, l’éducation, à l’école, c’est une priorité. Avec le Département et le Rectorat, au collège, au lycée, c’est une corvée.

Pour Val-de-Reuil, l’éducation, à l’école,

c’est une priorité.

Avec le Département et le Rectorat, au collège, au lycée,

c’est une corvée.

Trop c’est trop.Quel est le grand ou le petit timonier qui, quelque part, a juré d’avoir la peau des enseignants de Val-de-Reuil, d’en décourager les parents d’élèves et, pour les enfants, d’y arrêter l’ascenseur social. On se souvient comment, par une décision purement politicienne, pour construire de nouveaux collèges là où les électeurs sont plus dociles, dans le sud de l’Eure, et en restaurer là où, plus près de nous, il y avait un risque que l’alliance LR/LREM perdre un canton, le département, manœuvré en catimini par le ministre Lecornu, avait rayé de la carte le collège Pierre Mendès France de Val-de-Reuil.

On mesure aujourd’hui l’incommensurable dose d’incompétence et la sombre bêtise que recélait cette injustice. Nous en payons les conséquences au prix fort : saturation des collèges voisins Michel de Montaigne et Hyacinthe Langlois, recul de la mixité sociale à Alphonse Allais, dégradation des résultats aux examens, fatigue et temps de trajet allongé pour les enfants. Il semble que cela ne suffise toujours pas à ceux qui ignorent (ou feignent d’ignorer) que les établissements situés dans les quartiers de la Politique de la Ville demandent plus de moyens, plus de crédits, plus d’attention, ainsi que l’avait pourtant souligné l’actuel chef de l’État dans un fameux discours qu’il prononça à Grenoble.

Les démolisseurs de l’école laïque, gratuite et obligatoire ont donc jugé qu’il fallait passer la vitesse supérieure. Réveille-toi Jules Ferry, ils sont devenus fous ! En préparation de la rentrée scolaire 2021/2022, les prévisions d’effectifs et de moyens affectés aux établissements scolaires du second degré viennent d’être dévoilés. Classes surchargées, dotations horaires diminuées, conditions de sécurité des élèves non assurées, projets d’excellence sacrifiés, tel est le détonnant cocktail que devraient avaler collégiens et lycéens rolivalois en septembre prochain, telle est la voie ou plutôt l’impasse vers l’échec, que souhaitent tracer Département et Rectorat pour l’avenir des enfants de Val-de-Reuil, Léry, Pont de l’Arche, Poses ou du Vaudreuil. Incohérence, désinvolture et mépris se le disputent pour caractériser ces orientations néfastes auxquelles il doit être immédiatement remédié, comme je l’ai martelé, hier soir, au conseil d’administration du lycée Marc Bloch. Cette situation s’apparente à du sabotage en administration organisée. Elle ne peut durer.

Depuis 20 ans, la municipalité investit, chaque année, 2 millions d’euros en moyenne dans la réussite éducative des élèves Rolivalois. Écoles reconstruites, réhabilitées et modernisées, projets pédagogiques innovants, soutenus et financés, sorties scolaires subventionnées, classes numérisées, matériel acheté ou  remplacé, dédoublements des effectifs facilités, moyens humains renforcés avant, pendant et après les temps scolaires, davantage encore pendant les deux confinements : la Ville a fait de l’éducation la première de ses priorités. Il n’est pas un dispositif, une mesure ou une expérimentation proposée par le Ministère de l’Education Nationale en faveur de l’Education prioritaire que nous n’ayons intégré ou accompagné. Cette politique partenariale volontariste, construite avec les Inspections de circonscription ou d’académie, grâce au remarquable travail du corps enseignant, s’est traduite dans notre Ville par une hausse continue du nombre d’élèves, de classes et de professeurs.Elle n’a qu’un seul objectif : permettre à chaque élève, quel que soit son origine ou son parcours de compenser, par l’école, les inégalités de la vie. Les statistiques le rappellent : celles-ci sont, hélas, à Val-de-Reuil plus criantes que partout ailleurs dans l’Eure. Notre engagement devrait être relayé par l’ensemble de la communauté éducative. Il ne semble plus trouver, chez ceux qui ont la responsabilité d’y veiller, la moindre volonté. Pour le Département et le Rectorat, assurer l’égalité des chances est devenu une corvée.

Avec 630 élèves, au moins, dans un établissement dont on a longtemps dit qu’il ne pouvait en compter que 500 et qui n’en abritait autrefois que 400, les effectifs du collège Michel de Montaigne, à la prochaine rentrée, vont exploser.Au-delà de l’inquiétante augmentation du nombre des élèves par classe, et d’un environnement pédagogique dégradé, c’est la sécurité même des enfants  qui n’est plus assurée.Faudra-t-il attendre qu’un accident se produise pour s’en inquiéter ? La commission de sécurité a eu l’occasion, à plusieurs reprises, d’estimer que les locaux actuels, par leurs circulations inadaptées, des couloirs étroits et des toilettes en nombre insuffisant (10 en tout et pour tout), ne peuvent accueillir autant d’enfants. La limite compatible avec un accueil de qualité, déjà dépassée cette année,  va continuer d’être franchie sans qu’aucun moyen d’encadrement supplémentaire ne soit prévu pour en neutraliser les effets.Silence dans les rangs du Rectorat et du Département. Le collège Michel de Montaigne n’est, hélas, pas le seul à faire les frais de cette politique de gribouille.

Le Collège Alphonse Allais n’a, lui, conservé de son appellation REP+ que le nom. Seul collège du département de l’Eure à entrer encore dans cette catégorie, après la mise en coupe réglée de Pablo Neruda à Evreux, toute personne censée aurait pensé, sans imaginer se tromper, qu’il ferait l’objet d’une attention plus soutenue. Les élèves de Criquebeuf et des Damps, que le Département, déconnecté de toute réalité, obstinément enfermé, avait cru voir intégrer l’établissement pour diversifier les origines sociales des enfants, s’en sont allés vers l’enseignement privé. Pari perdu. En matière d’éducation, il vaut mieux tenir la barre que naviguer au hasard et jouer à la loterie. Le gâchis vire à la gabegie.La proportion de catégorie sociale défavorisée, près de 80%, n’a jamais été aussi élevée dans ce collège.Une révision immédiate de la carte scolaire est indispensable.Elle permettrait de rapatrier les élèves brinquebalés plus d’une heure dans les transports, de Pont de l’Arche à Louviers, soumis à un rythme journalier effréné, contraire à toutes les recommandations pédagogiques en matière de rythme de l’enfant, partant de chez eux à 7h15 pour n’en revenir qu’à 18h15. Ils retrouveraient ainsi, dans un établissement qui a la capacité de les recevoir, des conditions d’études favorables à leur réussite. La Ville, les parents et les enseignants le demandent. Personne ne répond.

Comme si cela n’était pas assez, les mêmes irresponsables s’en prennent maintenant au Lycée Marc Bloch. Celui-ci, il y a trois ans encore, affichait des résultats au Baccalauréat parmi les meilleurs de l’Académie et faisait pâlir les établissements rouennais assis sur leur réputation. C’était trop beau. L’établissement subit désormais la réduction de ses dotations horaires, la fermeture d’une division de seconde et des effectifs programmés pour atteindre 35 à 36 élèves par classe dès leur entrée au lycée. Pour les trois prochaines années, ce sont 163 heures d’enseignement qui seront retranchées du quota annuel dont est doté le lycée.Comment, dans ces conditions, à l’oral, en langues étrangères, dans les enseignements scientifiques, pour lesquels toutes les études internationales s’accordent à dire que nous accusons un retard important, un élève peut-il s’exprimer ? L’établissement de Val-de-Reuil, le seul, dans l’Eure, à être directement rattaché à un réseau d’éducation prioritaire renforcé, dans lequel étudient 300 élèves issus d’un Quartier Politique de la Ville, serait celui qui perdrait le plus d’heures de tous les établissements du département. Scandaleux.

Depuis trois ans, les signaux d’alarme ont tous été tirés : baisse de la réussite aux épreuves du Baccalauréat, suppression des heures d’aide personnalisée en langues, en mathématiques et en français, fin du dédoublement des heures d’enseignement moral et civique, renoncement à de nombreux projets impliquant des rémunérations en heures supplémentaires effectives.On prétexte, pour justifier rabais et coup de rabot, une baisse progressive des effectifs. Qui veut noyer son chien dit qu’il a la rage. C’est la perte d’attractivité et la baisse des moyens qui sont la cause de ce recul. Non l’inverse. Que sont devenus les programmes d’excellence, l’originalité, la rareté, la spécialité qui permettaient d’attirer des élèves de l’Agglomération et du département ? Pour combattre les inégalités, il faut éviter l’appauvrissement ou la banalité. Ce sont ces programmes, ces options, en langues rares ou anciennes par exemple, ces projets, culturels et internationaux, qui, demain démantelés, permettaient d’élever, d’émanciper, d’ouvrir à de nouveaux horizons des lycéens qui, à défaut de revenus familiaux suffisants, pouvaient en bénéficier. C’est aussi se prémunir qu’on assassine d’autres Samuel Paty. Je connais le dévouement et l’engagement sans faille des enseignants. Leur ambition est intacte. Celle, du Rectorat, en revanche, fait cruellement défaut. Il faut un réveil et un sursaut.

Alors que chacun s’inquiète des risques de décrochage et des conséquences de la crise sanitaire sur l’avenir de notre jeunesse, que le gouvernement, hier soir, par la voix du Premier ministre Jean Castex, annonçait des moyens renforcés pour les quartiers de grande précarité, je demande, que, sous l’autorité de la Rectrice d’Académie, sans prétexter pour ne rien faire l’imminence d’élections locales, qu’une réunion visant à accélérer la révision de la carte scolaire du second degré, garante de la sécurité des élèves et de l’équilibre et la mixité des effectifs dans les collèges de Val-de-Reuil, Pont de l’Arche et Louviers, soit organisée et que l’on en finisse sans délai avec les coupes budgétaires, les fermetures de division en seconde, l’absence de vision et d’ambition dont souffre actuellement notre Lycée.

19 JAN 2021

La Ville solidaire des salariés du site de SANOFI de Val-de-Reuil

Depuis 5 heures, ce matin, une majorité de salariés de Sanofi/Val-de-Reuil participent, sur le site rolivalois du géant pharmaceutique, au mouvement de grève national visant à refuser les 3000 réductions d’emplois récemment décidés par la direction de l’entreprise et qui ont pour conséquence, en France notamment, de diminuer ses effectifs affectés à la R&D. Aucune des suppressions de poste annoncées ne concernera le site rolivalois tourné vers la production des vaccins.

C’est pourquoi cette journée, sur le site normand, a également pour objectif de dénoncer une politique salariale qui, cette année, ne proposerait aucune augmentation aux salariés de l’entreprise, tout en versant 4,7 milliards de dividendes à ses actionnaires, aucune prime à des femmes et des hommes qui, malgré leurs inquiétudes et deux confinements, n’ont jamais cessé le travail, et qui continue, pour recruter le quart de son personnel, parfois davantage dans certains services et métiers, à privilégier la précarité de l’intérim.

Marc-Antoine Jamet, Maire de Val-de-Reuil, par ailleurs Président de la commission des finances de la Région Normandie, et Jean-Jacques Coquelet, conseiller départemental de l’Eure, ont donc rencontré, en Mairie, pendant plus d’une heure, les représentants de l’intersyndicale de Sanofi.

Ils ont rappelé le lien particulier qui unit à la plus jeune commune de France, l’entreprise implantée en 1973, dès la création de la Ville. Celle-ci, qui ne comptait que 150 « pasteuriens » à l’origine, en emploie plus de 2000 aujourd’hui. Sanofi est devenu, en près de 50 ans, la première entreprise de Val-de-Reuil et la plus grande usine du département de l’Eure, 11èmedépartement industriel de France. Certes, cela tient aux 700 millions d’euros que la société a investi sur le site aux cours des dix dernières années auxquels s’ajouteront 120 millions d’euros en 2021. Mais cet effort financier, qu’il faut saluer, a été rendu possible grâce aux mécanismes du crédit d’impôt recherche proposé par l’État et que supporte les contribuables. Il faut aussi souligner qu’il a servi à renouveler, et pas toujours à accroitre, les capacités de production du site.

Les étapes de ce développement et les perspectives qu’il offre en termes d’emploi, croissance que la municipalité entend accompagner, ne sauraient justifier la réelle détérioration des conditions de travail que subissent actuellement tous les salariés de l’entreprise.Mobilisés depuis le début de la pandémie pour maintenir le niveau de production du site et permettre la vaccination contre la grippe, les salariés ont participé au véritable effort de guerre, parfois la peur au ventre de se contaminer et de contaminer leur famille, qu’impose encore la lutte contre le coronavirus.

Au terme d’échanges denses et constructifs avec la délégation syndicale venue partager avec la municipalité les revendications des salariés, Jean-Jacques Coquelet et Marc-Antoine Jamet ont souhaité, dans l’esprit de dialogue qui a toujours caractérisé l’action de la Ville, pour défendre l’emploi et préserver l’activité industrielle à Val-de-Reuil, réaffirmer la totale solidarité de la municipalité aux 2200 salariés qui travaillent quotidiennement sur le site Rolivalois. La municipalité soutiendra donc officiellement auprès de la direction du groupe.

1)                l’ouverture de discussions sur la revalorisation de la politique salariale appliquée aux employés du site et une répartition équitable de ses profits entre actionnaires et salariés ;

2)                la résorption de la précaritéet la fin du recours systématique aux contrats d’intérim pour abaisser la proportion de celui-ci de 25% à 8%.

3)                le versement d’une prime exceptionnelle aux salariés.

Au cours de l’année passée, 170 personnes, employées du site de Val-de-Reuil, ont bénéficié, à la suite d’un ou plusieurs contrats courts ou en intérim, d’un contrat à durée indéterminée. Ce travail, déjà, engagé doit se poursuivre et s’accélérer pour permettre à chacun une plus grande stabilité et un environnement professionnel apaisé.

La direction du site de Val-de-Reuil a indiqué, dans l’après-midi, au Maire de Val-de-Reuil qu’elle allait faire baisser son taux de précarité à 15% en 2021, qu’elle affirmait avoir versé une prime à 2100 salariés, (de 1500€ pour 1400 d’entre eux) et qu’elle entendait proposer aux salariés des augmentations de salaire sur une base allant au-delà du double de l’inflation.

L’industrie de la Santé est au cœur de la réussite économique de Val-de-Reuil. Avec des salariés, à l’implication valorisée, à l’effort mieux rétribué, bénéficiant de meilleures conditions de travail, elle participera davantage au recul l’épidémie et de la crise qui l’accompagne.

À titre personnel, Marc-Antoine Jamet a déclaré :

« Sur le fond, je suis catastrophé par la ratage industriel que constitue le retard pris dans la mise sur le marché du vaccin anti-covid que devait mettre au point Sanofi. Je ne peux m’empêcher de rapprocher ces délais non prévus, non seulement de la pénurie de doses que connaît notre pays actuellement et de la lenteur inacceptable des campagnes de vaccination, mais aussi de la pression économique et sociale que fait peser l’entreprise sur ses salariés. Sans méconnaître les difficultés en termes de validation réglementaire et de propriété industrielle qu’entraînerait cette coopération inédite, je souhaiterais que les capacités de production, qui seraient inemployées dans l’industrie française de santé, soient utilisées à la fabrication du vaccin Pfizer. Dans la forme, par ailleurs, ceux qui, comme moi, rencontrent les salariés de Sanofi chaque semaine et les défendent depuis des années, s’interrogent sur la présence miraculeuse sur le piquet de grève, durant quelques brèves minutes, à la veille des élections départementales et régionales, d’un soutien de la 25ème heure, entouré de caméras, plus connu pour être « l’idiot utile » de la Macronie qu’un atout dans les luttes sociales ».

 

11 NOV 2020

11 NOVEMBRE – Retrouvez ici le discours que j’ai prononcé ce matin, à 11 heures, au Monument Mémoire et Paix, à Val-de-Reuil, à l’occasion du 102ème anniversaire de l’Armistice de 1918

Commémoration de l’Armistice du 11 novembre 1918

Discours de M. Marc-Antoine JAMET,

Maire de Val-de-Reuil et Officier de la Légion d’Honneur

Monument « Mémoire et Paix »

Mercredi 11 novembre 2020 – 11h00

 

Chers concitoyens, chers collègues et chers amis, nous voici à nouveau réunis dans cette crypte à ciel ouvert entre la forêt, les champs et la rivière aux accents de quelques hymnes américains qui nous permettent de saluer la victoire de Joe Biden, rare bonne nouvelle dans un océan de morosité.

Élever au grand jour ce qui, d’ordinaire, est souterrain, entourer de hauts murs un monument qui, ailleurs, se dresse au milieu des esplanades et des places, préférer, pour se recueillir, l’alliance du gazon et du béton plutôt que l’architecture pesante des obélisques, des urnes et des gisants, célébrer l’avenir, à travers la mémoire et la paix, quand d’autres ne commémorent que des conflits anciens et les souvenirs perdus du passé, voici bien quelques-uns des paradoxes qui forgent la singularité de Val-de-Reuil, ville nouvelle qui ne déteste pas les rituels, cité contemporaine qui respecte les traditions.

Cette cérémonie et ce sanctuaire nous sont donc familiers. Trois fois par an, le 8 mai avec le printemps, le 14 juillet dans la chaleur de l’été, le 11 novembre sous un ciel menaçant, ils nous rassemblent. J’y suis avec vous depuis 20 ans. Je n’ai pas vu le temps passer. Probablement parce que ces moments d’unité sont importants.

Cependant, depuis qu’un virus nous soumet aux hasards de sa loi, rien n’est plus pareil. L’épidémie est devenue notre quotidien. Contaminations, hospitalisations, réanimations, inhumations, de couvre-feu en confinement, vague après vague, c’est à ce rythme que, désormais, nous vivons. Au jour le jour. A l’école, en famille, au travail, dans les commerces, la maladie fait son tri et ses ravages, autrefois lointains, se constatent sur notre territoire, parmi nos proches, jusque dans nos rangs. Faute d’un médicament, le meilleur moyen d’en guérir reste encore de ne pas en être atteint…

Aujourd’hui l’annonce faite par Pfizer d’un vaccin est un formidable espoir pour l’humanité toute entière. Mais, sans même évoquer ses effets secondaires et sa durabilité, il recèle, sa part de doute et de cruauté. S’il ouvre la possibilité d’un recul et, pourquoi pas, d’une disparition de l’épidémie, il ne pourra y parvenir, dans notre pays, qu’au terme des six prochains mois. 40.000 personnes en sont déjà décédées au cours des six derniers. C’est dire que, dans l’intervalle qui nous séparera de l’immunité quasi générale, naturelle ou provoquée, chaque semaine, au moins jusqu’à noël, nous compterons de nouveaux morts par centaines, souvent les plus faibles et les plus âgés, parfois les plus pauvres d’entre nous : tous ceux qu’une Nation démocratique et développée par un dispositif de santé publique fondé sur la priorité donnée à un système hospitalier performant et financé, performant parce que financé, à une médecine de ville écoutée et soutenue, soutenue parce que écoutée, aurait dû mieux protéger.

Alors ne relâchons pas nos efforts : conservons ce masque insupportable et indispensable en toute occasion, évitons les contacts et les réunions, limitons nos déplacements, pour les autres, pour nos parents et nos proches, pour ceux qui sont plus vieux ou plus fragiles, pour nous-mêmes après tout, continuons d’adopter urbi et orbi, sur le marché ou en mairie, les gestes-barrière parce que ce sont les seuls qui vaillent et les seuls qui sauvent. Soyons responsables parce que prudents et vigilants. Nous nous épargnerons ainsi bien des tourments.

C’est au nom de cette obligation que, comme pour la commémoration de la victoire de 1945 sur la barbarie nazie, voici six mois, nous avons décidé que cette manifestation républicaine et patriotique, même si elle devait avoir lieu, se tiendrait à huis-clos. Pour autant, dans nombre de communes, elle a été purement et simplement annulée. Ce n’est pas le choix que nous avons fait. Il m’appartient de le justifier. Devant vous qui êtes mes collègues et mes compagnons. Devant les habitants que je salue et qui peuvent nous rejoindre sur le compte FaceBook de la Ville et qui, à chaque fois que nous leur avons proposé, ont été plusieurs milliers, en direct ou en différé à nous suivre avec intérêt, curiosité ou amitié.

La raison fondamentale de ce maintien n’est pas très compliquée à trouver. Elle est inscrite au début de l’article 1ernotre constitution. « La France est une république indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Ces valeurs sont permanentes et universelles. Il n’y a pas d’éclipses ou de repos pour la liberté, l’égalité, la fraternité. Élus du suffrage universel, nous en sommes pendant six ans les ambassadeurs : au conseil municipal, dans les cours d’écoles, à chaque manifestation, sur le parvis des usines ou du théâtre, aux mariages et, parfois, aux enterrements, dans chacun de nos gestes et à l’occasion des fêtes nationales. La crise ne doit rien y changer. Notre pays nous a donné de petits cailloux blancs. Ce sont ceux de la démocratie, de la solidarité, de l’égalité des chances et de la justice sociale, ceux de la tolérance et de la bienveillance également. Ils ne doivent pas rester égoïstement, paresseusement, dans nos poches. Partout où nous allons, nous devons les répandre sur le sol et dans les esprits pour permettre à tous nos compatriotes, à tous nos administrés de toujours retrouver le seul chemin qui compte : celui du « vivre ensemble ». C’est notre rôle. C’est notre mission.

Seconde raison que vous partagerez, je l’espère, ces rendez-vous sont ceux que nous fixe la France à l’intérieur de frontières et de paysages que vingt siècles ont façonnés. Ces instants, d’une certaine façon, nous y sommes convoqués par l’Histoire à l’invitation, à l’imitation des figures, des héros et des modèles qu’elle nous a légués. Ce sont de justes habitudes, de nobles coutumes dont, comme la pratique de notre langue, nous avons hérité, soit par la naissance, grâce aux automatismes du sol ou du sang, soit par préférence et par l’intégration, seule perspective raisonnable à moyen terme, pour ceux qui ont volontairement obtenu notre nationalité ou choisi de s’associer durablement à la communauté française. C’est de ce creuset qu’est extrait l’alliage de notre identité partagée, non pas au-delà, mais au-dessus des races et des origines.

Dans les champs qui nous entourent et que l’INRAP soumet à la souffrance de ses fouilles incessantes, il reste un peu de Vercingétorix et de Clovis, de Bouvines, de Crécy et d’Azincourt, des comptoirs de Montcalm et de Dupleix, de l’éclat du roi soleil et du tumulte de la Grande Révolution, des drapeaux du pont d’Arcole et de la Commune de Paris, des poilus de Verdun et des mutins de Craonne, des maquis du Vercors et des martyrs de Birkenau, de Jaurès, Blum et Mendès France, qu’il faut citer en ce centenaire effacé du Congrès de Tours, de la colonisation et de la juste émancipation des peuples qui la rejetèrent, des trente glorieuses, de notre fondateur Georges Pompidou et des barricades de mai 68, de la construction de l’Europe, de l’abolition de la peine de mort et de François Mitterrand, de la libération des femmes dont la Panthéonisation de Gisèle Halimi pourrait rappeler aux jeunes générations étonnées qu’elle fut, il n’y a pas si longtemps, une longue marche contre le conservatisme et les idées installées. A Val-de-Reuil, très localement, très modestement, très fièrement, nous sommes demeurés propriétaires d’une part de ces actes, de ces dates et de ces mots.

Ce n’est pas rien. C’est pourquoi la Ville est pavoisée de bleu, de blanc et de rouge. C’est pourquoi la Marseillaise va retentir. Nous sommes ici les porteurs de cet imaginaire tricolore, de ce récit national et nous devons le transmettre à nos enfants. Il y a encore des chapitres à écrire de l’épopée hexagonale. Plus réjouissants et plus enthousiasmants que les tristes épisodes que, sans boussole et sans horizon, nous vivons depuis quelque temps. Comment sauraient-ils que là leur devoir, si nous ne laissons pas le livre ouvert sous leurs yeux.

Qui plus est, si nous ne nous mobilisons pas pour rappeler que ces symboles sont les repères de la Nation toute entière, d’autres, moins bien intentionnés, auront tôt fait de les confisquer transformant des faits indiscutés en « détails de l’Histoire » à leur petit profit. Je vous assure, femmes et hommes, nouveaux et anciens conseillers, que nous faisons œuvre utile en donnant pour cette heure sacrée de notre temps et de notre énergie à la collectivité.

Clemenceau en parlant des anciens combattants disait : « ils ont des droits sur nous ». Chaque 11 novembre, dans une trentaine de pays, la plupart restés ou devenus alliés et amis, les 18 millions de morts, civils et militaires, de la première guerre mondiale se rappellent à nous. Aucun survivant, évidemment, n’existe plus qui puisse dire ce qu’a été cette boucherie, mais il est une sépulture qui, depuis exactement cent ans ce matin, depuis le 11 novembre 1920, abrite un combattant français, pour toujours inconnu et à jamais illustre. Un bouquet de fleurs déposé sur son cercueil le désigna pour reposer au pied de l’Arc-de-Triomphe. Vers lui doit aller, quelles que soient les circonstances, notre reconnaissance. Nous ne pouvions, au prétexte de nos peurs ou de nos craintes, refuser de lui rendre notre hommage, enfants, petits-enfants ou arrière-petits-enfants de ceux qu’il contribua à défendre, jusqu’à la onzième heure du onzième jour du onzième mois de l’année 1918, jusqu’à ce que retentit dans les tranchées le clairon sonnant la fin des hostilités.

Tout comme il était impossible de ne pas s’incliner devant l’ombre géante du Général de Gaulle, né il y a 130 ans, mort il y a demi-siècle, après avoir, par deux fois, le 18 juin 1940 et le 1erjuin 1958, au-delà des clivages et des controverses, incarné la France et permis, avec son panache et sa vision, ses excès et sa démesure, qu’elle renaisse, qu’elle ressuscite aux yeux du monde.

Comment ne pas saluer enfin, comme l’a fait dans son message la Ministre en charge de la mémoire, la dépouille de l’écrivain solognot et académicien français Maurice Genevoix qui, aujourd’hui, franchira pour l’éternité le seuil de l’ancienne église plantée au sommet de la Montagne Sainte-Geneviève emmenant avec lui « Ceux de 14 », ceux de la colline des Éparges où il fût frappé de trois balles, ceux qui ont subi pendant cinq ans, jusqu’à l’armistice signé à Rethondes, la faim, le froid, le feu qui blesse, qui ampute et qui tue. Aux grands hommes la patrie reconnaissante !

A ceux tombés dans les tranchées, il faut fédérer ceux tombés en mai 1940, ceux de Londres, de la résistance autour de Jean Moulin ou du Parti Communiste, ceux du débarquement en Provence et des armées françaises qui, avec De Lattre, Koenig, Leclerc et Juin, marchèrent de Rome à Strasbourg, de Paris libéré à Berchtesgaden, ceux qui perdirent la vie en Indochine et en Algérie face à des peuples qui s’émancipaient de notre tutelle, ceux de la division Daguet durant la guerre du Koweït et de notre Marine Nationale dans le Golfe Persique, ceux des interventions au Tchad, au Zaïre, en Côte d’Ivoire ou en Centrafrique, des opérations au Liban, dernier pays où on exécuta, sans être autrement puni, un ambassadeur de France, en ex-Yougoslavie, en Afghanistan, en Lybie, en Irak et en Syrie, ceux qui se battent aujourd’hui au Niger, au Burkina et au Mali contre le terrorisme pseudo-islamiste.

A l’invitation du Président de la République, je veux citer devant vous pour que nous retenions leur nom les chefs de bataillon et d’escadron Clément Frison-Roche, Benjamin Gireud, Nicolas Mégard et Romain Chomel de Jarnieu, les capitaines Pierre-Emmanuel Bockel et Alex Morisse, le Major Julien Carette, les adjudants Alexandre Protin et Jérémy Leusie, les maréchaux des logis-chef Valentin Duval, Antoine Serre et Romain Salles de Saint-Paul, le maréchal des logis Andy Fila, les brigadiers Tojohasina Razafintsalama et Arnaud Volpé, les légionnaires Andreï Jouk, adjudant, Volodymyr Rybontchouk, caporal-chef, Dmytro Martynyouk, brigadier-chef, Kévin Clément, brigadier, tous morts pour la France, contre le djihadisme, le fanatisme et l’obscurantisme. C’est à eux, probablement qu’il faudra dédier la minute de silence que nous allons respecter dans un instant après avoir entendu la sonnerie aux morts.

A eux et à d’autres qui ne pouvaient imaginer que la bataille que ces soldats livrent pour la démocratie, se poursuivrait sur notre territoire, à la porte de nos églises et de nos écoles. Nous nous sommes tous arrêtés, voici deux semaines, pour marquer notre émotion devant le lâche assassinat d’un professeur d’histoire et de géographie à Conflans-Sainte-Honorine. Notre colère ne doit pas retomber. Samuel Paty avait étudié pour que les autres apprennent, parlait pour d’autres s’expriment, disait la vérité pour faire reculer le mensonge. C’était ainsi qu’il concevait son beau métier d’enseignant. Il en est mort, tué, non par l’Islam, mais par un fanatique borné, par un imbécile embrigadé, par un criminel attardé que rien n’excuse. Nul sur cette terre n’a le droit d’enlever la vie à qui ce soit, pas plus au nom d’une religion que d’une autre opinion, pour un dessin ou pour quelque autre raison.

C’est pourquoi, pas davantage que nous n’avons oublié le meurtre du père Hamel, en Normandie, à vingt kilomètres d’ici, nous n’oublierons ceux commis à Nice du sacristain Vincent Loquès, de Simone Baretto-Silva et de Nadine Devillers, victimes innocentes de la haine et de la bêtise conjuguées dans un cerveau manipulable. Pas plus que les morts de Vienne, les étudiants de Kaboul, les élèves de la Madrassa de Peschawar, tous musulmans, les familles du Cameroun ou du Nigéria tuées par Boko Haram, celles du Mali et du Niger exterminées par Daech ou Al Qaïda. Ce ne sont certainement pas les mosquées qu’il faut fermer, mais la folie et la violence qu’il faut éradiquer.

Complémentaire de la plus extrême fermeté, il n’y a pour cela qu’une seule voie. J’en suis intimement et politiquement persuadé. Donner aux femmes et aux hommes, sans exception, les instruments du libre-choix, du libre-arbitre, de la libre-détermination, loin des archaïsmes, des pesanteurs et des préjugés. C’est ce que nous nous efforçons de faire, à notre échelle, avec les compétences qui nous sont données, à Val-de-Reuil, en veillant sur les Rolivalois et en leur donnant des moyens pour se prémunir autant que faire se peut du virus, en maintenant le service public ouvert au CCAS, aux services techniques ou en mairie, en nous appuyant sur une police municipale agissante et aux effectifs augmentés, en étant aux côtés de nos instituteurs et de nos professeurs de la maternelle au lycée, en aidant nos commerçants et nos artisans, en soutenant nos entreprises, en encadrant nos jeunes, en offrant au plus grand nombre sports et culture, en réclamant le renforcement de notre commissariat, en n’arrêtant aucun des grands chantiers publics ou privés qui modifieront la physionomie de notre ville demain, le complexe Léo Lagrange, de nouveaux logements, le skate-park, la rénovation du Quartier de l’Andelle aux normes de l’éco-quartier, un budget solide et une dette remboursée, des entreprises implantées, l’école Victor Hugo, des pistes cyclables, des résidences pour personnes âgées et une promenade des Tilleuls devenue coulée verte.

Tout cela et beaucoup d’autres choses sont enclenchées et nous saurons les terminer pour l’amélioration de nos conditions et de notre cadre de vie. Ce succès n’est pas à mettre au crédit de tel ou tel. Il n’est pas de bonne gestion sans bonne équipe. Puisque nous sommes entre nous et que les Rolivalois sont, par la force des choses, un peu éloignés, je voudrais vous remercier, anciens conseillers ou élus fraîchement désignés, femmes et hommes de bonne volonté, progressistes, écologistes, socialistes, radicaux ou tout simplement désireux de travailler et d’avancer avec moi pour notre Ville, de la bonne ambiance et du bon esprit dont vous faites preuve, des initiatives et des idées que vous apportez, de l’exemplarité et de l’effet d’entrainement que cette attitude provoque, de votre implication et de votre engagement, de votre fidélité et de votre loyauté aux valeurs qui, comme ce sera le cas aux prochaines départementales, ont conduit notre liste à la victoire. Face à nos adversaires et face à l’adversité, nous avons deux armes collectives : la solidité et l’unité. Pour nos concitoyens, nous n’avons qu’un seul objectif : le bonheur de chacun.

Vive Val-de-Reuil, Vive la République, Vive la France.

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